Une frappe à Ghaza-ville a tué cinq autres personnes, alors que des civils demeurent encore ensevelis sous les décombres.
La matinée d’hier a été marquée par une nouvelle scène d’horreur dans le nord de la bande de Ghaza. Il était 6h du matin à Jabaliya, lorsqu’une maison abritant des déplacés a été réduite en amas de débris et de poussière par l’armée d’occupation israélienne, entraînant la mort d'au moins 32 personnes, parmi lesquelles des familles entières – parents, enfants, petits-enfants – anéanties en un instant.
«Ce matin, vers 6h, il y a eu une énorme explosion. Quand nous sommes arrivés ici, nous avons trouvé des corps déchiquetés ! Nous voulons la sécurité et la paix», témoigne à l’AFP Abdallah Najjar, un proche de la famille Allouche, l’une des nombreuses familles endeuillées.
Selon des témoins interrogés par la chaîne Al Jazeera, la maison visée à Jabaliya était occupée par des femmes et des enfants, originaires de diverses localités du nord de Ghaza. Contraints d’abandonner leur domicile, ils avaient cherché refuge dans cette bâtisse, pour finalement y trouver la mort.
En parallèle, une frappe à Ghaza-ville a tué cinq autres personnes, alors que des civils demeurent encore ensevelis sous les décombres. En tout et pour tout, au moins 51 Palestiniens sont tombés en martyrs et 164 autres ont été blessés en 24 heures (entre samedi et dimanche).
Toutes les tentatives hier d’extraire d’autres corps sont restées vaines, d’autant que les équipes de secours n’osent plus s’aventurer dans les zones dangereuses, car les drones israéliens créent un climat d’intimidation et ces missions de sauvetage sont entravées par des menaces d'arrestation et de violence. Ces frappes ne sont qu’un épisode d’une guerre barbare et dévastatrice menée par Israël depuis 400 jours et où les civils, déjà déplacés plusieurs fois à cause des bombardements continus, se retrouvent pris au piège.
Les hôpitaux sont au bord du gouffre. Le Dr Hussam Abu Safia, directeur de l’hôpital Kamal Adwan, a lancé hier un nouveau cri d’alarme, précisant que les patients, les nouveau-nés et les blessés sont en danger de mort imminent. «Nous observons des cas alarmants de malnutrition chez les enfants et les adultes, et nous peinons à offrir ne serait-ce qu’un repas par jour aux travailleurs de l’hôpital, en pleine pénurie de nourriture et de médicaments», a-t-il déclaré. Les infrastructures hospitalières, ciblées directement ou mises sous pression extrême, n’ont plus les ressources nécessaires pour prendre en charge les blessés.
Les cas qui nécessitent une attention spécialisée, a souligné le médecin, ne peuvent plus être traités, ce qui se traduit par des pertes humaines, qui auraient pu être évitées, jour après jour. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) tire également la sonnette d’alarme, évoquant un risque de famine aigu dans cette zone privée d’approvisionnement depuis des semaines.
L'UNRWA, organisme de secours des Nations unies, indique également que les populations n’ont plus accès aux ressources vitales.
Le constat est également partagé par l’Unicef, qui a décrit Ghaza comme un «enfer sur terre» pour le million d’enfants y résidant, en proie à des conditions de vie insoutenables. Le Programme alimentaire mondial (PAM) et d’autres agences des Nations unies alertent sur la famine imminente qui pourrait frapper la région dans les jours à venir.
En octobre, le nombre de camions d’aide autorisés à entrer dans Ghaza a été drastiquement réduit, passant de 500 à moins de 50 par jour. Cette diminution contraste avec les besoins urgents et croissants d’une population déjà accablée. La communauté internationale reste spectatrice, tandis que la vie se meurt dans ce nord de Ghaza.
«La situation est extrêmement grave et continue de se détériorer», affirme Mahmoud Alsaqqa, responsable de la sécurité alimentaire pour Oxfam à Ghaza. Les camps improvisés, souvent installés dans des zones supposées sûres, sont également devenus des cibles. C’est le cas des abris de fortune dressés dans l’enceinte de l’hôpital El Aqsa à Deir El Balah, touchés par une frappe qui a fait des victimes parmi les personnes déplacées.
Les négociations dans l’impasse
Alors que les négociations pour un cessez-le-feu s’enlisent, le Qatar, acteur clé de la diplomatie dans la région, a suspendu sa médiation, déplorant le manque de sérieux des parties engagées. Cette décision de Doha pourrait peser lourdement sur la recherche de solutions pour la paix, alors que la guerre s’intensifie.
«Les autorités qataries se retrouvent dans une position de plus en plus complexe», analyse Tamer Qarmout, professeur associé à l’Institut de Doha. Selon lui, cette suspension ne marque pas la fin des efforts diplomatiques, mais vise à pousser les belligérants à une véritable prise de responsabilité. Majed Al Ansari, porte-parole des Affaires étrangères du Qatar, a ainsi souligné que Doha ne reprendra ses efforts de médiation que lorsque les parties feront preuve d’une volonté manifeste d’aboutir à une trêve durable.
Cette interruption temporaire du Qatar laisse planer une incertitude sur l’évolution de la guerre et l’avenir de Ghaza. Certains observateurs, dont le Washington Post, soulignent que la perspective d’un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche pourrait peser sur la stratégie diplomatique de Doha. Le quotidien américain rappelle les tensions de 2017, où l’administration Trump avait tenté d’isoler le Qatar, l’accusant de financer des activités terroristes.
D’après des sources citées par le journal israélien le Jerusalem Post, Doha pourrait craindre d’être tenu pour responsable si les pourparlers échouent alors que le second mandat Trump se prépare. Parallèlement, des rumeurs circulent selon lesquelles le Qatar aurait demandé aux dirigeants politiques du Hamas de quitter le pays. Bien que le ministère des Affaires étrangères qatari ait fermement démenti cette information, précisant que le bureau du Hamas à Doha sert avant tout de canal de communication, les spéculations sur un éventuel durcissement de la position qatarie persistent.
La BBC relève des signes d’un changement dans les relations entre Doha et le Hamas, illustrés par le fait que l’organisation palestinienne a tenu pendant seulement deux heures une tente de deuil à Doha après l’assassinat de Yahia Sinwar, ce qui contraste fortement avec les trois jours de deuils organisés pour le chef du Hamas, Ismail Haniyeh, qui se sont déroulés sous la surveillance et la sécurité officielles du Qatar.
43 603 martyrs et 102 929 blessés
Le ministère palestinien de la Santé a annoncé hier que le nombre de Palestiniens tombés en martyrs à Ghaza, en proie à une agression sioniste depuis le 7 octobre 2023, s'est alourdi à 43 603 et celui des blessés à 102 929. La même source a noté que 51 Palestiniens sont tombés en martyrs et 164 autres ont été blessés au cours des dernières 24 heures. Un précédent bilan faisait état de 43 552 martyrs et 102 765 blessés.
Les autorités palestiniennes de la santé ont indiqué qu'un certain nombre de victimes palestiniennes se trouvaient encore sous les décombres et sur les routes, et que les forces de l'occupation empêchaient les ambulances et les équipes de la Défense civile de leur porter secours. Depuis le 7 octobre 2023, l'armée sioniste mène une agression sauvage contre l'enclave palestinienne qui a entraîné des destructions massives d'infrastructures, en plus d'une catastrophe humanitaire sans précédent.