Après la découverte des corps des 15 humanitaires exécutés à Rafah : Israël au banc des accusés devant le Conseil de sécurité

05/04/2025 mis à jour: 04:01
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L’écrasante majorité des intervenants devant le Conseil de sécurité, réuni en urgence, jeudi dernier, à l’appel de l’Algérie, après la découverte macabre des corps des 15 humanitaires exécutés par l’armée israélienne et enterrés dans une fosse commune à Rafah, au sud de Ghaza, était unanime à accuser l’Etat hébreu de «crimes d’atrocité».

Le haut responsable onusien aux droits de l’homme, Volker Türk, n’est pas allé avec le dos de la cuillère en parlant des «crimes d’atrocité actuellement commis» à Ghaza, où «1200 Palestiniens ont été tués en un mois». C’était jeudi dernier, lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’Onu, ténue en urgence après la découverte macabre des corps de 15 humanitaires exécutés par l’armée israélienne et enterrés dans une fosse commune, et à laquelle l’Algérie a appelée en tant que membre non permanent de cette haute instance onusienne «parce qu’elle croit fermement que le Conseil doit s’exprimer avec clarté», a déclaré son représentant, l’ambassadeur Amar Bendjama, ajoutant : «Ce qui se passe à Ghaza est une punition collective et un crime de guerre. Aucune force ne pourra déraciner le peuple palestinien de sa terre.» Pour le diplomate algérien, «le Conseil doit assumer pleinement ses responsabilités et garantir l’application de ses décisions.

L’échec de cette approche entraînera la perte de toute légitimité restante. Le peuple de Ghaza fait face à des souffrances inimaginables. La puissance occupante est responsable de la transformation de Ghaza en un conflit le plus meurtrier pour les travailleurs humanitaires, avec plus de 400 tués, et le plus sanglant pour les journalistes, avec 209 d’entre eux assassinés».

Allant dans le même sens, le haut commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a entamé sa déclaration en disant : «C’est avec douleur que je dois à nouveau informer ce Conseil des souffrances catastrophiques de la population de Ghaza. Le soulagement temporaire du cessez-le-feu, qui donnait aux Palestiniens un moment pour respirer, a été brisé.

Depuis le 1er mars, les opérations militaires israéliennes ont tué plus de 1200 Palestiniens, dont au moins 320 enfants, selon le ministère de la Santé à Ghaza.» Et d’exprimer sa consternation pour «les récents meurtres de 15 membres du personnel médical et humanitaire, qui, a-t-il précisé, suscitent de nouvelles inquiétudes quant aux crimes de guerre commis par l’armée israélienne». Le responsable onusien a exigé qu’«une enquête indépendante, rapide et approfondie» soit menée sur «ces meurtres» et que «les responsables de toute violation du droit international rendent des comptes».

 

     (Amar Bendjama, représentant permanent de l’Algérie auprès des Nations unies - Photo : D. R)

 

 

«Le blocus et le siège de Ghaza constituent une punition collective»

Pour lui, «l’armée israélienne continue de frapper les camps de personnes déplacées à de nombreuses reprises, qui n’ont nulle part où aller en toute sécurité (…)» et «de contraindre les civils à se déplacer. La moitié de Ghaza est désormais soumise à des ordres d’évacuation obligatoires ou a été déclarée zone interdite. Ces ordres sont contraires aux exigences du droit international humanitaire». Volker Türk a qualifié le blocus et le siège imposés depuis un mois à Ghaza de «punition collective» et affirmé qu’ils «peuvent également s’apparenter à l’utilisation de la famine comme méthode de guerre».

Il a rappelé la fermeture depuis, le 1er avril par le Programme alimentaire mondial (PAM), «de 25 de ses boulangeries à Ghaza, privant de nombreuses familles d’accès au pain», mais aussi «les tensions communautaires liées aux pénuries alimentaires et les rapports faisant état d’un recours excessif à la force par la police locale», avant de constater «un retour à la dégradation de l’ordre social qui avait précédé le cessez-le-feu».

Volker Türk s’est dit «alarmé par la rhétorique incendiaire de hauts responsables israéliens concernant la saisie, l’annexion et le partage de territoires, ainsi que le transfert de Palestiniens hors de Ghaza». Selon lui, «cela suscite de graves inquiétudes quant à la commission de crimes internationaux et va à l’encontre du principe fondamental du droit international interdisant l’acquisition de territoires par la force».

Le responsable onusien a relevé «la situation extrêmement grave» en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, où les «opérations militaires dans le Nord ont tué des centaines de personnes, détruit des camps de réfugiés et des centres médicaux de fortune, et déplacé plus de 40 000 Palestiniens», en soulignant que «l’annonce selon laquelle les habitants ne pourront pas rentrer chez eux avant un an suscite de vives inquiétudes quant à des déplacements massifs à long terme».

Selon lui, depuis 7 octobre 2023, son Bureau «a vérifié que la violence de l’Etat et des colons a tué 909 Palestiniens en Cisjordanie, dont 191 enfants et 5 personnes handicapées, dont certains pourraient constituer des exécutions extrajudiciaires et d’autres exécutions illégales.

Au cours de la même période, 51 Israéliens, dont 15 femmes et 4 enfants, ont été tués dans des attaques ou des affrontements armés palestiniens, 33 en Cisjordanie et 18 en Israël». Pour Volker Türk, «l’expansion illégale des colonies se poursuit sans relâche alors que certains ministres israéliens prônent la souveraineté israélienne sur le territoire occupé. Des dizaines de communautés palestiniennes d’éleveurs et d’agriculteurs ont été contraintes de quitter leurs maisons et leurs terres ancestrales, tandis que les restrictions de mouvement paralysent l’économie et détruisent le tissu social».

Le responsable a par ailleurs parlé des centaines de détenus palestiniens qui ont été libérés pendant le cessez-le-feu et des centaines d’autres personnes arrêtées et détenues. «En Israël, la répression sévère de l’espace civique, notamment contre les organisations défendant les droits humains des Palestiniens, est également alarmante», a-t-il affirmé. Selon lui, «rien ne peut justifier les horribles attaques commises contre les communautés israéliennes le 7 octobre 2023. Et rien ne peut justifier la punition collective du peuple palestinien».

Il a appelé au «rétablissement immédiat du cessez-le-feu et à un accès humanitaire sans entrave dans toute la bande de Ghaza», mis en garde contre «une fois de plus le risque élevé et croissant que des atrocités criminelles soient commises dans le territoire palestinien occupé» et exhorté «tous ceux qui ont de l’influence à assurer la protection des civils en tant que priorité absolue» en disant : «Il est essentiel que toutes les violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme soient pleinement prises en compte.» Volker Türk a noté par ailleurs que «tous les otages doivent être libérés immédiatement et sans condition. Toutes les personnes détenues arbitrairement doivent également être libérées. Israël doit s’abstenir de tout acte équivalant à un transfert forcé de la population de Ghaza».

 

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