Guerre contre Ghaza : Trump et Netanyahu réaffirment leur soutien au plan d’expulsion

09/04/2025 mis à jour: 10:14
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Alors que l’Onu exhortait les dirigeants du monde entier de  prendre  «des mesures urgentes pour sauver les Palestiniens de Ghaza», le président américain, Donald Trump,  réaffirmait son soutien total à la guerre génocidaire menée par le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, contre la population de Ghaza, mais aussi à sa politique d’expulsion des Ghazaouis de l’enclave,  présentée d’ailleurs comme un «bien immobilier incroyable et important». 

C’était lors d’une conférence de presse animée dans la journée de lundi dernier à la Maison-Blanche, après s’être entretenu avec son invité,  venu négocier l’annulation de la taxe douanière (17%) imposée aux exportations israéliennes vers les Etats-Unis. Mais contre toute attente, Netanyahu n’a rien obtenu, à l’exception de l’appui à sa guerre et à sa décision de déporter les habitants de l’enclave vers d’autres pays. Visiblement déçu par les positions de Trump sur les négociations directes avec l’Iran, sa relation avec le président turc, Receb Tayyip Erdogan, qu’il a encensé avec des éloges, et son refus d’annuler les taxes douanières du fait qu'Israël «recevait beaucoup d’argent, 4 milliards de dollars par an»,  Netanyahu a écourté sa visite à Washington. Lors de la conférence de presse, Trump a déclaré, à propos de la situation à Ghaza, qu’il souhaitait que «la guerre s’arrête» en précisant qu’«elle finira par s’arrêter», mais  «pas dans un avenir lointain». 

Le seul problème pour Trump,  c’est qu’«actuellement, nous avons un problème avec les otages que nous essayons de faire sortir». Il a précisé avoir «sorti déjà un certain nombre (…) C’est un long processus. Cela ne devrait pas être si long», a-t-il ajouté. A deux questions pièges  d’un journaliste, il répond : «L’armée a repris les combats à Ghaza, et moi-même je risque d’être appelé à servir dans un mois sous les drapeaux, pensez-vous que c’est la manière efficace pour faire pression sur le Hamas et parvenir à un accord ? Pensez-vous que bloquer l’aide humanitaire soit une tactique de pression efficace ?» Trump n’a pas donné de réponses directes.

 Cependant, il  a éclairé les médias sur ce qu’il projette de faire de l’enclave, une fois ses habitants expulsés. «Vous savez ce que je pense de Ghaza. Je pense que c’est un territoire incroyablement important. Et je pense que nous y participerions, mais avoir une force de paix comme les Etats-Unis sur place, contrôlant et possédant la bande de Ghaza, serait une bonne chose. 

Car pour l’instant, depuis des années, je n’entends parler que de tueries, du Hamas et de problèmes», a-t-il déclaré. Mieux encore. Trump a expliqué : «Si vous prenez les Palestiniens et les transférez dans différents pays, et vous avez beaucoup de pays qui le feront, vous aurez une véritable zone de liberté. Vous appelez la zone de liberté, une zone libre, une zone où les gens ne se font pas tuer tous les jours. C’est un endroit infernal. Vous savez comment je l’appelle ? Un endroit formidable où personne ne veut vivre, parce que vraiment, ce n’est pas le cas. Et quand ils ont une vie agréable, une vraie vie, là où le Hamas et tous ses problèmes… le taux de mortalité à Ghaza est tout simplement incroyable. Et je l’ai dit». Le président américain a dit ne pas comprendre «pourquoi Israël a renoncé à tout ça. Israël en était propriétaire. 

Ce n’était pas cet homme (NDLR : Netanyahu), donc je peux le dire. Il ne l’aurait pas cédée. Je le connais assez bien. C’est impossible. Ils ont pris des propriétés en bord de mer et les ont données aux gens pour la paix. Comment ça a fonctionné ? Pas bien». La question sur «l’immigration»  à Ghaza a fait sursauter Donald Trump : «De quelle immigration ?» a-t-il demandé au journaliste, qui lui a déclaré calmement «de Ghaza». Irrité de se voir ainsi acculé, Trump a rétorqué : «C’est juste un concept que j’ai eu, que je trouve bon, et maintenant les gens le copient. Bibi (Netanyahu), tu veux dire… Les gens parlent du plan Trump, dis donc, pourquoi ne pas le faire ? Pourrais-tu répondre à cette question ? »

Un peu surpris, Netanyahu  a tenté d’expliquer aux journalistes les intentions du président américain. «Je pense que le Président a d’abord parlé de donner le choix aux gens. Les Ghazaouis étaient confinés. Partout ailleurs, y compris sur les champs de bataille, que ce soit en Ukraine, en Syrie ou ailleurs, les gens pouvaient partir. Ghaza était le seul endroit où ils les enfermaient. Nous ne les avons pas enfermés. Ils sont enfermés. Et quel mal y a-t-il à laisser le choix aux gens ? » a-t-il déclaré, avant de lever  une partie du voile qui entourait sa discussion avec Trump, quelques heures auparavant,  autour de l’expulsion des Ghazaouis. «Nous avons discuté, notamment au déjeuner, de certains pays, je ne veux pas entrer dans les détails maintenant, qui disent : si les Ghazaouis veulent partir, nous voulons les accueillir. Et je pense que c’est la bonne chose à faire. Il faudra des années pour reconstruire Ghaza. En attendant, les gens peuvent avoir une option. Le président a une vision. Les pays réagissent à cette vision. Nous y travaillons. J’espère que nous aurons de bonnes nouvelles pour vous», a-t-il dit, avant que Trump ne reprenne la parole : «Excusez-moi. Les gens adorent vraiment cette vision. C’est une vision à long terme, mais il est primordial que ce soit un terrain sûr, car vous êtes en plein Moyen-Orient, juste à côté d’Israël, et cet endroit n’aurait jamais dû être cédé.»

«Il n’y a rien de volontaire… »

Pour Trump, «Israël n’aurait pas dû céder» Ghaza. «Je ne comprends pas pourquoi ils ont fait ça. Je sais pourquoi, car on leur avait promis la paix, mais ça n’a pas fonctionné, car c’est l’un des territoires les plus dangereux au monde. Ghaza est l’un des endroits les plus dangereux au monde. Ils l’ont donc cédée par bonne volonté, et ça n’a pas fonctionné. Beaucoup de gens apprécient mon concept, mais vous savez, il y en a d’autres que j’apprécie aussi, et d’autres que je n’aime pas. Vous savez ce que je n’aime pas ? La situation actuelle, car Ghaza est un piège mortel.» Interrogé sur la libération des otages, Netanyahu a affirmé : «Steve Witkoff, le représentant très compétent du président Trump, nous a aidés à conclure un accord qui a permis la sortie de 25 personnes. Nous travaillons actuellement sur un autre accord qui, nous l’espérons, sera un succès. Nous sommes déterminés à libérer tous les otages, mais aussi à éliminer le Hamas à Ghaza et à permettre aux habitants de Ghaza de choisir librement d’aller où ils le souhaitent. Ils devraient avoir ce choix.» 

Et de souligner : «Le Président (Trump) a présenté une vision, une vision audacieuse, dont nous avons également discuté, y compris les pays qui pourraient être disposés et qui sont disposés à accepter les Palestiniens de leur libre choix s’ils choisissent d’y aller.» Trump est revenu sur les otages en affirmant : «Nous faisons tout notre possible pour libérer les otages. Nous envisageons un autre cessez-le-feu. Nous verrons bien. Mais nous voulons libérer les otages. Le peuple israélien veut les libérer. Plus que tout, il veut les libérer. Cet homme (Netanyahu)  travaille très dur avec nous pour y parvenir. Enfin, je ne sais pas, j’espère qu’il est apprécié, car c’est un excellent leader. Il travaille très, très dur sur les otages et bien d’autres choses. Et il y a beaucoup de choses sur lesquelles il faut travailler. C’est un endroit difficile.» La première réaction aux déclarations des deux dirigeants israélien et américain, sur Ghaza a été celle du sénateur démocrate américain Chris Van Hollen, qui a déclaré que «le plan entraînerait le déplacement forcé» de près de deux millions de personnes. 

Selon lui, «il n’y a rien de volontaire dans les propos de Trump et Netanyahu sur leur projet de chasser les Palestiniens de Ghaza. Leur plan entraînerait le déplacement forcé de près de deux millions de personnes de Ghaza. Les contribuables américains ne devraient rien avoir à faire avec le plan Trump-Netanyahu». Et pendant que Trump et Netanyahu tentaient de convaincre les journalistes de leur projet d’expulsion des Palestiniens de leur terre, et de leur  crime de guerre puni par le droit international, l’Onu, par la voix de certains de ses hauts responsables, exhortait les dirigeants du monde «à prendre des mesures urgentes pour sauver les Palestiniens de Ghaza».  

Lors d’une conférence de presse au siège de l’Onu à New York, Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général des Nations unies, a rappelé,  dans la soirée de lundi dernier, le contenu de la déclaration commune de hauts responsables de l’ONU, dont le directeur exécutif de l’Organisation mondiale de la santé, le secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, le directeur exécutif de l’Unicef, le Commissaire de l’Unrwa (agence onusienne pour les réfugiés palestiniens au Moyen-Orient) et le directeur exécutif du  Programme alimentaire mondial, qui alerte sur la situation humanitaire extrêmement grave à Ghaza. 

«Depuis plus d'un mois, aucune aide commerciale ou humanitaire n'est entrée à Ghaza. Plus de 2,1 millions de personnes sont à nouveau prises au piège, bombardées et affamées, tandis que la nourriture, les médicaments, le carburant et les abris s’accumulent aux points de passage et que des équipements vitaux sont bloqués», ont écrit les responsables onusiens, qui ont révélé que «plus d’un millier d’enfants  ont été tués ou blessés au cours de la première semaine après l’effondrement du cessez-le-feu, soit le bilan hebdomadaire le plus élevé parmi les enfants de Ghaza depuis l’année dernière». Salima Tlemçani
 

 

Un projet d’accord de cessez-le-feu discuté au Caire

Des médias qataris et saoudiens ont annoncé qu’un nouveau projet d’accord de cessez-le-feu de 70 jours, à Ghaza,  a été élaboré par l’Egypte et devrait être présenté aux parties par les médiateurs, lundi prochain, lors d’une réunion au Caire. Selon les mêmes sources, ce projet porte la libération de 9 otages vivants et la restitution de trois autres, décédés, en contrepartie de la libération de 2500 détenus et prisonniers palestiniens, dont 150 condamnés à une peine à perpétuité et l’autorisation d’entrée de l’aide humanitaire et du carburant.  S. T

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