«Algérie, sections armes spéciales» : Une enquête sur la guerre chimique menée par la France

03/03/2025 mis à jour: 00:20
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C’est un pan de l’histoire que la France aurait préféré laisser enfoui sous des tonnes d’archives classées. Le documentaire Algérie, sections armes spéciales sera diffusé le 16 mars à 23h sur la chaîne télévisée France 5, et devra jeter la lumière  sur un sujet aussi explosif que méconnu : l’usage d’armes chimiques par l’armée française pendant la guerre d’Algérie.  

Claire Billet, réalisatrice et journaliste, s’est plongée dans un silence d’Etat. Avec l’historien Christophe Lafaye, elle a suivi la piste de ces armes interdites, utilisées pour traquer et éliminer les moudjahidine du FLN retranchés dans les grottes. 

Des documents, des témoignages de Français et Algériens, des recherches poussées malgré les portes closes : tout converge vers cette réalité : oui, l’armée française a gazé. Oui, ces pratiques ont été méthodiquement mises en œuvre. Et non, personne ne voulait en parler. Dans ce film et selon le communiqué de presse, Claire Billet dévoile l’ampleur et le contexte de ces opérations à travers des documents d’archives et des interviews d’experts en armes nucléaires, biologiques et chimiques. L’enquête révèle que ces armes ont été testées, ordonnées et utilisées à grande échelle, en dépit des lois et des conventions internationales. 

«Ce film a pu exister, d’une guerre à une autre. L’historien Christophe Lafaye et moi avons en commun l’expérience de l’Afghanistan. En 2020, lorsque j’ai voulu travailler sur la mémoire de la guerre d’Algérie, je l’ai spontanément appelé. Il faisait des recherches inédites sur l’usage des armes chimiques par l’armée française durant la guerre d’Algérie. En particulier dans les grottes et lieux souterrains. J’étais incrédule. Ça semblait fou qu’un tel pan de notre histoire soit inconnu, soixante ans plus tard. En existait-il des traces ?», raconte la réalisatrice.

La réalisatrice raconte son parcours semé d’embûches pour retrouver des traces de ces événements. Peu de documents officiels subsistent, et les archives militaires restent largement inaccessibles. Pourtant, grâce aux témoignages vivants  et aux archives nationales d’Outre-Mer, le film parvient à reconstituer la réalité de cette guerre chimique et à mettre en lumière les silences qui l’entourent.

Les attaques chimiques restent présentes

Son enquête l’a conduite à explorer la Kabylie et les Aurès, des zones où les traces de ces attaques chimiques restent présentes dans la mémoire des populations locales. En parallèle, elle confronte ces récits aux archives françaises, offrant une démonstration par la preuve de l’ampleur du phénomène.
«Dans ce film, je tenais appuyer les dires des Algériens et des Français et faire une démonstration par la preuve. 

Il fallait donner à voir les archives militaires. Nos demandes de tournage à ce sujet au Service historique de la Défense ont été refusées. Mais les archives nationales d’Outre-Mer ont accepté notre tournage. Et l’historien Christophe Lafaye nous a présenté le résultat de ses années de recherches et de bataille juridique pour obtenir la consultation de quelques documents administratifs militaires», dit encore la réalisatrice.

Claire Billet, journaliste et réalisatrice, s’intéresse depuis plus d’une décennie aux conflits et à leurs conséquences à long terme. Son œuvre explore les thèmes de la mémoire, des injustices et de l’exil. Ce que le documentaire met en évidence, ce n’est pas seulement l’usage de ces armes interdites, mais aussi l’ampleur du mensonge d’Etat qui les a accompagnées.  

Avec Algérie, sections armes spéciales, elle pose une question essentielle : comment un pan entier de l’histoire coloniale française a-t-il pu rester dans l’ombre pendant plus de soixante ans ?

 

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