L’intensification des bombardements israéliens, combinés à un siège total, se poursuit dans la bande de Ghaza. Les dernières frappes aériennes, qui ont visé des immeubles résidentiels à Beit Lahiya, Nuseirat et Bureij, ont coûté hier la vie à 96 Palestiniens en une seule matinée, selon le bureau médiatique de Ghaza. Parmi les victimes, une proportion importante de femmes et d’enfants.
L’attaque la plus meurtrière a eu lieu à Beit Lahiya, dans le nord de la bande de Ghaza. Une frappe sur une tour résidentielle a tué au moins 72 personnes, laissant des dizaines d'autres blessées ou piégées sous les décombres. Les équipes de la défense civile, débordées et incapables d’accéder à certaines zones en raison de la violence des bombardements, rapportent que 20 à 30 personnes sont encore ensevelies sous les ruines. Jihad Eid, qui a perdu un neveu dans le raid contre une maison à al Bureij, évoque à l’AFP une situation «horrible».
«C'étaient des enfants innocents qui étaient chez eux et qui n'ont rien à voir avec tout ce qui se passe.» «Les frappes israéliennes visent délibérément des civils tard dans la nuit, rendant les opérations de sauvetage impossibles», a déclaré Mounir El Bursh, directeur général du ministère de la Santé de Ghaza, à Al Jazeera.
Hier encore, un convoi humanitaire de l’ONU, chargé de médicaments destinés à l’hôpital Kamal Adwan, a été bloqué par les forces d’occupation israéliennes. La situation est d’autant plus alarmante que les infrastructures de santé, déjà fragilisées, sont à genoux. Plus de 12 000 blessés nécessitent des soins urgents à l’étranger, mais ils se voient refuser tout passage.
Les médecins eux-mêmes sont des cibles. «Ils sont attaqués jusque dans leurs maisons, empêchés de sauver des vies», s’indigne El Bursh. La dégradation des conditions de vie est vertigineuse. Selon le ministre des Transports et des Communications de Palestine, Tariq Zourob, les attaques ont causé des dégâts estimés à 4,8 milliards de dollars, affectant les routes et les infrastructures essentielles.
Les déchets solides, accumulés sur les routes, s’élèvent à 300 000 tonnes, menaçant la santé publique. Dans le camp de réfugiés de Shati, une école gérée par l’ONU, où s’étaient réfugiées des milliers de personnes déplacées, a été frappée par une attaque israélienne. Au moins 10 Palestiniens ont été tués, parmi eux des femmes et des enfants. Ces scènes de désolation se multiplient : à Ghaza-ville, une frappe sur un salon de coiffure a tué cinq personnes, tandis qu’un rassemblement familial à Khan Younès a été décimé.
A l’hôpital El Aqsa, selon les vidéos et les témoignages sur place, le silence des morts est ponctué par les cris déchirants des survivants. Dix-sept corps reposent dans la morgue, attendant des linceuls qui font cruellement défaut dans tout Ghaza. Des mères pleurent leurs enfants, leurs visages marqués par une douleur que rien ne semble pouvoir apaiser.
Les habitants, confrontés à une pénurie totale de nourriture, d’eau potable et de médicaments, luttent pour leur survie. «La nuit, nous n’avons qu’une certitude : celle d’entendre des explosions», confie un médecin de l’hôpital à la chaîne El Jazeera, qui témoigne des frappes incessantes sur Nuseirat et al Bureij. Le bureau médiatique de Ghaza accuse Israël de mener une «guerre de nettoyage ethnique» avec le soutien implicite des etats-Unis, du Royaume-Uni, de l’Allemagne et de la France. «Ces pays partagent la responsabilité de ce génocide», a déclaré le bureau dans un communiqué.
Liban : le responsable de la communication du Hezbollah tué
L'escalade militaire au Liban a franchi un nouveau cap hier avec une frappe israélienne dans le quartier de Ras El Nabaa, en plein cœur de Beyrouth. L'immeuble visé abritait les bureaux de la branche libanaise du parti Baas syrien, ainsi que Mohammad Afif, responsable des relations médias du Hezbollah. Selon une source de sécurité libanaise, cette attaque a causé la mort de ce haut responsable du mouvement chiite, en plus de trois blessés.
Cette frappe marque un tournant. Elle s’éloigne des cibles habituelles situées dans les bastions chiites au sud de la capitale libanaise, comme Haret Hreik ou Dahiyeh, pour s’inscrire dans un quartier à prédominance chrétienne, non associé historiquement à la présence du Hezbollah.
Mohammad Afif, figure emblématique des relations publiques du Hezbollah, jouait un rôle clé dans la communication du mouvement, notamment dans la diffusion de son message auprès des médias internationaux. Ancien directeur général de la chaîne al Manar, il était aussi un proche conseiller du défunt secrétaire général Hassan Nasrallah.
Depuis la mort de ce dernier, Afif était devenu un visage incontournable de la stratégie médiatique du Hezbollah, accompagnant fréquemment les journalistes étrangers dans les régions contrôlées par le groupe. Pour Israël, la frappe contre Afif semble s'inscrire dans une politique délibérée visant à démanteler les structures non seulement militaires, mais aussi administratives et médiatiques du Hezbollah.
Comme l’a déclaré Dan Perry, ancien rédacteur en chef pour le Moyen-Orient à l’Associated Press, Israël ne dissimule pas son intention de saper l’organisation sur tous les fronts : «Quiconque sera nommé pour le remplacer sera probablement également ciblé.» Depuis le 30 septembre, Israël mène une offensive terrestre dans le sud du Liban, tandis que ses frappes aériennes s’intensifient, touchant des zones denses en population. Plus de 3452 personnes ont déjà perdu la vie depuis le 8 octobre, selon le ministère libanais de la Santé.
Les bombardements récents sur la banlieue sud de Beyrouth, près de l’aéroport international, ont détruit un immeuble résidentiel proche d’une église, ajoutant au désespoir des habitants. Cette stratégie s'accompagne d'un appel israélien aux civils pour évacuer certaines zones. Toutefois, dans un contexte où les infrastructures sont déjà ravagées, ces appels soulèvent des questions : les habitants peuvent-ils réellement fuir ? Et où peuvent-ils trouver refuge ?
Sur le terrain, les affrontements nocturnes entre combattants du Hezbollah et forces d’occupation israéliennes se multiplient. Dans les régions du sud, la population est prise en étau entre les bombardements israéliens et les combats au sol. Tandis que les cendres de l’immeuble de Ras El Nabaa se dissipent, une question demeure : combien de temps le Liban pourra-t-il supporter cette guerre qui ne dit pas son nom ?