Les pourparlers autour d’un accord de cessez-le-feu tirent à leur fin alors que les présidents américains, Joe Biden, en fin de mandat, Donald Trump, son successeur, ainsi que le ministre des Affaires étrangères qatari évoquent un cessez-le-feu imminent, après la validation de l’accord, par le mouvement de résistance Hamas.
Après avoir envoyé, à Israël et au Hamas, le projet d’accord pour un cessez-le-feu à Ghaza en contrepartie de la libération des otages israéliens et des détenus palestiniens, le Qatar, un des trois médiateurs avec l’Egypte et les Etats-Unis, a reçu, hier matin, la réponse positive de la partie palestinienne et était jusqu’en fin d’après-midi en attente de celle de l’Etat hébreu, dont le porte-parole du gouvernement a déclaré qu’Israël «est prêt à payer le prix même élevé pour faire revenir les otages», avant de révéler que l’accord «n’est pas encore scellé».
Dans un communiqué, le Hamas a confirmé que «les pourparlers autour du cessez-le feu à Ghaza ont atteint leur phase finale et exprimé l’espoir que ce cycle de négociations se termine par un accord clair et global». Le Hamas a affirmé en outre avoir mené une série de consultations et de contacts avec «les dirigeants des factions palestiniennes pour les mettre en mesure de progresser dans les négociations (…).
Ils ont confirmé leur satisfaction quant au déroulement des négociations et souligné la nécessité de se préparer pour la prochaine étape et la poursuite de la communication et de la consultation jusqu’à la conclusion de l’accord qui a atteint ses étapes finales». Un optimisme exprimé aussi par le porte-parole du ministère des Affaires étrangères qatari, Majid Al Ansari, lors d’une conférence de presse à Doha, en début d’après-midi, largement médiatisée. Le responsable a déclaré que les négociations en cours pour un cessez-le-feu à Ghaza «étaient fructueuses et positives et atteint leurs dernières étapes.
Nous sommes optimistes car les principales questions en suspens, qui entravaient auparavant l’accord, ont été supprimées». Le porte-parole du chef de la diplomatie qatarie a confirmé, par ailleurs, que les projets d’accord de cessez-le-feu «avaient été remis» au Hamas et à Israël, en précisant toutefois que «les discussions étaient toujours en cours concernant les derniers détails de l’accord (…) nous attendons les mises à jour (…) nous appelons les deux parties à réaliser l’accord et mettre fin ainsi à la tragédie de Ghaza (…)
Nous sommes aujourd’hui au point le plus proche d’un accord, nous espérons qu’il soit annoncé et que commence le début de l’exécution du cessez-le-feu». Dans une déclaration à l’agence de presse américaine AP (Associated Press), sous le couvert de l’anonymat, «trois responsables impliqués dans les négociations ont exprimé un optimisme quant à la possibilité de conclure un accord avant l’investiture du président Trump, le 20 janvier», dont l’envoyé au Moyen-Orient a rejoint les pourparlers.
Cet accord porte sur trois phases et son contenu ne diffère pas beaucoup de celui présenté en mai 2024, par le président Joe Biden, entériné par le Conseil de sécurité mais rejeté par Israël, en juillet 2024, après s’être opposé à son retrait du corridor Netzarim, qui relie le centre de Ghaza au nord et au sud de l’enclave. L’accord prévoit dans une première étape la libération progressive de 33 otages sur une période de six semaines, dont des femmes, des enfants, des personnes âgées et des civils blessés, en échange de la libération par Israël de centaines de femmes et d’enfants palestiniens détenus dans les prisons israéliennes.
Israël se retire du corridor Netzarim et garde le contrôle de Philadelphie
Parmi ces 33 prisonniers, cinq femmes soldats israéliennes seront libérées, selon AP, en échange de 50 prisonniers palestiniens, parmi lesquels 30 purgent de lourdes peines, allant jusqu’à la perpétuité. Dans le cadre de cet accord, l’armée israélienne ne retirera pas toutes ses troupes de Ghaza tant que tous les otages n’auront pas été libérés. Elle procédera à un retrait progressif vers l’est de l’enclave et vers le périmètre frontalier pour assurer la protection de ses colonies.
En réalité, Israël a fini par accepter de se retirer du corridor de Netzarim, mais gardera sous son contrôle l’axe Philadelphie, qui relie Ghaza à la frontière avec l’Egypte, où il compte imposer des mesures de contrôle et de sécurité, tout en libérant certaines zones seulement du couloir, après les premiers jours de l’accord. Les Palestiniens du nord de Ghaza seront, alors, autorisés à retourner dans leurs maisons, mais avec la certitude qu’ils ne détiennent aucune arme.
Ils auront la liberté de circuler sans aucune entrave, après un contrôle, qui se fera par des moyens techniques et l’armée israélienne se retirera complètement du corridor Netzarim, dans le centre de Ghaza. Le passage de Rafah, entre l’Egypte et Ghaza, commencera à fonctionner progressivement, pour permettre le transfert des malades et des cas humanitaires hors de l’enclave pour y être soignés. Pendant cette étape, il y aura une hausse significative de l’entrée de l’aide humanitaire dans l’enclave, avec une cadence de 600 camions par jours, dont 300 destinés au Nord.
C’est durant cette première phase et si tout se passe bien, que les négociations autour de la 2e étape devront commencer. Selon l’agence américaine, «les détails restent difficiles à régler – et l’accord ne comprend aucune garantie écrite que le cessez-le-feu se poursuivra jusqu’à ce qu’un accord soit conclu. Cela laisse la possibilité à Israël de reprendre sa campagne militaire après la fin de la première phase».
Mais, a ajouté le même média, en reprenant un responsable égyptien, «les trois médiateurs, l’Egypte, le Qatar et les USA, ont donné à Hamas des garanties verbales que les négociations se poursuivront comme prévu et qu’ils feront pression pour un accord devant mettre en œuvre les deuxième et troisième phases avant la fin de la première». Pour la deuxième étape de l’accord, «le Hamas libérerait les derniers otages encore en vie, principalement des soldats de sexe masculin, en échange de davantage de prisonniers et du retrait total de l’armée israélienne de Ghaza» a écrit AP.
La colère des familles des otages et les menaces des ministres messianiques
Cependant, le Hamas a déjà déclaré qu’il ne libérerait pas les otages restants sans la fin de la guerre et un retrait complet des forces israéliennes, et Netanyahu a de tout temps promis de reprendre les combats au moindre incident. Ce qui laisse des doutes quant à la réussite de cette étape qui s’annonce très difficile, même si les deux administrations américaines sortante et nouvellement élue, exercent des pressions énormes sur Israël et le Hamas, pour arriver à un accord global.
A ce titre, il est important de rappeler que Steve Witkoff, l’envoyé de Donald Trump, au Moyen-Orient, a même rejoint les médiateurs américains, égyptiens et qataris à Doha, pour presser la conclusion d’un accord. Des informations fuitées par la presse israélienne ont fait état de «discussions téléphoniques houleuses» entre Netanyahu et Witkoff, durant la nuit de lundi à mardi derniers. Hier matin, le président Trump n’a pas hésité à parler d’«un proche cessez-le-feu», aux médias américains. «Je comprends...
Il y a eu une poignée de main et ils sont en train de terminer le travail, et peut-être d’ici la fin de la semaine», a-t-il déclaré à la chaîne de télévision américaine, Newsmax. Des propos largement repris par la presse internationale. Jusqu’en fin de journée d’hier, le gouvernement israélien n’avait toujours pas donné sa réponse. La réunion regroupant le Premier ministre avec les responsables des services de sécurité, de renseignement et de l’armée autour de l’accord.
Cette réunion se tenait sur un fond de grave crise à l’intérieur du gouvernement provoquée par une dizaine de ministres messianiques de l’extrême droite, qui s’opposent fermement à l’accord, notamment le ministre de la Sécurité, Itamar BenGvir et celui des Finance, Bzalel Smotrich, qui avaient menacé de démissionner et de mettre en péril la cohésion de la majorité gouvernementale.
Mais avant, Netanyahu avait rencontré les familles des otages, qui le pressaient de signer un accord. Les représentants des familles ont reproché à Netanyahu «d’avoir opté pour un cadre par étape et rejeté un accord global pour la libération de tous les otages, en échange d’une fin définitive de la guerre, arguant que cela permettrait au Hamas de rester au pouvoir».
Certains membres des familles ont déclaré à la presse israélienne, après la réunion «que Netanyahu ne devrait pas accepter d’attendre le 16e jour pour entamer des négociations sur les termes de la deuxième phase, arguant que ces pourparlers devraient commencer immédiatement afin de libérer tous les otages et finir la guerre ».
Selon les médias hébreux, la première réunion au bureau du Premier ministre a duré 45 minutes, et Netanyahu a déclaré aux familles que «les pourparlers avançaient et qu’il faisait tout ce qu’il pouvait pour obtenir la libération des 98 otages». Ils ont précisé que le Premier ministre a déclaré que l’accord «permettrait à Israël de rester dans la première phase du corridor de Philadelphie ainsi que dans une zone tampon le long de la frontière entre Israël et Ghaza». S. T.