Élu en novembre dernier, Donald Trump sera officiellement investi comme 47e président des Etats-Unis aujourd’hui. Un événement qui marquera son retour sur la scène politique, après son départ en 2021.
La cérémonie sera chamboulée par un froid polaire : c’est à l’intérieur du Capitole qu’il prêtera serment. Suivront les adieux officiels du président Joe Biden et de la vice-présidente Kamala Harris. A cette occasion, Donald Trump a invité les multimilliardaires de la tech. Outre Elon Musk, l’homme le plus riche du monde et soutien financier et politique, sont attendus le patron d’Amazon, Jeff Bezos, de Meta, Mark Zuckerberg, d’Apple, Tim Cook et, selon la presse, Shou Chew de TikTok. Tous les anciens présidents américains Bill Clinton, George W. Bush et Barack Obama et leurs épouses, sauf Michelle Obama, sont attendus.
Sont conviés, à titre personnel, la Première ministre italienne d’extrême droite, Giorgia Meloni, qui fera le voyage, son homologue hongrois, Viktor Orban, qui ne viendra pas, et le président argentin, Javier Milei. Des hommes et femmes politiques de l’extrême droite en Europe ont annoncé leur présence : les Français Marion Maréchal et Eric Zemmour, le Britannique Nigel Farage et un dirigeant de l’AfD allemande, Tino Chrupalla. Samedi, Donald Trump a promis qu’il signerait un nombre «record» de décrets présidentiels immédiatement après sa prestation de serment.
Dans un entretien téléphonique avec la chaîne NBC News, le très prochain 47e président des Etats-Unis a dit ne pas avoir de chiffre précis en tête, mais qu’il comptait parapher un nombre «record» de décrets, des textes juridiques émanant du pouvoir exécutif. «Dès que j’aurai prêté serment, je lancerai le plus grand programme d’expulsions de l’histoire américaine», a-t-il assuré en meeting.
L’expulsion d’immigrés clandestins, qui seraient environ 11 millions aux Etats-Unis, «débutera très, très rapidement». Le tribun républicain s’est engagé pendant sa campagne et depuis qu’il a été élu à défaire les politiques de l’administration de Joe Biden. «Je ne peux dire dans quelles villes, car les choses sont en train de bouger», a-t-il ajouté, après qu’un responsable de sa future administration eut parlé vendredi de Chicago, ville démocrate. «Il va y avoir des actions dans tout le pays. Chicago n’est qu’un endroit parmi d’autres», a dit sur Fox News, Tom Homan, ex-directeur de l’agence pour le contrôle des frontières et de l’immigration (ICE) et qui sera chargé de la protection des frontières.
Inquiétude de l’Europe
Par ailleurs, l’ambassadeur d’Allemagne aux Etats-Unis, appelé à représenter son pays lors de l’investiture de Donald Trump, s’est inquiété des «projets de vengeance» du président élu et a jugé que son programme pourrait saper la démocratie américaine, dans un document confidentiel très alarmiste révélé hier par le quotidien Bild, cité par l’AFP.
Ces propos d’Andreas Michaelis sont contenus dans un câble diplomatique adressé mardi à la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock. Il y dénonce notamment la «stratégie de disruption maximale» du nouveau président américain pour «redéfinir l’ordre constitutionnel» de son pays, selon Bild. Le ministère des Affaires étrangères n’a pas souhaité commenter par «principe» ce qui relève de «documents internes, analyses ou rapports d’ambassades».
Le diplomate allemand voit en Donald Trump, dans le document interne confidentiel, un homme animé par des «envies de vengeance», estimant qu’il pourrait se diriger vers une «concentration maximale des pouvoirs» au détriment du Congrès et des Etats fédérés. L’ambassadeur allemand, qui fut il y a plus de 20 ans porte-parole du Premier ministre écologiste allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer, juge que les principes démocratiques fondamentaux des Etats-Unis pourraient être «largement sapés» par cette pratique du pouvoir.
La fuite de ce câble diplomatique tombe mal pour Berlin dans la mesure où c’est cet ambassadeur de 65 ans qui doit représenter le gouvernement allemand aujourd’hui lors de l’investiture du nouveau chef de l’Etat américain.
Dans son analyse, il s’inquiète par ailleurs des menaces de «déportations de masse» d’étrangers et du contrôle des enquêtes judiciaires, Trump cherchant à placer des alliés à des postes clés, selon lui. Il s’inquiète aussi de la volonté à ses yeux de Donald Trump et son allié Elon Musk de vouloir restreindre la liberté d’expression et limiter les droits des minorités. Le ministère allemand des Affaires étrangères a cherché à minimiser cette fuite de presse, affirmant que les Etats-Unis «sont l’un de nos alliés les plus importants». Il va s’agir d’entretenir une «étroite collaboration avec la nouvelle administration américaine dans l’intérêt de l’Allemagne et de l’Europe», a-t-il ajouté.
Il faudra «bien travailler avec chaque gouvernement américain, mais les premiers signes que nous avons ne sont pas encourageants», a, en revanche, convenu le co-président du parti social démocrate (SPD) du chancelier Olaf Scholz, Lars Klingbeil, dans une interview samedi aussi à Bild. «Nous tendons la main à Donald Trump» mais «il faut que ce soit clair, s’il la refuse nous devrons être forts et défendre nos intérêts», a-t-il indiqué.
Concernant la zone euro, Donald Trump a menacé fin décembre Bruxelles de taxes douanières si elle ne réduit pas son excédent commercial avec Washington en lui achetant du pétrole et du gaz. «J’ai dit à l’Union européenne qu’elle devait combler son énorme déficit avec les Etats-Unis en achetant à grande échelle notre pétrole et notre gaz», a écrit le milliardaire républicain dans un message sur son réseau social Truth. «Sinon, ce sont les tarifs douaniers jusqu’au bout !!!», a menacé Trump. Les importations de biens en provenance de l’UE s’élevaient à 553,3 milliards de dollars en 2022, tandis que les exportations des Etats-Unis vers les Vingt-Sept représentaient 350,8 milliards de dollars, selon les chiffres américains. Vendredi, Donald Trump et le président chinois, Xi Jinping, ont abordé par téléphone de nombreux sujets, comme le commerce, la crise du fentanyl ou la plateforme TitkTok, un échange qualifié de positif par les deux dirigeants.
Le républicain a qualifié l’appel de «très bon» et le dirigeant chinois a dit espérer un «bon départ» dans les relations bilatérales entre les deux superpuissances aux nombreuses divergences. «Je m’attends à ce que nous résolvions de nombreux problèmes ensemble, et ce, dès maintenant», a écrit le président américain sur son réseau Truth Social.
Entretien avec Xi Jinping
Même espoir côté Xi Jinping : «Nous attachons tous deux une grande importance à l’interaction mutuelle (et) espérons que les relations Chine/Etats-Unis prendront un bon départ au cours du nouveau mandat du président américain», a dit le président chinois, selon la télévision d’Etat CCTV. Les désaccords sont nombreux entre les deux pays. Pendant son premier mandat, Donald Trump a mené une guerre commerciale acharnée avec la Chine, imposant des droits de douane élevés sur les importations en provenance de la deuxième économie mondiale.
Il a menacé d’imposer des mesures encore plus sévères cette fois-ci, accusant Pékin de pratiques commerciales déloyales et de contribuer à une crise dévastatrice du fentanyl aux Etats-Unis. Jeudi, Pékin a dénoncé des «attaques injustifiées» à son encontre après que Marco Rubio, choix de Donald Trump au poste de chef de la diplomatie, a qualifié la Chine d’«adversaire le plus puissant et le plus dangereux» pour les Etats-Unis, lors d’une audition devant le Sénat américain. L’ancien sénateur de Floride a aussi considéré que, pour empêcher une invasion de Taïwan par la Chine, les Etats-Unis doivent montrer à Pékin que le prix à payer serait «trop élevé».
La Chine et Taïwan coexistent depuis 1949 avec des gouvernements distincts, mais Pékin revendique l’île comme partie intégrante de son territoire et n’exclut pas de recourir à la force pour en prendre le contrôle. «A moins d’un changement spectaculaire», le monde sera confronté à ce problème «avant la fin de la décennie», a affirmé le très probable futur secrétaire d’Etat américain, dont la nomination doit être approuvée par le Sénat. Xi Jinping a rétorqué que «la question de Taïwan est liée à la souveraineté nationale et à l’intégrité territoriale de la Chine, et nous espérons que les Etats-Unis la traiteront avec prudence. L’essence des relations commerciales et économiques entre la Chine et les Etats-Unis est le bénéfice mutuel et des résultats gagnant-gagnant, et nous ne devrions pas choisir la confrontation et le conflit». Les deux Présidents assurent que maintenir la paix reste leur priorité.
«Le président Xi et moi-même ferons tout notre possible pour renforcer la paix dans le monde et le rendre plus sûr!» a écrit Donald Trump, pendant que Xi Jinping assure que «les Etats-Unis et la Chine sont les plus importants pays dans le monde d’aujourd’hui et doivent maintenir une amitié à long terme et superviser ensemble la paix dans le monde».
En décembre, le président chinois a déclaré que la Chine est disposée à dialoguer et à «élargir la coopération» avec les Etats-Unis, mais il a averti qu’une guerre commerciale ne ferait «aucun gagnant». Selon l’agence officielle chinoise Xinhua, Donald Trump a dit au président chinois se réjouir d’ores et déjà d’une potentielle rencontre entre les deux hommes d’Etat prochainement.