Après Ghaza, Israël s’acharne contre la Cisjordanie : Scènes de guerre à Jénine

26/02/2025 mis à jour: 19:28
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La campagne meurtrière israélienne contre les camps de réfugiés palestiniens du nord de la Cisjordanie, à Jénine, Tulkarem et Nour Chams, a fait plus de 40 000 déplacés de force

L’armée israélienne a poursuivi hier, pour le 36e jour consécutif, sa vaste offensive meurtrière contre la ville et le camp de Jénine, en Cisjordanie occupée. 

En cinq semaines, cette campagne militaire baptisée «Mur de fer» a fait «27 martyrs (uniquement à Jénine, ndlr), des dizaines de blessés et d’arrestations» et causé «une destruction massive des biens et des infrastructures», indique l’agence Wafa. Quelque «430 maisons ont été complètement ou partiellement détruites» et le nombre de personnes déplacées du camp de Jénine «a atteint 20 000 âmes», ajoute la même source. En outre, «178 personnes ont été arrêtées dans la ville et le camp depuis le début de l’agression». 

Les forces d’occupation ont encore confisqué de nouvelles habitations civiles pour «les transformer en casernes militaires, en particulier dans les bâtiments proches et surplombant le camp de Jénine», rapporte l’agence d’information palestinienne. «Les habitants des maisons et des bâtiments voisins rencontrent des difficultés pour entrer, sortir et se déplacer en raison de la présence permanente de tireurs d’élite, ce qui met leur vie en danger», révèle encore Wafa. Outre Jénine, la ville de Tulkarem, au  nord de la Cisjordanie occupée, continue de subir elle aussi le rouleau compresseur de l’armée israélienne et ses destructions massives. «L’agression israélienne contre la ville de Tulkarem et son camp est entrée dans son premier mois», note Wafa. 

Répression féroce

Dans un communiqué diffusé hier par la cellule d’information du camp de Tulkarem cité par le Centre d’information palestinien, la campagne sioniste a coûté la vie à 12 personnes et fait, en outre, des dizaines de blessés. «12 citoyens sont tombés en martyrs à Tulkarem, dont un enfant de sept ans et une femme enceinte, tandis que plus de 20 personnes ont été blessées et 165 autres ont été arrêtées», rapporte le communiqué. La répression féroce des forces israéliennes s’est soldée également par un grand nombre d’arrestations. La même source alerte sur le fait que «les forces d’occupation poursuivent le siège imposé aux camps de Tulkarem et de Nour Chams». Cet état de siège touche également les hôpitaux. 

La cellule d’information palestinienne du camp de Tulkarem parle aussi de «raids» répétés qui harcellent les habitants, de «perquisitions dans les maisons» et d’«habitations transformées en casernes militaires», comme à Jénine. La même instance fait état du «bombardement, l’incendie et la démolition de dizaines de maisons». Les troupes israéliennes ont de surcroît «expulsé les résidents sous la menace des armes, ce qui a entraîné une importante vague de déplacements parmi les habitants des camps de Tulkarem et Nour Chams, soit plus de 15 000 personnes déplacées». 

Les populations  expulsées «ont été réparties dans des abris et dans les maisons de leurs proches dans la ville, ses banlieues et ses villages», atteste la cellule d’information du camp de Tulkarem. «L’agression israélienne, poursuit la même source, a entraîné la destruction totale des infrastructures, notamment des réseaux d’électricité, d’eau, d’égouts et de communication, ce qui a grandement affecté la vie des habitants qui sont restés dans certains quartiers des camps de Tulkarem et de Nour Chams, et a exacerbé leurs souffrances en raison de la pénurie aiguë de nourriture, d’eau, de médicaments et de lait pour nourrissons ». 

«40 bâtiments détruits à Tulkarem»

Le chef du Comité populaire du camp de Tulkarem, Faissal Salameh, cité par l’agence Wafa, a déclaré de son côté, dans un communiqué diffusé hier, que «l’occupation a complètement détruit au moins 40 bâtiments résidentiels comprenant 100 appartements, brûlé au moins 10 maisons, détruit au moins 300 magasins, partiellement détruit des centaines de maisons, et vandalisé les biens de centaines d’autres personnes à l’intérieur du camp». M. Salameh a ajouté que les forces sionistes ont «ouvert une route qui a pénétré dans la profondeur de quatre quartiers du camp de Tulkarem (…), ce qui a conduit à la démolition de 26 bâtiments et a causé de graves dommages à tous les immeubles environnants». 

Le chef du comité populaire du camp palestinien a affirmé, par ailleurs, que «l’occupant a forcé plus de 12 000 habitants de Tulkarem à quitter le camp par la menace et l’intimidation vers la ville, les banlieues et les villages voisins». Il a ajouté que plus de 2000 élèves de ce territoire dévasté, qui effectuent leur scolarité dans quatre établissements de l’UNRWA, sont privés d’école depuis un mois. 

Selon les Nations unies, la guerre menée par Israël contre les camps de réfugiés du nord de la Cisjordanie, à Jénine, Tulkarem et Nour Chams, a fait jusqu’à présent 51 morts, dont 7 enfants. La campagne militaire israélienne a provoqué en outre un exode massif de la population palestinienne estimé à 40 000 déplacés de force de l’aveu du ministre israélien de la Défense, Israël Katz. Un chiffre qu’il a avancé dimanche, et qui a été confirmé par l’ONU. 


Des chars à Jénine

Parmi les détails qui n’ont pas échappé aux observateurs : l’armée israélienne a même utilisé des chars au cours de ses incursions dans les quartiers denses de Jénine. «C’est la première fois que des chars opèrent en Cisjordanie depuis la fin de la deuxième intifadha palestinienne en 2005», relève l’AFP. 

Le Bureau des affaires humanitaires de l’ONU (Ocha) s’inquiète de ce déploiement : «L’utilisation continue de tactiques de guerre meurtrières dans des zones habitées est extrêmement préoccupante», a-t-il dénoncé. 

Autre fait inquiétant : Israël a signifié aux populations expulsées des trois camps qu’il leur est interdit de retourner chez elles. Une nouvelle fois, les Palestiniens expropriés se trouvent ainsi face à une véritable opération de dépossession qui réveille le traumatisme de la Nakba de 1948. Ces nouvelles violations ont suscité de vives réactions internationales. 

Devant le Conseil des droits de l’homme à Genève, lundi, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est dit «gravement préoccupé» par ce qui se passe en Cisjordanie : «Je suis gravement préoccupé par la montée des violences et des autres violations commises en Cisjordanie occupée par les colons israéliens, ainsi que par les appels à l’annexion», a déclaré M. Guterres. «Nous assistons à un cessez-le-feu précaire. 

Nous devons éviter à tout prix une reprise des hostilités», a-t-il ajouté. «La population de Ghaza a déjà trop souffert. Il est temps d’instaurer un cessez-le-feu permanent, de libérer tous les otages restants, de réaliser des progrès irréversibles vers la solution des deux Etats, la fin de l’occupation et la création d’un Etat palestinien indépendant, dont Ghaza ferait partie intégrante », a plaidé le chef de l’ONU.  Mustapha Benfodil

 

 

 

Produits de première nécessité à Ghaza  : 35 000 familles souffrent d’une grave pénurie  

Plus de 35.000 familles palestiniennes souffrent d’une grave pénurie de produits de première nécessité dans la bande de Ghaza, après plus de 15 mois d’agression sioniste, a dénoncé mardi le directeur de l’aide médicale de l’enclave, Mohamed Abou Afsh. Dans une interview accordée à la radio «Sawt Falastin», Abou Afsh a indiqué qu’il y avait 35.000 familles qui souffraient encore de la grave pénurie de fournitures de base dans l’enclave palestinienne. Le responsable a ajouté que la souffrance des Palestiniens s’aggravait à Ghaza, avec l’intensification des vagues de froid, les intempéries, et la pénurie de fournitures de base, telles que les couvertures, les tentes et le chauffage, qui ont causé la mort d’enfants par hypothermie. Il a en outre souligné que la bande de Ghaza avait également besoin de quelque 60.000 caravanes et de 200.000 tentes pour venir en aide aux Palestiniens, appelant les institutions internationales à faire pression sur l’occupation sioniste pour lever les contraintes liées à l’aide humanitaire. La Défense civile palestinienne avait indiqué mardi que six nourrissons palestiniens sont décédés à cause du froid glacial dans la bande de Ghaza, tandis que d’autres étaient dans un état critique. «En raison d’une vague de froid intense et du manque de chauffage, nous avons enregistré la mort de six nouveau-nés au cours de la semaine écoulée jusqu’à aujourd’hui (mardi)», a déclaré le porte-parole de la Défense civile, Mahmoud Bassal. Cinq des nourrissons sont décédés dans le nord de la bande de Ghaza, et le sixième est mort à Khan Younès, a-t-il précisé.

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