Guerre commerciale : Les craintes de récession accentuent la chute des prix du pétrole

08/04/2025 mis à jour: 12:45
730
Les prix de l'or noir ont ouvert la semaine de cotation en nette baisse

Les prix du pétrole ont ouvert hier la semaine de cotation en nette baisse, prolongeant les pertes enregistrées la semaine dernière dans le sillage des nouveaux tarifs douaniers américains et la sortie inattendue de l’Opep+, qui a accéléré, sans préavis, le rythme de la mise sur le marché des quotas de huit de ses membres. Hier, l’escalade des tensions commerciales a accentué les pertes du pétrole au vu des craintes d’une récession qui réduirait la demande de brut, tandis que l’OPEP+ prépare une augmentation de l’offre. Les prix de l’or noir ont encore baissé reculant de plus de 2%, et enregistrant des valeurs très basses, jamais égalées depuis avril 2021. 

Les contrats à terme sur le brut américain West Texas Intermediate (WTI) ont atteint un plus bas durant la séance matinale de cotation à 58,95 dollars le baril, alors que le Brent a chuté à un plus bas intrajournalier à 62,51 dollars.Les deux références ont ensuite remonté en cours de cotation, mais restaient très fragiles. Le pétrole brut américain a reculé globalement de 2,6%, soit 1,68 dollar, à 60,31 dollars, avant de remonter au-dessus de 61 dollars en début d’après-midi, tandis que le Brent, qui a perdu 2,3%, soit 1,50 dollar, à 64,08 dollars au cours de la journée, a renoué avec des valeurs oscillant entre 65 et 66 dollars le baril. Les indices de référence s’échangeaient à leurs plus bas niveaux depuis 2021. 

Cette dernière évolution des prix fait suite à la baisse de plus de 10% du brut américain et du Brent. La semaine dernière, le Brent et le WTI ont perdu respectivement 10,9% et 10,6%. La poursuite de la chute vertigineuse des prix du pétrole fait suite à la riposte de la Chine, qui a décidé de renforcer ses droits de douane sur les produits américains, entrant ainsi de plain-pied dans la guerre commerciale enclenchée par les Etats-Unis, ce qui conduit les investisseurs à anticiper une probabilité accrue de récession. 

La Chine a annoncé des droits de douane de rétorsion sur les importations américaines, s’alignant sur le taux américain de 34%, en plus des taxes existantes. Cette décision a été perçue comme pessimiste pour le pétrole brut, d’où son impact sur les prix, indique Oil Price. «L’incertitude entourant la politique tarifaire est toujours très présente. Plusieurs banques de Wall Street réduisent leurs perspectives économiques et anticipent une probabilité de récession bien plus élevée», selon des analyses répercutées par Reuters. 

Pour sa part, Goldman Sachs a prédit, hier, une probabilité de 45% de récession aux Etats-Unis au cours des 12 prochains mois et a révisé à la baisse ses projections de prix du pétrole. Citi et Morgan Stanley ont également abaissé leurs prévisions pour le Brent. JPMorgan a déclaré la semaine dernière qu’elle prévoyait une probabilité de 60% de récession aux Etats-Unis et dans le monde.L’impact sur la courbé des prix de l’or noir de la guerre commerciale enclenchée par Donald Trump a été accentué par la décision de l’Opep+ de mettre plus de pétrole sur le marché, en annulant plus que prévu les restrictions volontaires de production de certains de ses membres. Les analystes des matières premières d’ING ont relevé, selon Oil Price, l’impact de «la décision de l’OPEP+ sur la production comme un facteur majeur de l’évolution récente des prix du pétrole, attribuant cette décision à trois raisons : premièrement, les sanctions américaines contre le Venezuela et l’Iran ; la pression américaine sur l’Arabie Saoudite pour qu’elle baisse les prix du pétrole et le désir de punir les surproducteurs, tels que l’Irak et le Kazakhstan».

Une Nouvelle crise majeure pour le pétrole ?

Dans ce contexte économique fortement perturbé, l’actuelle chute des prix du pétrole va-t-elle s’inscrire dans la durée, marquant une nouvelle crise pétrolière majeure, dont les effets ne manqueraient pas de fragiliser notamment les économies des pays producteurs ? 

Une analyse répercutée par Oil Price évoque d’autres épisodes similaires vécus, dans un passé récent, par la sphère pétrolière. Le média rappelle six événements qui ont conduit à des chutes quotidiennes des prix du pétrole de plus de 7% depuis la mi-2020. Il s’agit notamment de la période d’août 2019, lors de précédente menace de Trump sur les tarifs douaniers, ce qui a occasionné un recul de 7,9% pour le WTI et 7,0% pour le Brent. «Le président Trump avait annoncé alors sur Twitter un nouveau tarif douanier de 10% sur 300 milliards de dollars d’importations chinoises, faisant chuter les prix du pétrole, alors que les marchés paniquaient face à l’escalade de la guerre commerciale et au ralentissement de la demande mondiale.»

Le 9 mars 2020, après l’échec des négociations au sein de l’OPEP+, l’Arabie Saoudite et la Russie se sont lancées dans une guerre des prix du pétrole, alors même que la pandémie de Covid-19 se propageait à l’échelle mondiale. Le brut avait alors chuté de manière spectaculaire. Le WTI avait reculé de 24,6% en une seule journée, marquant la deuxième plus forte baisse journalière en pourcentage de l’histoire, alors que le Brent chutait de 24,1%, tombant à 34,36 dollars le baril. Ce fut la crise la plus spectaculaire de ces dernières années. Le 20 avril 2020, le pétrole américain WTI a même connu des valeurs négatives, chutant de 305% et passant de 18,27 dollars à -37,63 dollars, alors que le Brent s’établissait à 25 dollars le baril.
Zhor Hadjam

Copyright 2025 . All Rights Reserved.