Le Liban vit sous le fracas incessant des bombardements israéliens. Le ministère libanais de la Santé publique a annoncé que plus de 3000 personnes ont perdu la vie et près de 13 500 autres ont été blessées dans les attaques israéliennes menées depuis 13 mois contre des localités libanaises.
Parmi les victimes, 589 femmes et au moins 185 enfants, pris au piège d'une guerre qui n'épargne ni civils ni infrastructures. Les frappes incessantes et les tirs d'artillerie israéliens ont transformé des quartiers entiers en champs de ruines, notamment à Beyrouth, poussant 1,2 million de Libanais à fuir leurs foyers pour échapper à la menace.
Si Israël prétend avoir ciblé des centaines de combattants du Hezbollah, les témoignages et les rapports indépendants venus de terrains bombardés dépeignent une autre réalité : celle d'une population civile lourdement frappée. Catherine Russell, directrice exécutive de l'Unicef, a souligné, la semaine dernière, l'ampleur du désastre : «Depuis le 4 octobre, au moins un enfant est tué et dix autres sont blessés chaque jour au Liban.» Elle décrit l'impact de ces bombardements prolongés sur les enfants qui, bien que nombreux à survivre physiquement aux frappes, en ressortent traumatisés par la violence et le chaos.
Les déplacements de masse aggravent la situation déjà précaire du Liban. Environ un cinquième de la population totale, soit 1,2 million de personnes, est désormais déraciné, contraint de fuir villes, villages et même des quartiers de la capitale sous les frappes israéliennes répétées. Ces familles, souvent entassées dans des abris de fortune, vivent dans des conditions de dénuement extrême, dépendant d'une aide humanitaire elle-même sous tension.
Capacité à frapper en profondeur
L'agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a déclaré qu'une moyenne de 400 à 600 personnes en provenance du Liban arrivaient chaque jour en Irak, au cours de la dernière semaine. La majorité de ces arrivants sont des Libanais, mais on constate également une augmentation du nombre de Syriens et de Palestiniens. Depuis le début de l’offensive israélienne contre le Liban en septembre, au moins 28 350 réfugiés, en provenance du Liban, ont rejoint l'Irak, principalement accueillis dans les villes de Najaf et Karbala. Par ailleurs, le HCR a annoncé qu’environ 472 000 personnes avaient traversé la frontière pour se réfugier en Syrie au cours des dernières semaines. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a, quant à elle, rapporté que les services médicaux d’urgence au Liban ont subi 201 attaques au cours de l'année passée, entraînant la mort de 151 personnes.
Le Hezbollah, de son côté, a fait preuve de sa capacité à frapper en profondeur son ennemi israélien, malgré des pertes humaines importantes dans ses rangs. Pas moins de 72 Israéliens ont été tués dans les attaques menées par le Hezbollah depuis octobre dernier, dont au moins 30 soldats israéliens morts dans les affrontements avec le groupe armé libanais. Le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a mis en garde contre une aggravation de la crise humanitaire au Liban. Depuis octobre de l'année dernière, au moins 110 personnels de santé ont été tués, et 60 attaques ont été perpétrées contre des établissements de santé. Selon les témoignages, plusieurs villages frontaliers, dont Meiss el Jabal, ont été presque entièrement détruits.
Selon l'analyste Saïd Arikat, interrogé par la chaîne Al Jazeera, cette escalade pourrait être interprétée comme une tentative de Benyamin Netanyahu de détourner l'attention de l'échec de la campagne menée à Ghaza. «Netanyahu a annoncé trois objectifs : décapiter le Hamas, libérer les otages et changer le régime à Ghaza. Il a échoué sur ces trois plans.
Désormais, il élargit le théâtre des opérations au Liban», affirme-t-il. Israël a également instauré une «situation spéciale» pour sécuriser ses villes frontalières, où des mesures, telles que les couvre-feux et les évacuations forcées ont été mises en place. Le Hezbollah, de son côté, a fait preuve de sa capacité à frapper en profondeur le territoire israélien, malgré des pertes humaines importantes dans ses rangs.
Mikati accuse Israël
Pour les autorités libanaises, l’intention d’Israël semble claire : créer une «zone tampon» le long de la frontière, une sorte de «no man’s land» où le Hezbollah ne pourrait s’établir durablement. Le maire de Meiss El Jabal, Abdel-Moneem Choukair, a affirmé à l’AFP que «70% de la localité sont détruits» et que plusieurs infrastructures civiles, dont un hôpital, ont été gravement endommagées.
Selon des témoins, des centaines de maisons dans les villages frontaliers auraient été dynamitées par les forces d’occupation israéliennes. L’ombre d’une guerre ouverte au Liban réactive des tensions latentes avec l’Iran, allié stratégique du mouvement chiite. Une escalade dans ce conflit pourrait rapidement déborder les frontières israélo-libanaises et mobiliser d’autres acteurs régionaux, y compris des puissances mondiales, prises dans le jeu des alliances.
Les efforts diplomatiques peinent à ramener les deux parties à la table des négociations. Alors que le bilan humain et matériel continue de s’alourdir, un cessez-le-feu semble encore lointain. Vendredi, le Premier ministre libanais par intérim, Najib Mikati, a accusé Israël de bloquer tout progrès dans les négociations visant à établir un cessez-le-feu avec le Hezbollah.
Le Premier ministre libanais a condamné les «crimes de destruction et de meurtre» perpétrés par Israël, tout en appelant la communauté internationale à faire pression sur Tel-Aviv pour une désescalade. Des pourparlers informels seraient en cours, mais peu de signes laissent présager un apaisement des tensions dans un avenir immédiat.
Israël semble vouloir négocier en position de force, cherchant à dissuader toute alliance stratégique entre le Hamas et le Hezbollah. La perspective d'un «front commun» entre Ghaza et le Liban inquiète particulièrement le gouvernement israélien. Amel Blidi
L’UE débloque 5 millions d’euros pour venir en aide aux déplacées
L’Union européenne (UE) a débloqué 5 millions d’euros supplémentaires pour venir en aide aux personnes déplacées en Syrie, a annoncé hier la Commission européenne. Compte tenu de l’escalade de l’agression sioniste dans la région, ayant entraîné des déplacements massifs de populations et des passages de personnes du Liban vers la Syrie, «la Commission européenne a mobilisé 5 millions d’euros supplémentaires pour répondre aux besoins humanitaires les plus urgents de la population traversant la Syrie», a-t-elle indiqué dans un communiqué. Selon l’Exécutif européen, ce financement s’inscrit dans le cadre d’un train de mesures d’urgence visant à faire face aux conséquences des retombées régionales de la crise. «La nouvelle dotation vise à accroître l’aide humanitaire en faveur des Syriens et des Libanais, en aidant les personnes déplacées et les communautés d’accueil à répondre à des besoins immédiats, tels que l’alimentation, la santé et la protection», a expliqué la Commission. L’aide sera acheminée par l’intermédiaire des partenaires humanitaires de l’UE, qui répondent déjà à la crise des déplacements de population en Syrie, afin de «veiller à ce qu’une aide essentielle soit fournie rapidement aux personnes qui arrivent», a-t-elle ajouté. Avec cette nouvelle aide, la Commission a alloué, en 2024, 159 millions d’euros d’aide humanitaire pour venir en aide à des millions de personnes en Syrie. Lundi, le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a averti que la situation humanitaire au Liban a atteint des niveaux qui «dépassent la gravité de la guerre de 2006». Vendredi, l’OCHA a indiqué que les agences humanitaires manquent cruellement de fonds pour leurs opérations au Liban, en proie à des agressions sionistes. En effet, l’appel humanitaire pour le Liban n’a obtenu que 17% des 426 millions de dollars réclamés, soit 73 millions.