Pour la première fois depuis la chute de Bachar Al Assad, des rassemblements ont marqué, hier à travers la Syrie, le 14e anniversaire du soulèvement de 2011, dont la répression avait déclenché la guerre civile. A Damas, des dizaines de personnes se sont rassemblées, sous un important dispositif policier, sur la place des Omeyyades, où durant les années de répression seuls se rassemblaient les partisans de l’ex-Président.
Signée officiellement avant-hier par le président syrien, Ahmad Al Charaa, la Déclaration constitutionnelle, qui fera office de Loi fondamentale durant la période de transition, donne une idée assez séduisante de la Syrie telle qu’imaginée par les nouveaux maîtres de Damas. Sur le papier en tout cas, elle a tout d’une Constitution libérale digne d’une démocratie moderne. Elle a qui plus est le mérite de tenir compte de la diversité des composantes ethniques et religieuses de la société syrienne.
L’accord prévoit «l’intégration de toutes les institutions civiles et militaires du nord-est de la Syrie dans l’administration de l’Etat syrien, y compris les postes-frontières, l’aéroport, les champs de pétrole et de gaz». Ce point est extrêmement important car il concerne l’administration autonome kurde du Rojava, le territoire couvrant le nord et le nord-est de la Syrie à majorité kurde, et qui, depuis 2015, est gouverné principalement par les Forces démocratiques syriennes (FDS).
Dans un communiqué publié dimanche sur Telegram, la présidence syrienne a annoncé que «dans le souci de rétablir la paix civile et faire éclater la vérité», Ahmad Al Charaa a ordonné «la création d’une commission nationale indépendante pour enquêter sur les événements survenus sur la côte syrienne». Ces événements, les plus violents depuis la chute de Bachar Al Assad, ont fait près de 1500 morts dont 943 civils, selon l’OSDH.
D’après l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), le bilan des pertes humaines (dans la région alaouite) s’élevait, hier, à 1311 morts répartis comme suit : 830 civils tués de sang-froid dans des massacres sectaires ; 481 membres de la sécurité publique.
Trois mois, jour pour jour, après la chute de Bachar Al Assad, la Syrie est confrontée à de graves troubles sécuritaires qui menacent sa stabilité. Ce jeudi 6 mars, de violents affrontements ont opposé les nouvelles forces de sécurité syriennes à «Fouloul Al Nidham», c’est-à-dire les partisans du régime déchu. Avec un bilan de plus de 70 morts, il s’agit des combats les plus meurtriers depuis le départ du dictateur alaouite.
Le Premier ministre israélien se sert de récents incidents qui se sont produits dans une ville druze appelée Jaramana, située aux portes de Damas, pour menacer d’intervenir en Syrie pour soi-disant «protéger les druzes». Depuis l’effondrement du régime alaouite le 8 décembre 2024, Israël n’a de cesse de multiplier les agressions militaires contre la Syrie, au mépris du droit international.
En Syrie, où les principales forces politiques et militaires kurdes sont une émanation directe du Parti des travailleurs du Kurdistan, l’accueil de l’appel à déposer les armes et à la dissolution du PKK lancé par Ocalan ce jeudi a été plutôt mitigé l Tout en saluant le geste fort de Abdullah Ocalan, le chef des FDS, Mazloum Abdi, a déclaré : «Cette décision ne nous concerne pas.» Sachant par ailleurs que les Kurdes syriens n’ont pas été invités à la Conférence de dialogue national, ils doivent négocier avec Ahmad Al Charaa leur intégration à la nouvelle armée.
l Le président du comité préparatoire, Maher Allouche, a affirmé qu’il y avait un «quasi-consensus parmi les Syriens sur six axes : la justice transitionnelle, la construction constitutionnelle, la réforme institutionnelle, les libertés publiques et la vie politique, les principes économiques généraux et le rôle des organisations de la société civile dans la reconstruction de l’Etat».
L’Union européenne a décidé de suspendre une partie des sanctions qu’elle imposait du temps de Bachar Al Assad à la Syrie. C’est ce qu’elle a annoncé hier à travers un communiqué intitulé : «Syrie : l'UE suspend des mesures restrictives concernant des secteurs économiques clés». «Le Conseil (européen) a décidé aujourd'hui (hier, ndlr) de suspendre un certain nombre de mesures restrictives compte tenu de la situation en Syrie.
Le proverbe arabe prescrit : «Autant de douleur que de cris.» Comme si cette sagesse avait été exprimée pour décrire l’état d’esprit du voisin de l’Ouest qui n’a pu dissimuler son immense peine suite à la visite qu’a effectuée récemment en Syrie, le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ahmed Attaf. Et cette douleur profonde n’aurait pas pu être aussi fidèlement exprimée que par les cris lancés par les thuriféraires obscènes engagés par le royaume sur les médias sociaux et sur leurs différents sites d’information ou plutôt de propagande.
Le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, est arrivé hier à Damas, la capitale syrienne, dans le cadre d’une visite officielle.
Ahmad Al Charaa a annoncé les principales étapes du processus transitionnel en Syrie sans vraiment fixer de calendrier. «Nous travaillerons à la formation d’un gouvernement de transition inclusif qui reflète la diversité de la Syrie avec ses hommes, ses femmes et ses jeunes, et nous œuvrerons à la construction des institutions de la nouvelle Syrie jusqu’à ce que nous atteignions le stade où nous pourrons organiser des élections libres et régulières», a-t-il promis lors de son premier discours en tant que Président plébiscité par ses pairs des autres factions.
L’UE veut aider à la reconstruction et nouer des relations avec ses nouveaux dirigeants qui plaident régulièrement pour la levée de ces sanctions. Certains Etats membres ont toutefois exprimé des réserves…
Parmi les sanctions imposées par les Etats-Unis à la Syrie, «l’interdiction de l’aide étrangère américaine au gouvernement syrien et l’opposition des Etats-Unis au soutien des institutions financières internationales à la Syrie, l’interdiction du commerce d’armes entre les Etats-Unis et la Syrie, l’interdiction d’exporter ou de réexporter des biens américains vers la Syrie» ou encore «l’interdiction d’importer certains produits syriens, y compris le pétrole». A cela s’ajoutent «le gel des avoirs du gouvernement syrien aux Etats-Unis et l’interdiction pour les personnes et les entreprises américaines de traiter ou de faire des affaires avec le gouvernement syrien, y compris les entreprises d’Etat syriennes».
Les discussions ont porté sur la façon de contribuer à «reconstruire la Syrie en tant qu’Etat unifié, indépendant et sûr pour tous ses citoyens, où le terrorisme n’a pas sa place, où sa souveraineté ne sera pas violée et où son intégrité territoriale ne sera pas attaquée, d’où que ce soit», ont déclaré les Etats participants.
Hasni Abidi est un fin spécialiste du monde arabe, un «continent» qu’il observe, ausculte et décrypte depuis plusieurs années, et auquel il a consacré de nombreux ouvrages.
La perspective d’un dialogue national, censé être le point de départ d’une refonte institutionnelle, suscite autant d’espoirs que d’inquiétudes.
Dans une interview accordée à la chaîne Al Arabiya, Ahmad Al Sharaa a indiqué qu’il faudrait quatre ans pour organiser des élections crédibles en Syrie. En attendant, une Conférence de dialogue national inclusive devrait se tenir dans les prochains jours pour s’entendre sur la conduite de la période de transition.
«Les combats sont très violents dans le sud et le sud-est de Manbij. Les avions de guerre turcs y participent pour tenter d’empêcher l’avancée des Forces démocratiques syriennes (kurdes) et d’ouvrir la voie aux factions pro-turques», indique l’Observatoire syrien des droits de l’homme.