Smaïl Chertouk. Ingénieur et auteur : «J’ai valorisé la société et le patrimoine algériens»

26/11/2024 mis à jour: 08:46
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Smaïl Chertouk et Sarah Handala ont récemment publié à compte d’auteur en France  L’Algérie, tu l’aimes ou tu la kiffes !, abécédaire amusé de l’Algérie, un livre illustré publié aux éditions Day Z. Rencontré lors d'une vente-dédicace au niveau du stand du magazine Salama à l’occasion du 27e Salon international du livre d’Alger, qui s’est tenu dernièrement aux  Pins Maritimes de la Safex, l’auteur Smaïl  Chertouk nous dit tout sur cet abécédaire avec ce souhait de voir  son ouvrage publié prochainement en Algérie.

 

Propos recueillis
Par Nacima Chabani

 

 

Comment est né ce projet d’abécédaire englobant des mots, rehaussé d’illustrations ? 

Avant tout, je dirai que l’un des objectifs de mon l’écriture, c’est que j’ai travaillé, à la fois, sur les mots inventés, les néologismes et le vocabulaire. Tout ce que les mots et les maux disent dans une société. Et en même temps, il faut dire que je suis attaché à l’Algérie et aux Algériens. Je suis né en Algérie. Je suis même passionné par le sujet Algérie. Pour une fois, je voulais joindre mes deux passions dans un livre : les mots et l’Algérie. Cet abécédaire traite des mots qu’on utilise dans la rue algérienne. Des mots qui décrivent le mieux la société algérienne. J’ai valorisé la société et le patrimoine algérien. J’avais envie de réaliser ce livre depuis un moment pour exprimer ma passion et mon amour pour l’Algérie. On part ailleurs dans le monde mais on ne quitte pas l’Algérie. Notre pays habite en nous. Nous avons mis peu de temps pour réaliser ce livre. Comme j’avais l’idée bien ancrée dans ma tête, nous avons mis neuf mois entre la genèse et le bouclage de l’ouvrage en question.

Comment s’est faite l’approche artistique avec l’illustratrice Sarah Handala ? 


En fait, quand j’avais formalisé le sujet, je voyais l’ossature et tout le reste. Je me suis dit avec qui je pouvais travailler. Et naturellement, je me suis tourné vers Sarah Handala qui est une illustratrice algérienne qui vit en France. Elle est très douée et a une grande singularité artistique. C’est quelqu’un qui est très engagé. Elle est attachée tout comme moi à l’Algérie. A partir de là, c’est devenu notre projet à deux. Nous avons travaillé avec une grande complicité, même si mon territoire était les mots et le sien était l’illustration. Cela s’interpénétrait énormément. Il y avait une réelle symbiose entre nos deux travaux.


Comment s’est fait le choix des nombreux thèmes abordés ?


Il faut savoir que le livre en question est composé de deux parties distinctes : de mots et de patrimoine. Dans la première partie, on retrouve les mots du quotidien que les Algériens inventent. Cela peut être «Intik», «Normal», «Hogra», ou encore «Papicha». Ces mots ne sont pas expliqués mais chroniqués. Dans la seconde partie, c’est le patrimoine algérien au sens global qui est abordé. C’est le patrimoine au sens humain : Ce sont les vestiges et les lieux. On retrouve, aussi, entre autres, certaines figures vivantes de la culture algérienne. C’est ce que l’Algérie a versé et verse au patrimoine humain. Il y a des excellences en Algérie et dans le monde. Il y a des lieux et des histoires incontournables en Algérie. Au début, je voulais partager entre Algériens ce que nous avons, ce que nous avons apporté à notre quotidien mais très vite, je me suis rendu compte que cet abécédaire parle au nom de l’Algérie parce qu’il leur présente notre beau pays. Parfois, ce livre déconstruit un certain nombre de clichés qu’on a sur l’Algérie et surtout, il leur donne une carte postale et une carte de visite. A travers la publication de cet ouvrage, je veux susciter l’envie de découvrir ou de redécouvrir l’Algérie chez certains Algériens qui méconnaissent parfois leur pays, quand ils sont ailleurs dans le monde. Et bien sûr, chez les étrangers. J’ai picoré de cette Algérie plurielle très vaste pour dire au monde, pour ceux qui ont des clichés, sortez de vos clichés et découvrez l’Algérie. 


Le corpus choisi se décline beaucoup plus sous la forme d’une sociologie des gens ?

Effectivement, je touche du doigt le quotidien des Algériens. Je trouve que l’une des meilleures manières, de prendre le pouls d’une société. C’est de savoir comment parle cette société ? Comment elle évolue dans la cité ? Commet est décrit son quotidien ? Quel recul, on peut avoir sur les choses ? Quel mot, on va inventer pour qualifier quelque chose qui est nouveau ? Je trouve que cela dit beaucoup de choses aux gens. 
C’est pour cela que j’ai abordé mon ouvrage par cet angle-là. J’ai utilisé un prisme pour faire passer tout cela. C’est un peu mon vécu. En effet, mon vécu a été pour beaucoup, sachant qu’il y a beaucoup d’anecdotes personnelles, vécues par moi-même et par des gens autour de moi.

A travers cette floraison de mots, vous malaxez les langues avec un véritable bonheur ?


Je ne vous apprends rien. L’Algérien joue avec beaucoup de langues. L’Algérien s’approprie les langues et s’en amuse en même temps. Il les pousse plus loin. C’est ce que les Algériens font, aussi, avec la langue française. Il se l’approprie, la pousse plus loin. Ils l’inventent. Pour moi, aujourd’hui, il y a un français, inventé par les Algériens. D’abord, il y a une grande maîtrise de la langue française chez les Algériens. Il y a une inventivité et un style Algérie.


Le mythe a joué, aussi, un grand rôle dans votre travail ?

Le mythe est très important pour moi. Il y a des mythes fondateurs qui sont quasiment importants. La réalité, vécue est palpable. Cela dit beaucoup sur nos imaginaires, dont notamment dans la manière on se projette. Je me suis dit, je vais prendre ces mots, je vais les chroniquer, les expliquer, laisser faire mon imaginaire et les accompagner d’illustrations.


On sent beaucoup de nostalgie dans votre abécédaire? 

Elle y est. Elle est même assumée cette nostalgie. Elle est inhérente au concept de l’exil. Nos aînés quand ils parlaient d’exil, on souriait presque. Pour ma part, je souriais. Maintenant, je connais l’enjeu de l’exil. Je lui donne toute son épaisseur au mot. Et je sais le prix à payer quand on s’éloigne de son centre de gravité. Le bénéfice, c’est de découvrir les autres, le monde, et d’enrichir les siens. Et donc, de partager sa culture. Le prix à payer, c’est l’exil. Donc, son empreinte, sa conséquence, c’est la grande nostalgie.

Votre ouvrage, L’Algérie, tu l’aimes ou tu la kiffes !, abécédaire amusé de l’Algérie, est en vente sur la plateforme numérique Amazon. A quand une édition en Algérie ?


Ce livre a été publié à compte d’auteur en France. Il est distribué par Amazon. Je suis en train de regarder comment installer le livre dans le contexte algérien. En France, mon livre a eu un très bel accueil de la part des Algériens et des étrangers. Il est vendu entre autres en Algérie, en France, au Canada et au Royaume-Unis. Il est important pour moi et Sarah Handala que ce livre soit disponible en Algérie. Il y a une grande attente chez les Algériens et sa diaspora à l’étranger. J’espère qu’il sera bientôt disponible sur les étals des libraires algériens.


Avez-vous d’autres textes dans vos tiroirs ? 

D’abord, je voudrais dérouler le fil de cette histoire la pousser un peu plus loin. Dans cet abécédaire, on part à la découverte de l’Algérie. Cela m’a tellement été dit que j’ai pris cette idée au mot. Partir à la découverte de l’Algérie et de l’Algérien. 

Cela est en train de nous inspirer Sarah et moi pour la suite de ce livre. Quand je parle de suite, je fais allusion à une seconde édition augmentée. Parmi mes autres projets : j’écris sur le théâtre. D’ailleurs, je suis en train de proposer quelques textes à des dramaturges algériens. Sans prétention aucune, je suis en train d’avancer dans le théâtre dramatique et dans d’autres choses un peu plus légères. Je voudrais également éditer de la poésie. Je travaille, aussi, sur un roman.

Comme je suis quelqu’un de désordonné, j’écris tout en même temps. Je m’éparpille après, je me ramasse. Je n’arrive pas à écrire sur un seul projet d’une manière méthodique. L’écriture est ma deuxième vie. Etant ingénieur de formation, je travaille dans le conseil de l’innovation. Par ailleurs, j’ai publié pas mal d’essais sur les nouvelles technologies et sur le couple. 

 

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