La seule parade

05/04/2022 mis à jour: 00:22
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Comme chaque année, le mois de Ramadhan reste la période durant laquelle les Algériens s’aperçoivent plus que d’habitude de l’évolution des prix des produits alimentaires qui ne riment qu’avec l’augmentation. Et depuis presque tout le temps, les gouvernements successifs n’ont jamais pu (ou presque) faire aboutir leurs politiques qui consistent à mettre un peu d’ordre dans les marchés afin de pouvoir ramener les prix à la baisse durant cette période de forte consommation. 

Problème d’offre par rapport à une demande plus élastique durant ce mois plus particulièrement, ou celui d’une désorganisation des circuits commerciaux de distribution, la question des prix refait surface à chaque fois dans les mêmes termes, mais aussi avec les mêmes justificatifs de la part des officiels. Les deux ministères, du Commerce et de l’Agriculture, se voient contraints de se rejeter la balle mutuellement pour s’exonérer chacun de quelque responsabilité en la matière. 

Sans doute que l’un comme l’autre y sont pour quelque chose. Un niveau de production insuffisant mais aussi un marché complètement anarchique et désorganisé des produits alimentaires. Et pour mieux couper l’herbe sous le pied des spéculateurs, l’Exécutif a décidé dernièrement de «criminaliser» l’acte spéculatif. Cette mesure a-t-elle porté ses fruits ? 

La question reste posée, même si des experts, qui se sont prononcé la semaine dernière sur le sujet, à l’exemple notamment de la hausse des prix de la pomme de terre, restent dubitatifs, tant que le diagnostic qui en a été fait semble n’être pas identique à celui avancé par les officiels. 

Un expert du secteur agricole a, lors d’un séminaire à Alger sur la sécurité alimentaire, pris le soin d’expliquer que la hausse des prix de ce produit agricole intervient en réalité en cette période dite de «soudure» – en mars-avril et octobre-novembre où il n’y a pas de production– alors que les instruments de régulation mis en place, à savoir le système Syrpalac, sont inefficaces, puisque «le taux de stockage de la production par rapport à l’offre locale (à peine de 4%) est bien trop faible pour exercer une influence sur les prix des marchés au niveau national. 

Ainsi, il apparaît que, selon des experts, cette hausse des prix est loin d’être un effet conjoncturel qu’il s’agit de gérer au mieux pour pouvoir assurer un meilleur contrôle sur les prix. 

Car il s’agit de bien plus que cela, étant donné que les faibles quantités stockées de pomme de terre posent en réalité un problème d’offre. Il faudrait produire plus pour pouvoir stocker de plus grands volumes.

 Cette remarque seule devrait normalement inciter les pouvoirs publics à s’intéresser autrement que par le passé au secteur de l’agriculture afin de mieux exploiter son potentiel. 

La crise mondiale de la Covid-19 et, plus récemment encore, le conflit ukrainien avec son lot d’implications sur les risques d’une crise alimentaire dans le monde sont un avertissement. 

L’inflation est partout dans le monde et, en Algérie, en plus de celle importée, l’agriculture reste, en effet, selon le gouverneur de la Banque d’Algérie, le premier poste en cause. 

L’expert Bessaoud, auteur d’un rapport rendu public il y a quelques jours sur la sécurité alimentaire, a tenu à rappeler : «Les estimations FAO-OCDE (perspectives 2030) montrent que la volatilité des prix des produits agricoles mondiaux doit plutôt augmenter ou se maintenir à un niveau élevé dans le futur.» 

Le secteur de l’agriculture, le pétrole vert comme on l’appelle, doit recueillir la plus haute priorité face aux multiples défis, dont les menaces liées aux changements climatiques. C’est la seule parade.

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