L’agence de notation Standard &Poor’s a mis en lumière le frappant écart entre les hommes et les femmes en matière d’accès aux sources de financement et l’idée collective que l’on se fait, à ce jour, de la femme chef d’entreprise.
Entre 2019 et 2022, les hommes ont pu bénéficier jusqu’à 97% du financement des start-up, basées en Afrique, tous secteurs confondus, accordés par les fonds d’investissement «capital-risque». En 2022, ce même type de financement était de 84% pour les start-up fondées par des hommes contre 14% pour les start-up à capitaux mixtes (homme/femme) et 1,8% à des start-up fondées exclusivement par des femmes.
L’agence de notation Standard &Poor’s, à travers ces indicateurs, mettra en lumière le frappant écart entre les deux sexes en matière d’accès aux sources de financement et l’idée collective que l’on se fait, à ce jour, de la femme chef d’entreprise et son incapacité supposée à être l’égale de l’homme. Dans cette discrimination des prêteurs et autres bailleurs de fonds, la Banque africaine de développement (BAD) impute, à demi-mot, une part de responsabilité aux femmes entrepreneures de par «la perception» qu’elles ont de la solvabilité et de l’éligibilité de leurs entreprises sur le marché du crédit ou autres sources de financement.
Dit autrement, le manque de confiance en soi sur les questions financières, telles que la prise de risques, de décisions éclairées et la maîtrise des concepts, est toujours persistant. Ce constat serait, en particulier, fortement perceptible en Afrique du Nord. En témoigne l’écart entre les deux sexes en matière d’«éducation financière», estimé par Standard &Poor’s à 5% en Egypte, 9% en Mauritanie, 10% en Algérie et 13% en Tunisie. C’est justement pour débattre de cette problématique et de tant d’autres et échanger autour de leurs expériences respectives que seront rassemblées la semaine prochaine en Tunisie, des femmes chefs d’entreprise issues des deux rives de la Méditerranée.
Le contexte : Forum des femmes chefs d’entreprise de l’Union pour la Méditerranée (UpM) et de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (Onudi), traitant de l’«Autonomisation des femmes dans l’industrie et l’innovation» qui aura lieu du 6 au 7 juin à Tunis. Y seront spécifiquement décryptés «les impacts de l’industrie 4.0 sur les salariées et les femmes chefs d’entreprises dans le secteur manufacturier».
Le concept Industrie 4.0, communément appelée industrie du futur, faisant «référence à la transformation de l’industrie et des systèmes de production, grâce à l’émergence de nouvelles technologies». Dans son argumentaire, le Women Business Forum (WBF), l’accent a, surtout, été mis sur le manque d’enthousiasme des femmes entrepreneures de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord pour ce concept et, globalement, pour les nouvelles technologies, alors que «la révolution de l’industrie 4.0 crée des opportunités pour des modèles productifs renouvelés et plus écologiques».
Se référant à une enquête menée, en 2019-2020, à l’initiative de l’Onudi auprès de 1418 femmes entrepreneures dans le secteur manufacturier en Algérie, Egypte, Jordanie, Liban, Maroc, dans l’Etat de Palestine et en Tunisie, le WBF fera remarquer que «les personnes interrogées possédaient une connaissance très limitée de l’industrie 4.0 et des concepts associés ; 62 % ayant indiqué qu’elles étaient peu ou pas du tout familiarisées avec ces concepts».
Il en ressortira aussi que «seul un quart des femmes interrogées utilisent les technologies numériques à un certain stade des processus de conception, de fabrication et de vente des produits de leur entreprise». Pourtant, insistera-t-on, «l’accès à la technologie tend à favoriser l’entrepreneuriat. Aujourd’hui, un entrepreneuriat réussi exige des compétences numériques ainsi qu’une volonté d’innovation et de durabilité».
A ce sujet, l’opportunité est ainsi offerte, à travers cette édition 2023 du WBF, aux représentantes d’organisations nationales et régionales de femmes chefs d’entreprise, aux organisations internationales de premier plan ainsi qu’aux programmes et organismes de soutien aux entreprises de la région euro-méditerranéenne de discuter «des modèles et des bonnes pratiques à diffuser pour s’assurer que les femmes sont habilitées à jouer un rôle de premier plan dans les secteurs de l’innovation, y compris en tant qu’entrepreneures, et en encourageant un changement de comportement à l’égard des femmes dans les STIM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques)».
Pour les entrepreneures et dirigeantes d’entreprises africaines et européennes, le forum sera également «une occasion unique de faire passer leur entreprise au niveau suivant en tirant les enseignements de modèles d’entreprise réussis et innovants, et en établissant des relations commerciales et des réseaux professionnels».
En termes relatifs, seront, en outre, explorés par les chefs d’entreprises, de PME ou encore les fondatrices et dirigeantes de start-uples avantages de la plateforme Business Country Desk (BCD), «portail en ligne dynamique initié par Business Med dans le cadre du projet Ebsomed, financé par l’UE, afin de stimuler le développement économique régional dans le voisinage sud-méditerranéen».
Initier ainsi des partenariats commerciaux durables avec les homologues de la région euro-méditerranéenne et MENA est ce à quoi aspire Nadia Habes, pharmacienne à la tête d’un grand Groupe pharmaceutique et dermo-cosmétique familial. «En Algérie, l’ère de l’entrepreneuriat féminin synonyme de coiffure, couture, pâtisserie, production artisanale ou encore de garderie d’enfants et de petits services est révolue.
Je le dis et le répète, encore une fois, rien, absolument rien, ne justifie les stéréotypes confinant la femme dans ce type d’activités. Entreprendre au féminin n’est plus une affaire de pénurie d’emploi. L’enjeu étant désormais à la contribution au développement et à la croissance économique du pays ainsi qu’à l’expansion à l’international.
Le WBF de Tunis et la 12e édition du FIED prévue du 25 au 30 juillet 2023, en République du Congo Brazzaville, seront l’occasion de réapprendre à passer aux grandes enjambées pour y parvenir», insiste Mme Habes qui est vice-présidente du Forum international des Femmes entreprenantes et dynamiques (FIED), membre du CA du Conseil des femmes d’affaires arabes (CFAA) où siègent de grandes fortunes, des têtes couronnées, des ministres, ambassadrices, sénatrices…, issues du monde arabe et sacrée meilleure chef d’entreprise femme au monde (2013) par le Forum mondial des chefs d’entreprise femmes (FCEM).
Près de 1 million de dollars pour soutenir l’entrepreneuriat féminin au Sahel
La Banque africaine de développement (BAD) a accordé un don de près de 1 million de dollars pour soutenir l’accès des femmes au financement et à la formation et accélérer l’inclusion économique au Sahel, a-t-elle indiqué samedi sur son site web.
«Le Fonds fiduciaire pour l’égalité des sexes de la Banque africaine de développement (BAD) a accordé un don de 950 000 dollars au Programme de promotion des liens d’affaires pour les petites et moyennes entreprises d’Afrique au Burkina Faso, au Tchad, au Mali, en Mauritanie et au Niger», a précisé la BAD dans son communiqué.
Ce don, qui «vient compléter un don antérieur de 3,9 millions de dollars de la Facilité d’appui à la transition de la Banque, devrait permettre de soutenir 1400 entreprises dirigées par des femmes et contribuer à la résilience économique et à la cohésion sociale de la région du Sahel», explique l’institution africaine.
Les entrepreneures de la région du Sahel sont confrontées à d’importants obstacles en matière d’accès au financement, aux marchés et aux services de développement des entreprises, note la banque. Le Programme de promotion des liens d’affaires pour les PME en Afrique leur procurera les outils et les ressources dont elles ont besoin pour surmonter ces obstacles et faire croître leurs entreprises, ajoute le communiqué. R. N.