Leur profession en débat au Sénat : Les huissiers associés dans la lutte contre le blanchiment d’argent

11/07/2023 mis à jour: 00:22
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Abderrachid Tabi, ministre de la Justice garde des Sceaux - Photo : D. R.

Le nouveau projet  de loi régissant la profession d’huissier de justice oblige ce dernier à signaler, à l’organisme compétent, toute opération suspecte relative aux fonds obtenus illégalement ou qui semblent être destinés au blanchiment, ou pour financer le terrorisme.

Le projet de loi régissant la profession d’huissier de justice adopté par  l’APN  le 24 juin  dernier a été débattu hier en plénière  par les membres du conseil de la Nation. Présenté par le ministre de la Justice, garde des Sceaux, M. Abderrachid Tabi, les  nouvelles dispositions de cette loi, selon le ministre, «contribuent à l’implication du casier judiciaire dans le domaine de la lutte contre le blanchiment d’argent et les atteintes aux deniers publics».

La principale nouveauté dans ce texte porte sur la fusion des professions d’huissier de justice et de commissaire-priseur, tout comme il lève le chevauchement entre les prérogatives des deux professions et renforce la transparence. Lors des débats, peu de sénateurs ont pris la parole, soit une dizaine. Tous ont soulevé la problématique de l’article 7, notamment en ce qui concerne le passage lié à la perquisition du bureau de l’huissier de justice en cas d’extrême nécessité.

Cet article énonce que «l’office public d’huissier de justice jouit de la protection légale. Nul ne peut l’inspecter ou saisir les pièces qui y sont déposées que sur mandat judiciaire préalable écrit, en présence d’huissier concerné ou de son représentant, du président de la chambre régionale des huissiers de justice ou de son représentant, et après les avoir dûment saisis. En cas d’extrême nécessité, l’inspection et la saisie des pièces peuvent être effectuées sans la présence des personnes mentionnées au paragraphe ci-dessus. Toute mesure contraire au présent article est déclarée nulle et non avenue».

Les sénateurs ont demandé des explications et la définition de «ces cas d’extrême nécessité». «Pourquoi l’article 7 ne donne pas des détails sur ces cas absolue», s’interrogent les sénateurs. D’autres ont qualifié l’article 11 qui évoque  la fin de fonction d’huissier de justice à l›âge de 70 ans  sur décision du ministère de la justice comme une «sanction».

Le même article précise que le garde des Sceaux peut prolonger «les missions d’huissier de justice à soixante-douze (72) ans à la demande du concerné, de la chambre nationale des huissiers de justice, de la chambre régionale dont le ressort de laquelle se trouve l’office du concerné ou du procureur général compétent, si nécessaire, la santé du concerné dûment observée.

Les conditions et modalités d’application du présent article sont fixées par voie réglementaire». Par ailleurs les intervenants ont relevé le recours abusif aux textes  d’applications. Dans ses réponses aux sénateurs, notamment en ce qui concerne l’article 7, le ministre de la Justice a affirmé qu’il est «quasiment impossible» de définir les cas extrêmes de perquisition du bureau de l’huissier de justice  car un huissier peut être impliqué dans un crime.

«En cas de nécessité absolue l’on  recourt à la perquisition du bureau d’huissier de justice, mais dans le texte on ne peut pas spécifier ces cas ou être précis. Ces situations peuvent varier notamment si l’huissier est soupçonné d’être impliqué dans un crime. Ce qui contraint la justice à agir immédiatement», détaille le ministre  qui rappelle que suite aux propositions formulées par les députés de l’APN lors de leurs débats sur ce texte, un amendement a été introduit à l’article 7, stipulant la notification du président de la chambre régionale des huissiers de justice pour assister à l’opération de perquisition et de saisie.

Pour ce qui est des textes d’application, le ministre, réfute le «recours abusif» aux textes d’application. «Dans le texte objet de débat, il est fait référence à seulement 4 textes d’applications  dont le contenu sera connu incessamment», annonce-t-il.

Par ailleurs,  dans sa présentation du contenu de ce projet de loi , le garde des Sceaux a réparti le texte en trois principaux volets : le premier, détaille-t-il, est lié à l’amélioration et la modernisation de la profession d’huissier de justice, «suivant l’action du gouvernement qui vise à généraliser la numérisation dans l’ensemble des activités en obligeant les huissiers de justice d’enregistrer et préserver les écritures en version papier et électronique, en plus d’utiliser la technique de signature et certification électroniques».

Le texte interdit à l’huissier de justice d’entraver la profession ou la mise en œuvre des décisions des chambres, ainsi que l’incompatibilité de l’exercice de la profession d’huissier de justice avec un mandat électif dans les assemblées locales ou nationales, l’obligeant à exercer à temps plein cette profession. Au titre du deuxième volet relatif aux mécanismes visant à renforcer la mise en œuvre des décisions judiciaires, ledit texte oblige l’huissier à respecter les délais fixés juridiquement ou judiciairement pour s’acquitter des missions qui lui sont confiées et éviter toute obstruction.

Quant au troisième volet dédié à l’assistance de l’huissier de justice dans la lutte contre le blanchiment d’argent et l’atteinte aux deniers publics, le projet oblige l’huissier de justice à signaler, à l’organisme compétent, toute opération suspecte relative aux fonds obtenus illégalement ou qui semblent être destinés au blanchiment, ou pour financer le terrorisme.

Dans son plaidoyer, M. Tabi a indiqué que le texte de loi «propose des amendements visant à organiser la profession d’huissier de justice et à booster le rythme de mise en œuvre des jugements conformément aux réformes suggérées dans le cadre du projet d’amendement du Code des procédures civiles et administratives en cours d’enrichissement, et qui sera soumis au Parlement lors de la prochaine session »

 


 


 

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