Coup de théâtre à l'Assemblée populaire nationale (APN). Le président de la Chambre basse du Parlement, Brahim Boughali, a choisi le passage en force pour l'adoption du projet de loi portant règlement intérieur de l'Assemblée. C'est du moins ce qu'ont révélé hier des parlementaires.
La séance plénière, consacrée lundi à l'adoption de ce projet de loi, a connu plusieurs étapes. Elle était houleuse, des altercations verbales ont éclaté entre les députés et le bureau de l'Assemblée. Il était 12h30 lorsque les travaux de cette session, tenue à huis clos, ont débuté, mais tout de suite après la séance est suspendue en raison de divergences profondes sur certaines dispositions de ce texte.
Des députés du Front de libération nationale (FLN), ceux du Mouvement El Bina et enfin les élus du Mouvement de la société pour la paix (MSP) ont proposé le report de la plénière et donc du vote de ce texte, dont la programmation a déjà accusé un retard de plus d'une année. Intransigeant, le président de la Chambre basse du Parlement a opposé un «niet». Et le retour des députés à la salle plénière n'a été rendu possible que grâce à un consensus arraché entre les différents groupes parlementaires et le bureau.
La poursuite des travaux a été toutefois, de courte durée, puisque les députés du FLN, d'El Bina et du MPS ont rejeté ce qu'ils considèrent comme étant des articles «imposés» par le président de l'Assemblée dans le règlement intérieur. Des accusations qui ont donné lieu à des échanges durs avec les députés indépendants. Ces derniers ont pris la défense de M. Boughali. Au moment du vote des articles de ce texte de loi et dans un climat de tension, les députés des trois formations ont décidé de quitter la salle plénière.
Ils contestent non seulement la manière dont le président de cette institution parlementaire dirige la séance, mais aussi ils l'accusent d'avoir pris des décisions unilatérales. «Le président de l'APN a forcé le destin. Sur les 407 députés, 80 seulement étaient dans la salle lors du vote. Les députés du FLN, d’El Bina et du MPS avaient quitté la salle. Il y avait une concertation entre les groupes parlementaires et le bureau, mais ce dernier s'est rétracté sur l'accord», nous confie une source parlementaire qui a dénoncé «l'absence de transparence» qui a caractérisé cette plénière mais également «le non-respect des règles démocratique».
Saisine de la Cour constitutionnelle
Un communiqué commun a été rédigé par les trois partis contestataires et lu devant les députés. Les trois entités ont dénoncé le «comportement» et «le jusqu-au-boutisme» de M. Boughali et s'engagent à réviser le règlement intérieur, mais «pas dans de telles conditions». Dans le cas contraire, les élus des trois partis promettent de mener d'autres actions, telles que la saisine de la Cour constitutionnelle, comme le stipule, précisent-ils la Loi fondamentale du pays. Par ailleurs, sur le site de l'APN, aucun détail n'a été livré sur cette plénière ; il est juste mentionné que le texte a été approuvé lors d'une séance à huis clos. Composé de 215 articles, certaines dispositions de ce nouveau règlement ont été adaptées à la Constitution, y compris les procédure de levée de l'immunité des représentants du peuple.
Il renferme aussi des mesures qui traitent de l'absence des députés aux réunions et aux sessions et qui définissent les sanctions en cas d'absence inexpliquée. Toutefois, les articles objet de désaccord sont, entre autres, l'alinéa 3 de l'article 17 et l’article 152.
Le premier concède de nouvelles prérogatives au bureau de l'APN, dont notamment celle d'étudier dans le fond du contenu des propositions de loi, des résolutions, des auditions et des questions orales et écrites, ainsi que la possibilité de voir la forme des propositions d'amendements des projets de loi et de propositions de projets de loi.
Par contre, l’article 152 bis interdit aux députés la publication ou la divulgation de tout document ou information à caractère confidentiel lié aux travaux de l’Assemblée ou à ses délibérations internes ou à toute autre question liée à la sécurité de l'Etat ou considérée comme confidentielle en vertu des lois en vigueur. «Sont considérés comme confidentiels les documents et informations classés comme tels par le bureau de l’Assemblée ou toute partie concernée conformément aux lois en vigueur ou qui ont été identifiés comme liés à la sécurité de l’Etat ou ses intérêts suprêmes», lit-on dans le rapport.
Aussi, la divulgation ou la publication de ces documents ou informations par tout député constitue une violation de ses devoirs constitutionnels et juridiques et l'expose à la responsabilité légale et aux sanctions prescrites à cet égard. Nabila Amir