La guerre s’apprête à entrer dans son cinquième mois : Inquiétude sur une offensive militaire imminente à Rafah

06/02/2024 mis à jour: 02:30
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Photo : D. R.

Une lettre ouverte, signée par plus de 800 cadres américains et européens, dénonce le soutien accordé par leurs gouvernements à Israël dans cette guerre.

Le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, est, depuis hier, en tournée au Moyen-Orient avec l’objectif de parvenir à une nouvelle trêve entre Israël et le Hamas.

Alors que la guerre s’apprête à entrer dans son cinquième mois, l’armée israélienne a intensifié ses bombardements, visant notamment Khan Younès, dans le sud du territoire, sous prétexte de la présence présumée de responsables du mouvement islamiste palestinien.

Rafah, une autre ville située plus au sud, a également été la cible de frappes aériennes, touchant même un jardin d’enfants. Cette ville, qui comptait autrefois 270 000 habitants, abrite désormais plus de 1,3 million de personnes qui ont fui les combats dévastateurs dans le territoire assiégé, selon les chiffres de l’Onu.

Les inquiétudes montent face à la possibilité d’une offensive militaire imminente contre cette ville surpeuplée, située à la frontière avec l’Egypte, et où la situation humanitaire est désastreuse.

Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, prétend que l’armée avait détruit la majorité des «bataillons» du Hamas, précisant que la plupart des membres restants se trouvent dans le sud de la Bande de Ghaza et à Rafah ; justifiant ainsi la volonté de l’armée d’occupation de s’en prendre à cette ville où les déplacés palestiniens ont trouvé refuge.

Sur le front diplomatique, des pourparlers sont en cours pour parvenir à une deuxième trêve, après celle qui a eu lieu fin novembre et qui a permis l’échange d’une centaine d’Israéliens retenus à Ghaza contre des Palestiniens détenus par Israël. Les tractations devraient concerner les 132 otages enlevés le 7 octobre.

Parmi eux, 27 ont été déclarés morts par l’armée d’occupation. Selon une source du Hamas citée par l’AFP, la proposition prévoit notamment une trêve de six semaines avec la libération de 35 à 40 otages en échange de 200 à 300 détenus palestiniens. A Beyrouth, un responsable du Hamas, Oussama Hamdane, avait jugé prématuré de parler d’un accord sur une trêve.

Le projet élaboré par les médiateurs qatari, américain et égyptien à Paris fin janvier est «un accord-cadre qui a besoin d’être étudié» par le mouvement palestinien qui exige un cessez-le-feu total. Ce que refuse Benyamin Netanyahu, malgré la pression des familles des otages qui manifestent quasi quotidiennement pour demander la libération de leurs proches.

Antony Blinken, représentant du principal soutien d’Israël, prévoit ainsi des escales en Arabie Saoudite, au Qatar, en Egypte, en Israël et en Cisjordanie occupée. Tout en disant continuer à soutenir le «droit d’Israël à se défendre», les Etats-Unis expriment de plus en plus leur frustration envers le gouvernement israélien.

En Israël, Antony Blinken prévoit de faire pression pour accroître l’acheminement de la nourriture, d’eau et de médicaments vers la Bande de Ghaza, plaçant les besoins de la population palestinienne au cœur de l’agenda américain. Le fait est que l’administration américaine fait face à une pression interne.

Lettre de plus de 800 cadres américains et européens

Une lettre ouverte, signée par plus de 800 cadres américains et européens, dénonce le soutien accordé par leurs gouvernements à Israël dans cette guerre. Cette lettre, publiée le 2 février, souligne les préoccupations des signataires quant à la complicité de leurs gouvernements dans l’une des pires catastrophes humanitaires du XXIe siècle, en raison de l’incapacité à soumettre Israël aux normes internationales en matière d’aide humanitaire et de droits humains.

L’initiative regroupe des fonctionnaires de l’Union européenne, des Pays-Bas et des Etats-Unis, ainsi que de hauts fonctionnaires de plusieurs autres pays européens. Ces signataires, préoccupés par l’absence de prise en compte de leurs inquiétudes par leurs gouvernements respectifs, appellent à un changement de cap dans la politique occidentale vis-à-vis d’Israël.

Pour The New York Times, une telle initiative «montre à quel point la politique pro-Israël des gouvernements américain, britannique et européens divise les fonctionnaires d’Etat, y compris parmi ceux chargés de mener à bien la politique étrangère de leurs Etats».

Seules l’Irlande, l’Espagne et la Belgique ont appelé leurs alliés européens et américains à davantage de modération.  De son côté, Benyamin Netanyahu va jusqu’à défier son allié américain, en réaffirmant son opposition à la création d’un Etat palestinien. Lors d’une récente conversation téléphonique entre Biden et Netanyahu, le Premier ministre israélien a exprimé son refus d’une «souveraineté palestinienne» dans la Bande de Ghaza lorsque la guerre prendra fin.

Joe Biden a, lui, déclaré à l’issue de cette conversation qu’il était encore possible que B. Netanyahu accepte une «certaine forme d’Etat palestinien». Netanyahu a ajouté, dans un message publié samedi dernier sur le réseau social X, qu’Israël devait conserver «le contrôle de la sécurité sur l’ensemble de la zone située à l’ouest du Jourdain», soit «une zone qui englobe également la Cisjordanie occupée».

Cette position aurait généré, selon les médias,  un différend indirect avec Joe Biden. «Au cours du week-end, M. Netanyahu s’est disputé publiquement – bien qu’indirectement – avec le président américain Joe Biden», constate le journal britannique The Guardian, et ce, alors que celui-ci «offre depuis des mois à Israël un soutien presque inconditionnel pour sa guerre à Ghaza, au prix d’un coût politique considérable pour sa propre administration, tant aux Etats-Unis qu’à l’étranger».

Le président américain de 81 ans, qui souhaite rempiler pour un second mandat, pourrait bien, lors de la présidentielle de novembre, payer le prix de son «soutien indéfectible» à Israël, d’autant qu’il y a désormais une nouvelle génération d’électeurs plus sceptique à l’égard de l’Etat sioniste.
 

 

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