Repère - Les enjeux de la présidentielle

27/03/2024 mis à jour: 05:46
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Retour sur la «présidentielle écourtée». Pour en savoir plus, il faudra attendre, peut-être, que le chef de l’Etat l’évoque lors d’un événement public, un Conseil des ministres ou un entretien avec les médias. La dépêche de l’agence officielle APS qui lui a été consacrée n’a pas apporté les éléments de réponse attendus, car se limitant à des généralités, parfois mal formulées.

Plus globalement, les médias se sont contentés de relayer les déclarations, assez générales, de quelques partis et personnalités publiques. Apparemment, les acteurs politiques attendent d’en savoir plus avant de tirer des conclusions ou de se positionner. La prudence est donc de mise dans l’attente des précisions du chef de l’Etat lui-même.

C’est le même état d’esprit qui prévaut au sein de la population, persuadée qu’il se passe «quelque chose» mais qu’ elle n’arrive pas à saisir. Elle sait que, généralement en Algérie, les scrutins présidentiels apportent presque toujours des surprises. Il reste que diverses pistes ont été explorées par ceux qui ont eu à commenter cet événement.

Celle qui revient le plus a trait à la visite programmée en France, fin septembre, par le chef de l’Etat. On pense que Tebboune ne veut pas l’effectuer avec un habit de président en fin de mandat. Bien qu’ il incarne la continuité de l’Etat, il serait mieux écouté s’il était le Président fraîchement élu, avec un nouveau mandat de cinq années encore.

Il gagnerait en crédibilité face à Macron sur les dossiers qui fâchent que sont la mémoire, l’émigration, les dossiers internationaux (Palestine, Sahara occidental) et les accords bilatéraux, dont ceux de 1968 contre lesquels a surgi un forcing pour leur révision.

Aussi, pense-t-on encore, le président Tebboune devra avoir le maximum d’atouts pour négocier en toute force, plus particulièrement une légitimité au long cours. D’où donc l’idée d’une élection avant son voyage à Paris en tant que Président réélu. Evidemment cela part de l’hypothèse d’une candidature officielle de Abdelmadijd Tebboune.

Elle reste encore pendante, comme l’est une victoire lors du scrutin du 7 septembre prochain. Sur cela, Tebboune se prononcera le plus tard possible, ne serait-ce que par tactique électorale classique.

Au niveau de la classe politique, comme on l’a vu, les positionnements électoraux se feront une fois clarifiées les intentions du Président en exercice, certainement juste après les fêtes de l’Aïd El Fitr, le calendrier étant très serré. Pour l’opposition, ce sera généralement en cercles limités au vu de la difficulté d’accéder à la place publique.

Les candidatures au scrutin apparaîtront au fur et à mesure. Inévitablement se mettront en scène des «farfelus», aux côtés des sérieuses candidatures, indépendants et représentants de partis. Des appels au boycott seront prononcés du côté de ceux qui considèrent que les jeux sont faits ou bien biaisés.

Mais tous les candidats devront affronter le fameux tamis des signatures d’élus ou de citoyens. Il est connu que cette impitoyable sélection ne profite généralement qu’aux «anciens partis», déjà installés ou agissant à proximité du pouvoir. Et bien entendu historiquement au candidat dit «du système» en faveur duquel se mobilisera tout l’Etat, une perspective qui fait toujours débat et qu’a cherché à combattre, avec plus ou moins de succès, la Commission de suivi des élections.

Ce qui pèsera dans cette compétition électorale, ce sera son déroulement en plein été de canicule, de feux de forêt et de vacances. Elle épuisera ou carrément découragera les candidats les moins pourvus techniquement et financièrement. Cela arrangera ceux dotés de grands moyens, mis en œuvre directement ou indirectement.

D’autres raisons expliquent encore la mesure décidée par Tebboune de limitation de son mandat. L’une d’entre elles relève des rapports de force existant traditionnellement au sein du système politique algérien. Ils sont difficiles à décoder de par leur opacité. Pour autant, comme à chaque rendez-vous électoral, il sera difficile aux partis politiques surtout de ne pas aller en compétition électorale, notamment ceux disposant d’un certain ancrage populaire.

C’est leur raison d’être. L’ opposition, plus particulièrement démocratique, joue, quant à elle, et encore une fois, sa survie. Elle devra faire preuve de beaucoup d’imagination et d’efforts pour rester en course, si tant qu’elle considère que cela en vaut la peine.

Mais le maître du jeu reste le président Tebboune. Il peut faire en sorte que le scrutin à venir, en dépit de toutes les pesanteurs, soit totalement et réellement transparent et sincère. Il doit s’engager fermement à n’être qu’un candidat parmi tous les autres, sans le secours de l’Etat.

Et ce qui importe ce sera la crédibilité électorale et non la date du vote somme toute secondaire. Pour ce faire, le chef de l’Etat a une arme de choix à sa disposition, la main tendue à tous les Algériens, dans un climat d’apaisement politique général.

 

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