En plus des bombardements continus qu’elle subit depuis 80 jours, Ghaza est menacée de famine. Le dernier rapport du Programme alimentaire mondial publié jeudi 21 décembre souligne que 93% de la population ghazaouie est «en situation d’insécurité alimentaire aiguë».
Un quart des familles pourraient être en «phase 5» d’ici à février, soit «un manque extrême de nourriture pouvant conduire à une situation de famine», selon le même rapport.
Le fait est que dans l’enclave bombardée quotidiennement par l’armée d’occupation israélienne et où 85% de la population ont été déplacés selon l’ONU, l’aide humanitaire entre au compte-gouttes, en quantités insuffisantes pour subvenir aux besoins, malgré le vote, vendredi dernier, d’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU exigeant l’acheminement «à grande échelle» de l’aide humanitaire.
Les organisations internationales multiplient les alertes quant au désastre humanitaire à Ghaza, mais le monde reste sourd et aveugle face à une population prise en tenaille par la faim et les bombardements.
Ainsi, d’ici au 7 février, près de la moitié de la population ghazaouie devrait atteindre le stade d’«urgence», caractérisé par une malnutrition sévère et une augmentation des décès.
De plus, plus d’un demi-million de personnes, soit au moins une famille sur quatre, risque de basculer dans la «phase 5», marquée par des conditions désastreuses, pouvant mener à une famine imminente, selon le rapport du Programme alimentaire mondial (PAM) qui précise que 26% des Ghazaouis ont d’ores et déjà épuisé leurs réserves alimentaires, faisant désormais face à des niveaux de faim catastrophiques.
«Il existe un risque de famine dans les six prochains mois si la situation actuelle de conflit intense et d’accès humanitaire restreint persiste», explique l’agence. Cynique, l’armée d’occupation sioniste impose un siège sur Ghaza depuis le 9 octobre, privant les 2,2 millions habitants de l’enclave d’électricité, de carburant, de nourriture et d’eau.
Les bombardements incessants ont ravagé les champs, le port de pêche, le bétail et détruit les boulangeries et les réserves d’eau. L’assistance humanitaire parvient à peine à répondre aux besoins fondamentaux de la population. L’UNRWA, l’Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, concentre ses opérations principalement à Rafah, dans le Sud, et a rarement réussi à atteindre les villes du Nord ainsi que Khan Younès plus au Sud.
Les efforts d’acheminement de l’aide sont ralentis par les inspections des chargements à la frontière avec Israël, obligeant ces derniers à retourner à Rafah pour entrer à Ghaza. Malgré la réouverture temporaire du passage de Kerem Shalom reliant Ghaza à l’entité sioniste sous la pression américaine, le passage des convois reste irrégulier, avec seulement quelques dizaines de camions entrant quotidiennement dans le territoire palestinien.
Cela reste nettement insuffisant par rapport aux centaines de camions acheminés quotidiennement avant le début de la guerre.
«60% de la population en insécurité alimentaire»
Le 18 décembre, l’organisation Human Rights Watch a accusé Israël d’utiliser la privation de nourriture comme arme contre les civils de Ghaza, une action qualifiable de crime de guerre.
L’ONG a souligné que les forces israéliennes bloquent délibérément les approvisionnements, citant des déclarations de hauts responsables israéliens exprimant leur intention de priver les habitants de Ghaza de nourriture et d’eau.
Il faut dire, à ce propos, que même avant la guerre, les habitants de Ghaza dépendaient principalement de l’assistance humanitaire, en raison du blocus imposé par Israël depuis 2007.
Avant même le 7 octobre, plus de 60% de la population étaient déjà en insécurité alimentaire. Quelques voix s’élèvent contre ce drame humanitaire. Le pape a dénoncé, hier, dans son traditionnel message de Noël «la situation humanitaire désespérée» des Palestiniens dans la Bande de Ghaza.
«Je demande que cessent les opérations militaires, causant un très grand nombre de victimes civiles innocentes, et que l’on remédie à la situation humanitaire désespérée en permettant l’arrivée de l’aide humanitaire», a-t-il déclaré dans son discours «Urbi et Orbi» («à la ville de Rome et au monde»).
Le chef de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déploré, dimanche, la «décimation» du système de santé et réitéré son appel urgent à un cessez-le-feu.
L’OMS s’alarme depuis longtemps de l’état des soins de santé depuis que la guerre la plus sanglante jamais connue à Ghaza a éclaté. Le personnel de l’OMS a décrit des scènes «insupportables» de patients en grande partie abandonnés, y compris de jeunes enfants, mendiant non pas des soins mais de la nourriture et de l’eau.