Blocage de l’extraction de pétrole en Libye : Abdelhamid Dbeyba sous pression

20/04/2022 mis à jour: 00:14
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Photo : D. R.

Arrêt des exportations de pétrole à partir des ports de l’Est libyen, Zouitina et Horriga. Blocage de production des gisements Charara et Al Fil près d’Oubari au Sud-Ouest libyen. Nouveau cycle de pression sur Tripoli pour le transfert du pouvoir de Abdelhamid Dbeyba à Fathi Bach Agha.

Un nouveau cycle de blocage de la production et de l’exportation du pétrole s’annonce en Libye. Des fermetures ont été respectivement annoncées ces deux derniers jours des ports de Zouitina, au golfe de Syrte, et Horriga, près de Tobrouk.

En plus, le gisement Charara, le plus grand de Libye, et celui d’Al Fil sont en cessation de production depuis samedi dernier. Ils sont situés au Sud-Ouest libyen, dans la région d’Oubari. L’arme du pétrole revient en première ligne pour faire pression sur les pays occidentaux, afin de retirer leur soutien à Dbeyba et reconnaître le gouvernement nommé par le Parlement de Fathi Bach Agha.

Le blocage du pétrole libyen ne pourrait qu’enflammer davantage les prix des carburants, déjà au plus haut depuis le début de la guerre d’Ukraine. «L’objectif est de faire pression sur les pays occidentaux  afin qu’ils lâchent Abdelhamid Dbeyba, qui n’a aucune autorité en dehors de Tripoli», explique le politologue Ezzeddine Aguil. Il s’agit d’un message clair à l’Italie, la France, l’Allemagne et l’Espagne, très dépendantes du pétrole libyen (et algérien), en cette période de guerre.

Les cours du pétrole flambent déjà depuis le début de la guerre d’Ukraine. La disparition du pétrole libyen sur le marché ne saurait qu’enflammer davantage les cours. «Cela pousserait les pays occidentaux à plus de souplesse, en faveur de Bach Agha, dans la gestion de la crise libyenne», a souligné le juge libyen Jamel Bennour.

Fathi Bach Agha, le chef du gouvernement nommé par le Parlement, et ses alliés de l’Est et du Sud ont de nouveau recouru à cette arme pour accentuer la pression. Le maréchal Khalifa Haftar avait déjà recouru à ce procédé durant le premier semestre 2020, pour couper les ressources financières du gouvernement de Fayez Al Sarraj.

L’accord de cessez-le-feu, obtenu pendant l’été 2020, stipulait une répartition plus équitable des revenus pétroliers entre les trois provinces libyennes, La Tripolitaine, La Cyrénaïque et Fezzan. Toutefois, l’Est (Cyrénaïque) et le Sud (Fezzan) continuent à reprocher à Tripoli d’accaparer le gros des ressources de la Libye. D’où cette nouvelle décision de blocage, relayée dans l’application, par les milices locales dont la majorité prête allégeance à l’Armée nationale libyenne (ANL) de Khalifa Haftar.

Evolution

Le regain de tension en Libye a été remarqué depuis samedi 16 avril. Un communiqué des représentants de l’ANL dans la commission militaire «5+5» a annoncé la suspension de leur participation, avec l’intention de couper la route (Est-Ouest) et de ne plus communiquer avec le gouvernement de Abdelhamid Dbeyba. Le même communiqué a appelé à bloquer la production pétrolière.

Le porte-parole de l’ANL, Ahmed Mesmari, a certes nié tout appel de cette dernière et du gouvernement de Bach Agha à stopper le pétrole. Toutefois, les observateurs sont unanimes pour conclure à une décision en haut lieu, entre Haftar et Bach Agha, dans le sens d’assécher les ressources de Tripoli.

La décision prise le 10 avril par la Cour des comptes, autorisant le paiement des salaires des membres de l’ANL, était considérée trop tardive, puisque lesdits salaires n’ont pas été versés depuis plusieurs mois, malgré les requêtes des représentants de l’ANL dans la commission militaire.

Par ailleurs, cette décision de blocage du pétrole survient alors que la réunion du Caire entre les membres du Parlement et du Conseil de l’Etat, concernant l’assise constitutionnelle des prochaines élections, a été clôturée hier après six jours de travaux, caractérisés par un esprit de compromis, selon Stéphanie Williams, la représentante du SG de l’ONU.

«Il semble que le clan Haftar/Bach Agha a décidé d’exploiter les avancées du Caire et la conjoncture internationale, pour porter l’estocade finale à Abdelhamid Dbeyba», pense le juge Jamel Bennour. Il est toutefois clair que la solution de la crise libyenne n’est pas pour demain.

Le chef du Gouvernement libyen en visite officielle lundi en Algérie

Le chef du gouvernement d’unité nationale de Libye, Abdelhamid Dbeyba, a entamé lundi une visite officielle en Algérie. Il a été reçu par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune. «J’ai eu l’honneur aujourd’hui (lundi, ndlr) de rencontrer le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, avec lequel nous avons abordé nombre de dossiers, notamment les prochaines élections en Libye», a déclaré à la presse M. Dbeyba à l’issue de l’audience.

Il a ajouté «avoir présenté, lors de la rencontre, la vision de son gouvernement pour réaliser ce projet important et passer de la période de transition à la stabilité en Libye». Le chef du gouvernement d’unité nationale de Libye a précisé qu’il a aussi été question lors de la rencontre du «rôle important de l’Algérie en faveur de ces élections et de leur nécessaire tenue dans les meilleurs délais possibles», ainsi que du «soutien à la coopération économique entre les deux pays, notamment dans le domaine du pétrole et du gaz, à la lumière de la conjoncture mondiale» actuelle.

La rencontre s’est déroulée en présence du Premier ministre, Aïmene Benabderrahmane, du ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ramtane Lamamra, du directeur de cabinet à la présidence de la République, Abdelaziz Khellaf, et du ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du Territoire, Kamal Beldjoud. Le chef du gouvernement d’unité nationale de Libye, Abdelhamid Dbeyba, a quitté Alger le jour même. A. Z.

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