L’envoyé américain au Moyen-Orient, Steve Witkoff, a déclaré, vendredi soir, que le Hamas n’est pas idéologiquement intraitable et que la guerre peut prendre fin par le dialogue. Il trouve «acceptable» que le mouvement de résistance rende ses armes, et ensuite, il pourra «peut-être y rester un peu, s’impliquer politiquement».
Dans un entretien sur une chaîne américaine, l’envoyé de Trump parle de «signes positifs», dans les négociations pour un cessez-le-feu, du plan reconstruction de Ghaza, de la reprise de la guerre par Israël malgré l’opposition de l’opinion publique israélienne et du nouveau groupe de pays sur le point de normaliser ses relations avec Israël.
Dans un entretien accordé à Tucker Carlson, l’un des animateurs les plus célèbres aux Etats-Unis, l’envoyé américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, a parlé des intentions et des motivations d’Israël, du mouvement de la résistance palestinienne Hamas, en levant le voile sur des détails de ses négociations pour la première phase de l’accord de cessez-le-feu, puis évoqué le Qatar, qu’il a longuement défendu, au même titre que le nouveau président syrien, Ahmed Al Charaa, différent, a-t-il déclaré, du chef d’Al Qaïda qu’il était, avant d’affirmer que la question du nucléaire iranien ne peut être résolue que «diplomatiquement».
Très critiqué par les alliés d’Israël, qui lui reprochent d’inviter sur son plateau des pro-Palestiniens, Tucker Carlson a été très direct dans ses questions et n’en a laissé aucune sans réponse de son invité. Il a commencé son interview par la mission de Steve Witkoff au Moyen-Orient, qui souligne que son travail «l’oblige à comprendre les motivations des différents acteurs avec lesquels je m’engage».
Sur la question de savoir ce que veut le Hamas à Ghaza, Witkoff répond : «Je pense qu’ils veulent rester là-bas jusqu’à la fin des temps. Ils veulent diriger Ghaza, et c’est inacceptable. Nous devions le savoir… Ce qu’ils veulent est inacceptable.» Selon lui, «ce qui nous paraît acceptable, c’est qu’ils se démilitarisent.
Ensuite, ils pourraient peut-être y rester un peu, s’impliquer politiquement». Witkoff lève le voile sur les intentions de son pays, en disant : «Nous ne pouvons pas laisser une ''organisation terroriste'' diriger Ghaza, car cela serait inacceptable pour Israël», du fait qu’il craint que «nous reverrions alors exactement les mêmes expériences : tous les cinq, dix ou quinze ans, nous aurons un autre 7 octobre».
«Je ne pense pas que le Hamas soit fermé idéologiquement»
Sur les négociations avec le Hamas, Witkoff précise que celles-ci ne se faisaient pas directement avec les dirigeants du mouvement de résistance, mais plutôt par l’intermédiaire du Qatar en tant que médiateur. Il qualifie les images qu’il a vues lors de sa première visite en Israël, sur l’attaque du 7 octobre «d’horribles» et d’ «inédites» et expliqué : «Cela peut influencer votre perception du Hamas. Parfois, en tant que négociateur, il faut faire preuve de sang-froid.
Ce n’est pas facile de prendre des décisions si l’on voit ces images, mais j’ai dû les voir. On ne peut pas ignorer la réalité de ce qui s’est passé le 7 octobre.» Witkoff ajoute : «Ils vous diront qu’ils ont des justifications, mais il n’y en a aucune pour ce qui s’est passé ce jour-là.»
Witkoff revient plus loin sur le Hamas en déclarant : «Il faut savoir ce que veut le Hamas et ensuite il faut déterminer ce que l’on peut leur donner pour leur permettre de partir, car c’est ce dont on a besoin ici.» Acculé par le journaliste qui insiste sur les motivations du Hamas, Witkoff se montre plus réaliste. «Ce que nous avons entendu au début de ce conflit, c'est que le Hamas est idéologique, qu'il est prêt à mourir pour toutes sortes de raisons.
Personnellement, et j'en ai parlé au Président. Je lui ai dit : ''Je ne pense pas qu’ils soient aussi enfermés idéologiquement. Ils ne sont pas intraitables''. Je n’y ai jamais cru. Ils attachent des gilets explosifs à des jeunes qui ne savent pas ce qu’ils font. Ils leur racontent une histoire.
Une fois que vous avez compris qu’il voulait vivre, vous avez pu leur parler de manière plus efficace.» Cette rationalisation dans sa vision sur le Hamas, Witkoff l’explique par la lecture de «nombreux rapports des services de renseignement américains» mais aussi par le «rythme et la cadence des négociations». «C’est à ce moment-là que j’en suis arrivé à la conclusion qu’ils voulaient des alternatives», dit-il à l’animateur.
«Les frappes israéliennes sont à certains égards regrettables»
Interrogé sur la possibilité de revenir au cessez-le-feu, Witkoff s’est montré optimiste. «Il y a eu des signes», affirme-t-il. Après avoir soutenu la décision de reprise de la guerre par Israël, Witkoff explique à l’animateur que «l’intervention israélienne est, à certains égards, regrettable» et relève de la catégorie des «choses à faire absolument», puis rappelle avoir «averti les dirigeants arabes lors d’une réunion à Doha la semaine dernière» sur la réponse du Hamas et les risques d’un retour à la guerre, qu’elle peut entraîner.
A la question de savoir s’il était informé de cette reprise de la guerre, Witkoff surprend l’animateur en déclarant : «Je ne le savais pas avant que les Israéliens n’interviennent.» Une déclaration qui contredit celle de la secrétaire de presse de la Maison-Blanche, Karoline Leavitt, selon laquelle Israël avait consulté les Etats-Unis avant de mettre fin au cessez-le-feu à Ghaza. Witkoff tente, cependant, d’arrondir les angles, en affirmant : «Nous pourrions peut-être utiliser cela pour amener le Hamas à être beaucoup plus raisonnable.»
Il révèle néanmoins que malgré le retour à la guerre, «nous sommes actuellement en négociation pour peut-être mettre un terme à certaines de ces frappes israéliennes et peut-être mettre fin à ce conflit par le dialogue». Une affirmation qui contredit le démenti du Hamas sur toute reprise des pourparlers.
Witkoff pousse son optimisme jusqu’à préciser : «Si je n’ai pas le sentiment que nous pouvons y parvenir, pourquoi perdrais-je mon temps ? » L’animateur demande à Witkoff s’il comprenait le plan d’Israël pour Ghaza après la guerre, parce que, précise-t-il, tous les responsables la région auxquels il a posé cette question n’ont pas de réponse.
Visiblement un peu gêné, Wtkoff répond : «Eh bien, je pense que c’est compliqué.» Il marque une pause de quelques secondes puis se ressaisit et se met à féliciter le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, pour ses réalisations contre le Hezbollah, le Hamas et l’Iran.
«Ce croissant iranien… dont tout le monde pensait qu’il allait être efficace, a été en grande partie éliminé (…) Netanyahu a fait un travail exceptionnel à ce niveau. Mais on lui reproche de se préoccuper davantage du combat que des otages», déclare Witkoff, en ajoutant : «Je pense que Bibi estime qu’il fait ce qu’il faut. Mais, je pense aussi qu’il se heurte à l’opinion publique, parce que l’opinion publique veut que ces otages rentrent chez eux.»