38 journalistes tués, une plainte déposée devant la Cour pénale internationale : Les journalistes de Ghaza ciblés

02/11/2023 mis à jour: 02:05
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C’est une guerre sans témoins et sans images que souhaite mener Israël, n’hésitant pas à cibler les journalistes de Ghaza et leurs familles dans le but d’instaurer ainsi un «black-out» médiatique. En 25 jours de bombardements massifs, 38 journalistes et professionnels des médias ont perdu la vie, selon un décompte du Syndicat des journalistes palestiniens publié mardi soir par l’agence palestinienne Wafa. Les domiciles d’au moins 35 journalistes ont été bombardés, entraînant la mort de dizaines de membres de leurs familles. 

Un acte qui soulève des questions troublantes sur la préméditation de ces attaques, notamment le ciblage de la famille du journaliste Wael Al Dahdouh, correspondant d’Al Jazeera, qui a perdu sa femme, deux de ses enfants et son petit-fils. 

Ces actes, d’une barbarie absolue, s’inscrivent dans une politique systématique visant à cibler et à tuer des journalistes palestiniens. Le Syndicat des journalistes a déclaré qu’environ 50 sièges et centres d’institutions médiatiques ont été bombardés, notamment  les bureaux du réseau Al Jazeera, de Palestine TV, du bureau de l’Agence française, du réseau médiatique Al Aqsa, de l’agence de presse Ma’an, de l’agence Sawa et de l’agence Shihab, le journal Al Quds, Radio Baladna et Zaman Radio, l’Agence nationale, l’Agence Khabar, le journal Al Ayyam, la société de services de médias événementiels, la Fondation Fadl Shanaa, la radio du Saint Coran, l’agence de presse Shams et le bureau de l’APA.

Face à ces attaques, l’organisation Reporters sans Frontières (RSF) a déposé une plainte pour «crimes de guerre» devant la Cour pénale internationale (CPI). La plainte détaille les cas de neuf journalistes tués depuis le 7 octobre et de deux autres blessés dans l’exercice de leurs fonctions. C’est, selon l’organisation, une démarche essentielle pour demander que justice soit rendue et que les responsables israéliens répondent de leurs actes. Le fait de tuer des journalistes alors qu’ils ne prennent pas part au conflit constitue un crime de guerre au sens des dispositions de l’article 8 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. 

L’organisation internationale ActionAid a également condamné l’assassinat de journalistes à Ghaza, considérant qu’il s’agit d’une grave violation du droit à la vie et à la liberté d’expression. Une centaine de reporters locaux et internationaux ont dû s’adapter à la réalité des bombardements incessants en installant des tentes dans la cour de l’hôpital Nasser à Ghaza. Ces tentes servent de salle de rédaction pour préparer les nouvelles, les photos et les vidéos pendant la journée, mais elles sont également utilisées comme abris pendant la nuit lorsque les bombes continuent de tomber.

Il est important de rappeler qu’au cours des années précédentes, l’armée israélienne a tué 55 journalistes palestiniens entre 2000 et 2023, selon le Syndicat des journalistes palestiniens. L’on peut citer notamment l’assassinat de la journaliste d’Al Jazeera, Shirin Abou Aqla, tuée alors qu’elle couvrait la prise d’assaut du camp de Jénine par les forces israéliennes, en Cisjordanie occupée, le 11 mai 2022. Vendredi dernier, des bulldozers israéliens ont détruit le mémorial de la défunte journaliste, à l’entrée du camp de réfugiés de Jénine, le vandalisant délibérément. Le Syndicat des journalistes palestiniens considère que les actes, qu’il juge «odieux» perpétrés à l’encontre des journalistes qui couvrent cette guerre, «sont le prolongement d’une politique systématique visant à cibler et à tuer des journalistes palestiniens». 

Il y a quelques jours – le 17 octobre –, le photojournaliste Roshdi Sarraj, travaillant pour Radio France et France télévision Le Monde, la BBC et beaucoup d’autres médias, écrivait sur X (anciennement Twitter) : «Nous essayons toujours de résister et de poursuivre la couverture afin que le monde puisse voir les crimes israéliens à Ghaza.»

 Il a été tué à son tour cinq jours plus tard dans une frappe israélienne, à son domicile, dans le quartier de Tel Al Hawa, à Ghaza City. A Ghaza, c’est la liberté d’expression même qui est bombardée. 

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