Selon les Nations Unies : Le conflit du Soudan est «encore plus dangereux pour les civils»

18/01/2025 mis à jour: 23:45
446
Des rapports ont fait état de civils pris pour cible en raison de leur appartenance ethnique

Le haut commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Volker Türk, a déclaré hier que le conflit au Soudan devient «encore plus dangereux pour les civils», après la mort de plus d’une douzaine de personnes dans des attaques à caractère ethnique contre des groupes minoritaires dans l’Etat central d’Al Jazira, rapporte l’AFP. 

La guerre, qui oppose l’armée aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) depuis avril 2023, «prend une tournure encore plus dangereuse pour les civils», a-t-il indiqué sur le réseau social X, ajoutant qu’il existe «des preuves de crimes de guerre et d’autres atrocités». L’armée soudanaise a mené une offensive cette semaine sur Al Jazira, reprenant la capitale de l’Etat, Wad Madani, aux FSR. Des groupes de défense des droits de l’homme ont déclaré lundi qu’au moins 13 personnes, dont deux enfants, ont été tuées dans des attaques à caractère ethnique contre des communautés minoritaires dans cet Etat agricole. 

Bien que les FSR soient blâmées pour leurs violences ethniques, des rapports ont également fait état de civils pris pour cible en raison de leur appartenance ethnique dans les zones contrôlées par l’armée. 
Par ailleurs, interrogée hier à Genève sur des accusations américaines concernant l’utilisation par l’armée soudanaise d’armes chimiques, la porte-parole du Commissariat aux droits de l’homme, Ravina Shamdasani, a répondu : «Ces rapports sont très inquiétants, très préoccupants, et ils nécessitent une enquête plus approfondie.» «L’utilisation d’armes chimiques est explicitement interdite par le droit international. Nous continuerons de recueillir les preuves disponibles», a-t-elle souligné. 

Et d’observer : «Notre propre bureau, dans les limites de son accès, n’a pas spécifiquement documenté l’utilisation d’armes chimiques pendant ce conflit au Soudan. Ce que nous avons documenté, c’est l’utilisation d’armes extrêmement lourdes dans des zones peuplées au cours de ce conflit, y compris l’utilisation de frappes aériennes dans des zones densément peuplées, sur des marchés. 

Cela doit donc cesser.» Jeudi, les Etats-Unis ont annoncé des sanctions contre le chef de l’armée soudanaise, le général Abdel Fattah Al Burhane, quelques jours après avoir pris une mesure similaire contre le chef des paramilitaires, reconnaissant leur impuissance à mettre fin au conflit qui ravage ce pays. 

Sanctions américaines

«Les membres des Forces armées soudanaises, sous la direction d’Al Burhane, ont continué à commettre des atrocités, notamment en prenant pour cible des civils et des infrastructures civiles, et en exécutant des civils», a déclaré le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, dans un communiqué. «Les Forces armées soudanaises ont violé le droit international humanitaire (...), utilisé la privation de nourriture comme tactique de guerre et obstrué les efforts de paix», a-t-il poursuivi. La semaine dernière, A. Blinken a établi que les FSR, ont commis un «génocide» et annoncé des sanctions contre leur commandant, Mohamed Hamdan Daglo. «Prises ensemble, ces sanctions soulignent l’opinion des Etats-Unis selon laquelle aucun des deux hommes n’est apte à gouverner un futur Soudan pacifique», a dit A. Blinken. Il a cependant souligné que «les Etats-Unis restent déterminés à demander des comptes aux responsables des atrocités commises au Soudan et à soutenir une transition démocratique et civile». 

Dans un communiqué, le ministère soudanais des Affaires étrangères, aligné sur l’armée, a qualifié d’«immorales» les sanctions contre Abdel Fattah Al Burhane, estimant que Washington «soutient ceux qui commettent un génocide» sous couvert de neutralité. Ces sanctions «expriment seulement de la confusion et un faible sens de la justice», estime le ministère, pour qui le général Al Burhane «défend le peuple soudanais contre un complot génocidaire» dans cette sanglante guerre civile. Engagés dans des tentatives de médiation au Soudan, les Etats-Unis se sont gardés jusque-là de sanctionner la plus haute hiérarchie de l’armée soudanaise. 

A quelques jours de la fin de mandat de l’administration Biden, lundi, Antony Blinken a exprimé de «vrais regrets» de ne pas avoir réussi à mettre fin au conflit. Il a dit espérer que l’administration du président élu Donald Trump continuera d’essayer de le faire. «C’est pour moi, oui, un autre vrai regret qu’en ce qui concerne le Soudan, nous n’ayons pas été en mesure, sous notre mandat, d’atteindre ce genre de succès», a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse d’adieu, faisant référence à l’accord de cessez-le-feu dans la bande de Ghaza. Il y a eu «quelques améliorations dans l’acheminement de l’aide humanitaire grâce à notre diplomatie, mais pas de fin au conflit, pas de fin aux abus, pas de fin à la souffrance des gens», a-t-il dit dans un rare aveu d’impuissance. 

«Nous continuerons à travailler sur ce dossier pendant les trois prochains jours, et j’espère que la prochaine administration s’en chargera également», a-t-il dit. Outre les sanctions visant le général Al Burhane, le Trésor américain a également annoncé jeudi des sanctions à l’encontre d’Ahmad Abdalla, un ressortissant soudano-ukrainien accusé de fournir des armes à l’armée soudanaise, et de la société Portex Trade Limited, basée à Hong Kong. 

Les sanctions américaines ont pour effet de geler les avoirs éventuels aux Etats-Unis des personnes concernées et d’interdire toute transaction avec elles. 

 

Copyright 2025 . All Rights Reserved.