Après la sécheresse qui a causé des dégâts jamais enregistrés dans la wilaya, les dernières intempéries ont apporté un coup de grâce à une production qualifiée de catastrophique.
Les conséquences de la sécheresse qui a sévi durant les mois de mars et avril sur le rendement agricole dans la wilaya de Constantine sont désormais déclarées dévastatrices. Une véritable année noire pour les agriculteurs, dont une bonne partie d’entre eux a annoncé «zéro récolte» à cause des rares précipitations enregistrées pendant une période prolongée. Les cultures et le sol en ont souffert considérablement.
Cette situation affligeante a été exposée, photos à l’appui, jeudi dernier, par le président de la commission d’agriculture Abdelkader Meziani lors de la deuxième session de l’APW de Constantine. Un rapport accablant a été présenté au sujet de la situation hydrique et de la régression considérable du rendement de la filière des céréales dans cette région, qui compte parmi les plus productrices en Algérie.
Pour rappel, la saison 2020-2021 a enregistré une récolte de 1,6 million de quintaux de céréales. Un chiffre qui descend à 1,3 million de quintaux, l’année suivante, dans une wilaya qui produisait plus de 2 millions de quintaux. «Pour cette saison, nos prévisions tournaient autour d’une production de 300 000 quintaux, il y a environ 20 jours. Mais après les dernières pluies, les dégâts se sont avérés plus importants. Je peux vous affirmer que nous allons revoir ce chiffre à la baisse de 50 %, c’est-à-dire une production de 150 000 quintaux. Nous allons enregistrer un grand décalage», a-t-il déclaré à El Watan.
Ce dernier a révélé que les pluies orageuses de ces dernières semaines ont causé des dégâts pour certaines cultures. Certaines céréales, argue notre interlocuteur, ont germé après ces averses, mais vont mourir les prochains jours avec la hausse de la température. Par les chiffres, le taux des dégâts enregistrés, il y a environ 20 jours, varie entre 20% et 97%. Les communes du sud et du sud-est de la région, notamment Benbadis, Aïn S’mara, El Khroub, Ouled Rahmoun et Aïn Abid sont les plus touchées avec un pourcentage de pertes à partir de 80%. «Actuellement à Aïn Abid, on est à 100% de pertes.
Les agriculteurs trinquent face à cette situation critique, qui a impacté également la productivité des cheptels. Par exemple, un bovin consomme 120 kg de son par mois, avec une moyenne journalière de 400 g de fourrage. Est-ce que vous savez que 40% de son sont orientés vers la coopérative des aliments de bétail et 60% est vendu au privé ? Aujourd’hui, le son coûte plus cher que la semoule au marché noir, il se vend entre 4000 et 4600 DA le quintal. Il faut agir rapidement pour pallier cette situation et sauver la prochaine saison», a souligné Meziani.
Manque de prévisions à long terme
La réduction des pâturages et de l’eau ont également affecté la santé et la productivité des cheptels souffrant de malnutrition et de déshydratation. Ce phénomène a d’ailleurs été observé durant les derniers mois, où le beurre de vache est devenu une denrée rare, proposée à des prix exorbitants.
En plus de la sécheresse qui demeure le facteur principal dans la régression de la production agricole, notre interlocuteur évoque d’autres causes, dont le manque de prévisions à long terme. Par exemple, la wilaya est dotée d’une vingtaine de retenues collinaires d’une capacité théorique de 9 025 000 m3 pouvant irriguer 1806 hectares.
Ces retenues créées entre 1989 et 2013 dans 8 communes sont pleines de boue. Ce volet avait fait l’objet d’un rapport de la même commission de l’APW, mais en vain. Le manque de suivi des forages par les autorités concernées et les contraintes administratives pour la délivrance des autorisations ont également été pointés du doigt.
Tous ces facteurs ont réduit de 82 % la superficie irriguée. «Il faut signaler aussi que l’irrigation d’appoint ou complémentaire est quasiment absente à Constantine. Je peux même avancer qu’on est à 0,01% d’irrigation complémentaire, vu le manque des ressources en eau. C’est pourquoi nous avons proposé comme solution la réalisation de petites stations d’épuration (STEP) avec une capacité de 160 000 l/jour.
Ces stations peu coûteuses doivent être installées au niveau du réseau des rejets des eaux usées de chaque commune, pour les traiter et les déverser dans les oueds ou les retenues. Il faut commencer dès aujourd’hui», a expliqué le président de la commission d’agriculture de l’APW. Parmi les mesures recommandées pour soutenir les agriculteurs et atténuer les effets négatifs de ce phénomène climatique, notons l’utilisation des stations de dessalement pour l’irrigation.
Par ailleurs, nous avons appris de certaines sources que la Chambre nationale de l’agriculture a avancé que 29 wilayas ont été touchées par ce phénomène de sécheresse avec des pertes considérables. Ce qui signifie que 50% des zones productives ont été affectées. L’État, qui envisage d’atteindre la sécurité alimentaire à travers une autosuffisance en produits céréaliers, déclarera-t-il une année de sécheresse, en s’orientant vers l’importation afin de subvenir aux besoins de la population ?