Les négociateurs israéliens ne se sont pas rendus à Doha : L’avenir du cessez-le-feu dépend de la rencontre Trump-Netanyahu

03/02/2025 mis à jour: 21:54
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La libération des prisonniers palestiniens se poursuit dans un climat très tendu

Durant la journée de samedi dernier, rien ne présageait la décision surprise du Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, de ne pas envoyer la   délégation israélienne à Doha, pour prendre part, dès aujourd’hui, aux pourparlers  relatifs à la 2e phase de l’accord de cessez-le-feu à Ghaza, tel que convenu entre les deux parties, sous la supervision des médiateurs qataris, égyptiens et américains.  

Selon de nombreux journaux et sites israéliens, Netanyahu a subitement annulé une réunion, prévue samedi soir,  avec le chef du Mossad, David Barnea, le chef du Shin Bet, Ronen Bar, et d’autres négociateurs de haut rang et a chargé son secrétaire militaire «d’informer ces derniers de sa décision de ne pas envoyer d’équipe au Qatar pour l’instant».  

Pour les mêmes sources, Netanyahu «préfère ne prendre aucune mesure sur cette question avant sa rencontre avec le président américain Donald Trump mardi (demain, ndlr)». Un tel retard dans les négociations constitue, cependant, une violation des termes de l’accord qui prévoit qu’au «16e jour de l’entrée en vigueur du cessez-le-feu débuteront les pourparlers autour de la 2e phase».  

Dans un communiqué, le bureau de Netanyahu a expliqué que le Premier ministre «s’est entretenu avec l’envoyé du président Trump au Moyen-Orient, Steve Witkoff, et a convenu que les négociations sur la deuxième phase de l’échange de prisonniers commenceraient après leur rencontre à Washington lundi, où ils discuteront des positions israéliennes». 

Dans le même communiqué, il est précisé que «Witkoff s’entretiendrait cette semaine avec le Premier ministre et ministre des Affaires étrangères du Qatar, Cheikh Mohammed Ben Abdulrahman Al Thani, et de hauts responsables égyptiens, puis tiendrait des discussions avec Netanyahu sur les mesures nécessaires pour faire avancer les négociations, notamment la fixation de dates pour l’envoi de délégations à tenir les pourparlers». 

Mais l’annulation par Netanyahu du déplacement de la  délégation israélienne à Doha a provoqué la réaction du Qatar, un des trois médiateurs. 

Dans une déclaration rendue publique hier, le Premier ministre et ministre des Affaires étrangères qatari a indiqué que «les négociations de la phase 2 devraient commencer demain (NDLR : aujourd’hui) et nous avons commencé à parler avec les deux parties à cette fin. Nous sommes en contact avec l’administration Trump et espérons qu’il n’y aura pas de désaccord». Le Qatar a «exigé l’ouverture immédiate de la 2e  phase des négociations comme le stipule l’accord », ajoutant : «Nous sommes optimistes quant à la possibilité d’obtenir des résultats positifs devant  mettre fin à la guerre.» 

Et de souligner : «Nos partenaires internationaux doivent faire pression pour que les négociations sur Ghaza aboutissent et veiller à ce qu’elles ne soient pas entravées.» 

Selon le site israélien Walla, qui cite un «responsable israélien de haut rang», sans le nommer, cette évolution est un «signe très inquiétant» quant à la mise en œuvre de la 2e phase de l’accord, tout en exprimant «l’espoir que cela n’aura pas d’impact négatif sur la réalisation de la première phase en cours», d’une durée de 42 jours. 

«Retrait total»

Cette deuxième porte sur le retour de tous les otages israéliens encore vivants en échange de la libération d’un nombre encore à déterminer de prisonniers palestiniens pour des raisons de sécurité et le retrait total de l’armée d’occupation de Ghaza.  Se basant sur des confidences de responsables israéliens, sous le couvert de l’anonymat, le site américain Axios cite que «l’avenir de l’accord dépend désormais des résultats de la rencontre Trump-Netanyahu».  

La même source citée par le média électronique ajoute : «L’échec de la progression vers la deuxième phase de l’accord pourrait signifier que la guerre à Ghaza se poursuivra pendant une année supplémentaire.» Le site Walla a exprimé des craintes encore plus lourdes. «Les rapports indiquent de plus en plus que Netanyahu envisage sérieusement la possibilité de reprendre la guerre après la première phase, plutôt que de passer à la deuxième phase.» 

Ces informations renvoient à la déclaration de Netanyahu,  à travers laquelle il a affirmé qu’il  ne déciderait de la suite à donner à la réunion d’aujourd’hui à Doha «qu’une fois la première phase du cessez-le-feu achevée».  Bien plus, Netanyahu a refusé le «retrait total»  de Ghaza «tant que les capacités militaires et politiques du Hamas ne seraient pas éliminées», alors que le Hamas a averti qu’il «ne relâchera pas les derniers otages, tant qu’Israël n’aurait pas retiré toutes ses troupes du territoire». 

Fixée au 3 février, le retour aux pourparlers devaient permettre aux parties, par l’intermédiaire des médiateurs, de s’entendre sur la gouvernance de Ghaza, après la guerre, surtout après que le Hamas ait donné son accord pour se retirer de la direction, tout en maintenant son éventuelle participation à un futur gouvernement. 

Ce que l’Etat hébreu continue de rejeter. Si  les négociations arrivent à dépasser ces obstacles, les parties passeront à la troisième étape, durant laquelle les corps des otages restants seraient restitués en échange d’un plan de reconstruction de trois à cinq ans à Ghaza. 

Dans sa déclaration vidéo, diffusée sur les réseaux sociaux avant  d’embarquer à bord de l’avion Wing of Zion pour son vol vers la capitale américaine,  Netanyahu a déclaré : «Je me rends à Washington pour une réunion très importante avec le président Trump. 

Le fait qu’il s’agisse de ma première rencontre avec un dirigeant de l’après-guerre est très significatif, car il reflète la force de notre alliance et de nos relations, une relation qui a conduit aux accords d’Abraham, que le président Trump a dirigés.» 

Le point de la normalisation des relations avec Israël a été le cheval de bataille de la première administration Trump et la seconde,  qui se concentre particulièrement sur la normalisation avec l’Arabie Saoudite, considérée par Washington  comme la clé du changement régional à travers la neutralisation de la résistance palestinienne, la destruction du programme nucléaire iranien et l’injection de l’argent dans l’économie américaine. Mais le seul obstacle à cette évolution reste la guerre à Ghaza. L’Arabie Saoudite a exigé la fin de cette guerre pour faire avancer l’accord de cessez-le-feu et c’est Trump en personne qui l’expliquera à Netanyahu, le premier chef d’Etat à se déplacer à la Maison-Blanche.

«Nos décisions redessinent la carte du Moyen-Orient»

Les deux dirigeants, devraient,  selon les médias israéliens et américains,  annoncer des «progrès dans les négociations sur l’accord de normalisation avec l’Arabie Saoudite lors de leur rencontre à Washington mardi».  Les mêmes sources ont précisé que  l’envoyé américain, Steve Witkoff, «a travaillé à coordonner la formulation exacte avec les parties concernées, mais aucun accord n’a été trouvé sur la question de savoir s’il s’agissait d’une déclaration symbolique ou d’une déclaration au contenu concret (…)

En plus de la déclaration concernant l’Arabie Saoudite, Israël a exigé une déclaration claire et ferme de Trump selon laquelle le Hamas ne gouvernera plus à Ghaza». S’exprimant en anglais, Netanyahu a affirmé que le fait d’être le premier dirigeant étranger à rencontrer le président américain Donald Trump à la Maison-Blanche depuis son investiture constitue «un témoignage de la force de l’alliance israélo-américaine. C’est aussi un témoignage de la force de notre amitié personnelle». Netanyahu a éclairé un peu plus sur sa visite en disant : «Nous discuterons des questions cruciales auxquelles nous sommes confrontés, notamment la victoire sur le Hamas, la récupération de tous nos prisonniers et la gestion de l’axe iranien. 

Les décisions que nous avons prises pendant la guerre ont fondamentalement changé le visage du Moyen-Orient et nos soldats ont redessiné la carte. Je crois qu’en travaillant étroitement avec le président Trump, nous pouvons la redessiner encore davantage, et pour le mieux   ensemble et sans relâche avec le président Trump, nous pouvons réaliser de nouveaux changements positifs, renforcer la sécurité d’Israël, élargir le cercle de la paix et inaugurer une ère de paix sans précédent et parvenir à une ère de prospérité et de paix remarquable grâce à la force.» 

Le Premier ministre israélien, qui a dit avoir accepté l’appel de Trump à «la paix par la force», pourrait avoir du mal à convaincre son interlocuteur et puissant allié de la poursuite de la guerre. En dépêchant Steve Witkoff,  un de ses plus proches collaborateurs, au Moyen-Orient, Trump a beaucoup contribué à arracher un cessez-le-feu  et à faire franchir la ligne d’arrivée à l’accord. Witkoff a rencontré Netanyahu en Israël la semaine dernière et les deux hommes devraient entamer officiellement aujourd’hui à Washington les pourparlers sur la deuxième phase. 

Pour Trump, il est question d’aller  vers un accord plus large et, pourquoi pas historique, pour lui, dans lequel l’Arabie Saoudite normalisera ses relations avec Israël. Mais la monarchie a rejeté tout accord si la guerre à Ghaza ne s’arrête pas et si la Palestine aura son Etat qui englobe Ghaza et la  Cisjordanie occupée, avec pour capitale Al Qods (Jérusalem-Est). Or, aussi bien Israël que l’administration Trump sont opposés à la création de cet Etat palestinien.
 

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