Trump, entre morale et politique…

02/04/2023 mis à jour: 06:56
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Depuis le début de ce millénaire, qui s'annonçait novateur et prometteur, après les péripéties guère enchantantes des systèmes qui avaient prévalu avant la chute du mur de Berlin, les oligarchies capitalistes, transcontinentales, se sont emparées du monde, y compris les nouveaux riches communistes reconvertis.

La mondialisation impose alors la fusion progressive des économies nationales, dans un marché capitaliste mondial et un cyber-espace unifié.

Ce qui a donné lieu à une abondance de biens, catapultant le produit mondial brut et le volume du commerce mondial à un niveau jamais égalé. Mais ces richesses n'arrivent pas toujours aux démunis, la plupart soumis aux guerres imposées, eux-mêmes en guerre, mais contre la faim, la soif, les épidémies et les conflits sus-cités, qui n'en finissent pas.

Cette situation de déséquilibre à son apogée a été la mieux incarnée par Trump, le fantasque président américain, fervent adepte de ce capitalisme qui accumule l'argent, mais qui a failli détruire l'Etat, si l'on se réfère à l'assaut de ses partisans contre le Capitole en signe de contestation des résultats de la dernière votation qui l'a écarté du pouvoir.

Aujourd'hui, alors qu'il s'apprêtait à tenter d'y revenir à travers les élections de l'année prochaine, il est épinglé par la justice américaine devant laquelle il doit comparaître, prochainement, pour répondre des chefs d'accusation concernant une liaison avec une actrice de films pornographiques, survenue en 2016, peu avant son élection.

Il a frauduleusement versé des pots-de-vin de l'ordre de 130 000 de dollars contre le silence de la femme par qui le scandale est arrivé ! Un grand jury de Manhattan a voté, jeudi 30 mars, l'inculpation. C'est la première fois qu'un ancien Président, ainsi qu'un candidat à l'élection présidentielle, fait l'objet de poursuites pénales.

L'opinion américaine, lassée par ses extravagances, peut-elle enfin se féliciter de cette annonce ? Car, pendant des décennies, Trump avait réussi à se dérober et échapper ainsi à toutes les tentatives pour l'inculper dans différentes affaires, au point de paraître, pratiquement, intouchable.

En décrétant, unilatéralement, narguant toutes les institutions internationales, Jérusalem capitale de l'Etat d'Israël. Cette posture avait fini par agacer. Dès son départ tumultueux de la Maison-Blanche, plusieurs enquêtes ont été ouvertes.

Emeutes du 6 janvier 2021 contre le Capitole et celle d'avoir conservé, illégalement, des documents classifiés, sans oublier sa tentative d'inverser les résultats de l'élection présidentielle en Georgie, où le procureur de ce pays a aussi ouvert une enquête à son encontre.

De nouveau, les Américains, ébranlés, par le séisme que son élection avait provoqué en 2016, se sont mis à s'interroger sur l'intrigante relation entre la morale et la politique. Surtout au sommet de la première puissance mondiale.

Si l'arrivée au pouvoir de Trump a été vécue comme une introspection par tous les Américains qu'il reflétait, en quelque sorte, comme dans un miroir.

Il a en revanche surpris en s'érigeant contre les élites et contre l'Etat, contre les inégalités sociales qui avaient explosé et contre le sentiment d'être considéré comme moins que rien dans une démocratie qui ne tient pas compte des faibles, en ne profitant qu'aux nantis.

Cette position populiste l'a en tout cas desservi, quand bien même il s'est appuyé sur les couches moyennes, toujours obnubilées par «le rêve américain».

D'un autre côté, depuis un siècle, aucun dirigeant américain n'a autant remis en cause le système politique américain que Trump, en mettant au pas le parti républicain qui le parraine tout en se définissant comme conservateur anti-progressiste.

Mais le paradoxe est qu'il a été, pendant son mandat, imprévisible à la fois contre les progressistes et contre les conservateurs, en sapant l'autorité morale et la légitimité des institutions, comme il l'a fait dans son attaque contre le FBI qui, au demeurant, ne voit pas d'un mauvais œil sa posture actuelle, largement abîmée par un cas d'adultère.

Sa comparution devant les juges est sans doute le premier écueil devant le parcours du combattant qui le mènerait à une deuxième investiture, dont il rêve.

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