Tunisie : Le président Kaïs Saïed dénonce les réunions «illégales» du Parlement suspendu

30/03/2022 mis à jour: 08:18
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Photo : D. R.

Le président tunisien Kaïs Saïed a dénoncé les réunions «illégales» du bureau du Parlement, suspendu depuis son coup de force en juillet, qui visent selon lui à créer le «désordre» dans le pays secoué par une profonde crise politique. 

«Ce qui a été appelé réunion virtuelle est illégal parce que l’Assemblée (des représentants du peuple) est gelée ainsi que son bureau», a-t-il déclaré à l’ouverture lundi du Conseil de la sécurité nationale, dont l’enregistrement vidéo a été publié tôt hier sur la page Facebook de la Présidence, rapporte l’AFP. 

Après des mois de blocage politique, K. Saïed, élu fin 2019, s’est arrogé les pleins pouvoirs le 25 juillet en limogeant le Premier ministre et en suspendant le Parlement. 

Le Bureau de l’Assemblée des représentants du peuple, une instance qui regroupe la présidence du Parlement et des représentants des partis y siégeant, a organisé lundi une réunion en ligne et a décidé la tenue d’une séance plénière aujourd’hui pour examiner l’annulation des «mesures exceptionnelles» décidées par le président Saïed. Ces mesures lui permettent de gouverner par décret.

 Le bureau, présidé par le chef du parti d’inspiration islamiste Ennahdha, Rached Ghannouchi, n’a pas précisé si cette plénière aurait lieu en ligne ou dans son siège, fermé depuis le coup de force du Président. Il a également décidé la tenue d’une autre séance plénière samedi pour l’examen la situation financière et socio-économique «dangereuse» du pays. 

Pour le président Saïed, ces réunions ne sont que «des tentatives désespérées qui n’ont aucune valeur (...), des tentatives pour un coup d’Etat». «Ceux qui veulent le désordre dans l’Etat et ses institutions ou qui veulent s’entretuer, il y a des forces et des institutions qui les combattront», a-t-il mis en garde. Le Président a également de nouveau affirmé aux députés qu’ils peuvent se réunir «dans une navette spatiale».

Par ailleurs, 34 organisations locales et internationales ont appelé hier à la suspension d’un décret-loi présidentiel d’amnistie pénale en Tunisie en faveur d’auteurs de crimes économiques. 

«Le décret-loi de la réconciliation pénale instaure l’impunité et occulte la vérité», ont déploré dans un communiqué commun ces Organisations non gouvernementales (ONG) dont la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, Avocats sans frontières et l’Organisation mondiale contre la torture. 

La révélation de la vérité et les poursuites judiciaires sont les deux principes qui «garantissent la non-répétition des violations, surtout avec la propagation de l’impunité à tous les niveaux et dans les appareils de l’Etat», ont-elles ajouté. Appelant à suspendre ce texte, les ONG ont exprimé leurs «inquiétudes sur les répercussions de ce décret-loi sur la justice transitionnelle». 

Ce décret-loi dit de «réconciliation pénale», décidé par le président K. Saïed, a été publié le 21 mars dans le Journal officiel. Il vise à substituer aux poursuites judiciaires, condamnations et sanctions frappant ou dont sont passibles les auteurs de crimes économiques, «le versement de sommes d’argent ou la réalisation de projets nationaux, régionaux ou locaux». 

Le décret-loi concerne les personnes impliquées dans des crimes en relation avec l’argent public, la fiscalité, le blanchiment d’argent, la douane, le marché monétaire et les pots-de-vin. 

Une commission qui sera formée auprès de la présidence de la République sera chargée de la mise en œuvre de cette réconciliation pénale. Ses membres seront nommés par décret présidentiel.  

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