Par Khelifa Mahieddine, avocat
Une étude secrète datant de 1995, initiée par le Strategic Command, responsable de l’arsenal nucléaire stratégique des Etats-Unis, recommandait à certains membres du gouvernement fédéral de donner d’eux-mêmes, une image de gens irrationnels «apparaissant comme potentiellement fous, impossibles à contrôler pour contribuer à créer ou à renforcer les craintes et les appréhensions dans l’esprit de nos adversaires».
Durant la guerre du Vietnam, cette «théorie du fou» fut également préconisée par le président Richard Nixon pour que «les ennemis des Etats-Unis comprennent qu’ils ont en face d’eux, des cinglés au comportement imprévisible, disposant d’une énorme capacité de destruction. La peur les conduira ainsi à se plier aux volontés américaines».
Trump «maître des horloges» de l’État profond US
L’opinion généralement développée par les observateurs du monde occidental présente Donald Trump comme un «ennemi» de l’Etat profond US. Une simple analyse de la politique menée par les décideurs du complexe militaro industriel et financier depuis des décennies, permet de comprendre que depuis son premier mandat, la stratégie du Complexe a consisté à faire croire que Trump était imprévisible et incontrôlable. En réalité Trump a été intronisé par l’Etat profond US en véritable «maître des horloges» pour préserver la domination des USA sur la planète.
Durant son premier mandat, il lui fut assigné la mission de casser à la hussarde le Traité de Paris sur le climat qui limitait la capacité des États-Unis à décider de leur propre politique énergétique ainsi que l’Accord sur le programme nucléaire iranien, pour permettre à l’Iran de reprendre certaines activités nucléaires pouvant servir, dans le futur, «d’ennemi utile» ou «d’idiot utile» selon les besoins de la politique US. Tous les indicateurs de la vie politique US ont fait croire que Trump allait être éliminé de la course à la présidentielle par la mise en avant de ses frasques judiciaires, reprises en écho par la totalité des médias occidentaux.
En fait, il s’agissait d’un leurre entretenu par l’état profond allant jusqu’à «attenter à sa vie» dans une scène digne des films d’Hollywood pour en faire le héros martyr messianique investi d’une véritable mission divine qui lui a fait dire : «J’ai été sauvé par Dieu pour rendre à l’Amérique sa grandeur.» (Make América Great Again).
Ce slogan est un autre leurre puisque toutes les analyses du monde occidental s’accordent à reconnaître que les USA sont en déclin, alors qu’ils n’ont jamais été aussi puissants au travers les 800 bases militaires réparties à travers le monde et leurs 11 portes-avions qui sillonnent les mers avec leurs bâtiments d’escorte composés de croiseurs lance-missiles, destroyers, frégates, et sous marins d’attaque ainsi que des navires de soutien logistique et pétroliers ravitailleurs, appliquant en cela l’adage «Qui tient les mers tient le monde».
L’Allemagne : objectif caché de la guerre en Ukraine
La majorité des commentateurs politiques soutiennent que la Russie a gagné la guerre contre l’Ukraine et l’Otan. La réalité de cette opération, programmée par les anglo-américains dès 2005, avait pour but principal d’empêcher une alliance de fait entre l’Allemagne et la Russie. Les Anglo-Américains ont toujours craint une alliance, de quelque type que ce soit, entre ces deux pays.
Les provocations contre la Russie au niveau du maillon faible qu’est l’Ukraine, visaient plusieurs objectifs : Obliger la Russie à entrer en guerre contre l’Ukraine pour user ces deux pays dans une guerre fratricide et saisir cette occasion pour couper le lien commercial reliant l’Allemagne à la Russie en mettant un terme aux fournitures de gaz par le bais des pipes Nord Stream 1 et 2.
L’état profond US voyait en effet d’un très mauvais œil le réchauffement des relations commerciales entre la Russie et l’Allemagne. Dans une Europe où les barrières commerciales seraient assouplies, la confiance aurait favorisé l’expansion des échanges. Ce qui aurait rendu inutiles les bases militaires US et les systèmes d’armes et de missiles dirigés vers la Russie par l’OTAN. Ce n’est donc pas que le pipeline Nord Stream 2 que les Anglo-Américains ont saboté, mais un avenir entre partenaires commerciaux rendant possible un rapprochement entre l’Europe et l’Asie.
Cette relation aurait présagé une mise à l’écart graduelle des USA et une remise en cause d’un ordre mondial unipolaire dominé par les Anglo-Américains depuis 1945. Par leurs provocations répétées, les Anglo-Américains ont fait en sorte de présenter la Russie comme une menace pour la sécurité de l’Europe et Poutine comme un agresseur en qui il ne fallait pas faire confiance. Tout a été réfléchi et programmé pour inciter la Russie à une réponse militaire à ces provocations. Ce scenario avait pour but principal de rendre impossible le fonctionnement du gazoduc Nord Stream 2.
En ayant fait exploser ce gazoduc, les Anglo-Américains ont atteint l’objectif visé, à savoir creuser un fossé entre la Russie et l’Allemagne, fortement dépendante à 55% du gaz et à 40% de son pétrole. Il fallait empêcher à tout prix l’Allemagne de faire alliance avec la Russie. C’était là le véritable objectif de la programmation de la guerre en Ukraine. Ce sont donc les Anglo-Américains qui ont obtenu ce qu’ils cherchaient au prix de plusieurs centaines de milliers de morts et autant d’handicapés. Ce sont donc eux les vainqueurs de cette guerre.
Détacher la Russie de la Chine
Une fois l’objectif atteint, il ne fallait pas que le conflit provoqué devienne contre productif en poussant la Russie dans les bras de la Chine. S’il y a bien un pays qui menace à moyen terme l’hégémonie des USA sur la planète, c’est bien la Chine. En effet, de part les progrès considérables qu’elle réalise, qu’ils soient économiques, technologiques (Intelligence artificielle, télécommunication, informatique quantique et exploration spatiale, etc.) la Chine devient un concurrent très sérieux pouvant remettre en cause l’hégémonie exercée par les USA sur la planète.
C’est ce qui a poussé l’état profond US à changer son fusil d’épaule, en bouleversant complètement sa stratégie déployée depuis des décennies, pour faire croire qu’ils étaient les défenseurs de la «liberté et de la démocratie». La déclaration de Trump du 22 janvier 2025 est bien la preuve qu’il a été missionné par l’état profond US pour récupérer la Russie et la détacher de la Chine, son véritable adversaire : «Je ne cherche pas à causer des ennuis à la Russie. J’aime le peuple russe et j’ai toujours eu de très bonnes relations avec le président Poutine, cela malgré les fumisteries de la gauche radicale sur la Russie.
Nous ne devons jamais oublier que la Russie nous a aidés à gagner la seconde guerre mondiale, perdant 60 millions de morts. Tout cela étant dit, je vais faire à la Russie, dont l’économie s’effondre et au président Poutine une très grande faveur. Régler tout maintenant et arrêter cette guerre ridicule qui ne peut qu’aller de pire en pire...Il est temps de conclure un marché. Pas une vie de plus ne doit être perdue.»
Le «nettoyage» de l’état profond
Le retour de Trump a été orchestré par l’état profond US qui veut faire croire à l’ensemble de la planète qu’un bouleversement du système est en cours, voulu par un dirigeant incontrôlable et imprévisible. En réalité, cette remise en cause du système ne change absolument rien aux desseins que se sont fixés les USA pour contrôler le monde. La Chine avec son parti communiste, bien structuré et discipliné n’est en rien comparable à l’URSS des années Gorbatchev.
Il est donc impératif de ramener la Russie dans le camp occidental pour obtenir un encerclement complet de l’Empire du Milieu. Et pour faire croire en ce changement d’orientation radical, seul un personnage, forgé aux scènes Hollywoodiennes et présenté comme loufoque, est à même de remplir la mission de nettoyage des structures de l’état profond, à savoir entre autres, la CIA et son appendice l’USAID. Il est vrai que la CIA n’est pas une simple agence de renseignement.
C’est une machine de guerre qui a orchestré coups d’Etat, assassinats et manipulations à l’échelle mondiale pour servir les intérêts de Washington. Depuis les années 50, la CIA a renversé des dirigeants élus, imposé des régimes fantoches, sous couvert de «défense de la liberté et de la démocratie». Des pays comme l’Iran, le Chili, l’Afghanistan, l’URSS, la Serbie, le Congo, l’Irak, la Syrie, la Libye, le Liban, l’Ukraine etc, ont subi les conséquences directes de ses opérations clandestines.
Son influence ne connait aucune limite au vu des milliards de dollars dépensés par cette Agence pour déstabiliser des pays qui ne voulaient pas suivre la voie allant dans le sens de ce slogan de «défense de la liberté et la démocratie» prônée par les USA. Ces dernières décennies, la CIA a infiltré les géants de la technologie à travers son fonds d’investissement In-Q-Tel. Que ce soit pour Google, Windows, Facebook, Gmail, Yahoo, Amazon, Palantir, WhatsApp, Viber, Signal, etc., tous ont bénéficié d’investissements ou de collaborations avec l’Agence.
Derrière ces moteurs de recherche ou de communication, se cache un immense réseau d’espionnage et de collecte de données. Le contrôle de la Silicon Valley permet à la CIA de transformer la surveillance de la planète en un outil quotidien, où chaque individu, société ou institution étatique ou privée, devient une source d’information exploitable.
Des «journalistes» et «experts» à la solde de l’USAID/CIA
La CIA ne se contente pas de manipuler les régimes politiques ou de s’approprier les nouvelles technologies. Elle est le bailleur de fonds de la majeure partie des médias du monde occidental. Elle contrôle, à travers les centaines de millions de dollars l’USAID, la formation et le soutien de 6200 journalistes, aide 707 médias non étatiques et 279 organisations de la société civile (ONG) œuvrant pour soutenir «les médias indépendants et la libre circulation de l’information».
Ce sont principalement les journalistes du monde occidental et des experts de tout et de rien qui passent à longueur de journées sur les chaînes de désinformation continues qui, pour une poignée de dollars, sont prêts à se prostituer pour servir leurs maîtres. L’attaque menée par les organisations de la Résistance palestinienne a été révélatrice du degré de larbinisme dont ont fait preuve la quasi-totalité des médias de l’UE soutenus par leurs gouvernements respectifs vis-à-vis des massacres des femmes et enfants de Ghaza.
L’Union européenne qui a longtemps cru qu’elle représentait un ensemble qui compte aux yeux des USA, se rend compte aujourd’hui qu’elle n’est qu’un vassal, à qui on ne demande pas son avis sur des questions de stratégie globale. Les derniers événements l’ont rappelé à la dure réalité : l’UE n’est qu’un pion qu’on manipule au gré des circonstances.