Un convoi humanitaire de l’UNRWA mitraillé hier à Ghaza : Israël défie l’Onu

30/12/2023 mis à jour: 06:48
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Les convois humanitaires entrent au compte-gouttes dans l’enclave palestinienne

Alors que la population civile qui survit aux bombardements souffre de la famine, l’armée d’occupation israélienne a mitraillé, hier matin, un convoi humanitaire acheminé par l’Unrwa (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine) sur une route qu’elle a elle-même préalablement arrêtée. 

Une réponse claire d’Israël à l’Onu, pour lui signifier son opposition à l’envoi d’aide humanitaire à la population de Ghaza. Dans une déclaration sur X (anciennement Twitter), Thomas White, directeur de l’Unrwa, a alerté l’opinion publique sur ce grave incident, précisant que «le chef du convoi international et son équipe n’ont pas été blessés mais qu’un véhicule a été endommagé». White a terminé son message en rappelant que «les travailleurs humanitaires ne devraient jamais être une cible». 

Il y a quelques jours, le même responsable a exprimé sa profonde «préoccupation par rapport au fait qu’une fois l’aide arrivée à Ghaza, le conflit en cours nous empêche de (la) fournir» aux bénéficiaires. Pour le directeur de l’Unrwa, «au moment même» où le Conseil de sécurité de l’Onu exigeait le renforcement et l’élargissement de l’aide humanitaire pour la population civile à Ghaza, «les autorités israéliennes ordonnaient à davantage de personnes de se déplacer et signalaient un élargissement de l’offensive». 

Durant la semaine écoulée, le même responsable a lancé un cri d’alarme sur la famine qui touche, selon lui, 40% de la population de l’enclave. Dans son message diffusé à travers son compte X, il a décrit la situation à Ghaza comme «catastrophique», avant de préciser que «chaque jour à Ghaza, il y a une lutte pour la survie, pour trouver de la nourriture et de l’eau. Ghaza souffre d’une faim catastrophique. 40% de sa population étant désormais menacés de famine. La réalité est que nous avons besoin de plus d’aide pour la population de Ghaza et que le seul espoir restant est un cessez-le-feu humanitaire». 

La réponse de l’entité sioniste est venue hier matin, à travers le mitraillage du convoi de nourriture par son armée. Il faut dire qu’entre Israël et les agences de l’Onu (OMS, Unicef, Unrwa) mais aussi avec le Haut-Commissariat des droits de l’homme - HCDH), rien ne va plus. 

Pour l’Etat hébreu, l’Onu, à sa tête le secrétaire général, Antonio Guterres, agit pour le compte du Hamas. Depuis le 7 octobre dernier, lors des réunions de l’Assemblée générale, les interventions de l’ambassadeur d’Israël ont été de véritables réquisitoires contre le chef de l’ONU. Il y a quelques jours, Israël a refusé le renouvellement des visas des fonctionnaires onusiens. Jeudi dernier, Volker Türk, premier responsable du HCDH, a mis en garde contre «la détérioration rapide» de la situation en Cisjordanie occupée, «avec des niveaux de violence jamais vus depuis des années». 

Commentant un nouveau rapport du HCDH sur la Cisjordanie, publié par son bureau et repris par la plateforme de l’ONU, Türk s’est déclaré «préoccupé par l’utilisation de moyens militaires et d’armes par les forces de maintien de l’ordre, par les restrictions de mouvement affectant les Palestiniens et par une forte augmentation de la violence des colons entraînant le déplacement des communautés d’éleveurs». Pour le responsable onusien, «la déshumanisation des Palestiniens (…) doit cesser immédiatement». De ce fait, il a appelé l’Etat hébreux «à enquêter sur les incidents, à poursuivre les auteurs et à protéger les communautés palestiniennes contre toute forme de transfert forcé». 

 

300 palestiniens tués en Cisjordanie 

Un appel qui ne risque pas de trouver d’écho, sachant que les colons agissent en toute impunité et, souvent, sous la protection des militaires. Il ne s’agit pas d’actes isolés, puisque comme l’a si bien souligné le responsable onusien des droits de l’homme, «ils reprennent des schémas documentés dans le passé, mais avec une intensité accrue. 

Depuis le début des bombardements israéliens sur Ghaza (...), le HCDH a vérifié la mort de 300 Palestiniens en Cisjordanie, dont 79 enfants, la grande majorité d’entre eux ayant été tuée par les forces de sécurité, tandis que huit l’ont été par des colons». Le directeur de l’Unwra a rappelé que dans la dernière mise à jour, l’OCHA (Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU)a «souligné que 2023 est l’année la plus meurtrière pour les Palestiniens en Cisjordanie, depuis que l’ONU a commencé à enregistrer les victimes en 2005». 

Il en est de même pour l’Unicef, a-t-il dit, dont la directrice pour la région Mena, Adele Khodr, a annoncé que «2023 est l’année la plus meurtrière jamais enregistrée pour les enfants en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est. 83 enfants ont été tués au cours des 12 dernières semaines, soit plus du double du nombre d’enfants tués pendant toute l’année 2022. 

Plus de 576 ont été blessés et d’autres auraient été détenus (...). Alors que le monde observe avec horreur la situation à Ghaza, les enfants de Cisjordanie vivent leur propre cauchemar (…), les violations graves contre les enfants, en particulier les meurtres et les mutilations, sont inacceptables (...). Les enfants ne devraient jamais être la cible d’actes de violence». 

Le rapport du HCDH, faut-il le signaler, a relevé l’arrestation de plus de 4700 Palestiniens, dont une quarantaine de journalistes, «dans la plupart des cas sans lien avec la commission d’une infraction pénale. Certains détenus ont été soumis à de mauvais traitements, déshabillés, les yeux bandés et attachés pendant de longues heures avec des menottes et les jambes liées, tandis que les soldats israéliens leur marchaient sur la tête et le dos... leur crachaient dessus, les plaquaient contre les murs...». 

Le rapport fait également état «de cas de violences sexuelles et sexistes, dont un détenu qui a été frappé dans les parties génitales, la nudité forcée de plusieurs détenus montrée dans des vidéos, des insultes sexuelles à l’encontre d’une femme», signalant «254 attaques, soit une moyenne de six incidents par jour, depuis le 7 octobre dernier, contre trois depuis le début de l’année (…)». 

Force est de constater que tant que la communauté internationale ne met pas un terme à cette guerre génocidaire contre la population civile à Ghaza, toute opération d’acheminement de l’aide est vouée à l’échec. Israël a pour objectif, dans les meilleurs des cas, de déporter les survivants de cette épuration ethnique ou les laisser mourir de faim. 

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