Reportage - Association Waha d’aide aux malades du cancer à Constantine : Des expériences de solidarité à valoriser

24/02/2025 mis à jour: 13:34
1633
Des rencontres ont été organisées pour informer sur les réalités du cancer dans la wilaya - Photo : D. R.

Une première initiative a été lancée en ce mois de février pour partager, sensibiliser et impliquer les citoyens à la nécessité et l’importance de lutter contre cette maladie.

L’association Waha d’aide aux malades du cancer dans la wilaya de Constantine, dont la création remonte au mois de novembre 2011, vient d’organiser en ce mois de février la première édition de la quinzaine de solidarité contre le cancer.

Cet événement inédit dans l’histoire de cette association, qui avait fait ses preuves à travers les multiples actions menées au profit de cette catégorie, depuis sa création il y a 13 ans, s’est déroulé du 1er au 15 février à Dar Waha, à l’UV18 de la nouvelle cille Ali Mendjeli, et un peu partout dans la wilaya de Constantine avec pour but de «partager, sensibiliser et impliquer les citoyens à la nécessité et l’importance de lutter contre cette maladie».

Lors de cette manifestation dénommée «Waha Solidarité», de nombreuses activités ont été organisées, dont des conférences et des journées portes ouvertes pour faire connaître au public le travail quotidien accompli par les équipes de bénévoles et membres de cette association.

Les organisateurs ont également tenu à faire participer des spécialistes en médecine ayant apporté les témoignages de leur expérience avec les malades, en partageant les connaissances et tout ce qui concerne le traitement, la prévention et la vie après la maladie, avec l’accompagnement de psychologues à Dar Waha.

Des séances d’écoute, d’activités physiques, d’arthérapie, entre autres, ont été proposées aux malades pour les aider à mieux gérer le stress lié à la maladie. Un soutien aux patients et à leurs proches a été assuré durant toute cette quinzaine, même s’il a toujours fait partie des missions de Waha.

Notre visite durant les derniers jours de cet événement au siège de l’association, se trouvant dans un cadre paisible et agréable, a coïncidé avec la tenue d’une rencontre d’évaluation des activités de cette initiative dans une ambiance conviviale autour d’une table de café, de thé, de dattes et de confiseries. Il s’agissait de faire le point sur les possibilités de développer cette opération à l’avenir avec la participation de nouveaux partenaires, notamment les associations d’aide aux malades du cancer des autres wilayas.

14 500 heures de travail bénévole

«C’est la première fois qu’une telle opération est organisée par notre association ; nous étudions les points positifs à valoriser et les points négatifs à éviter dans les prochaines éditions. Cette initiative est devenue indispensable dans l’action que nous menons depuis 13 ans ; il y a beaucoup d’idées à développer, notamment en matière de partenariat avec les associations nationales qui militent au profit des malades du cancer ; nous examinons de partager notre programme sur d’autres wilayas où il n’y a pas d’associations activant dans ce volet ; notre rôle est la sensibilisation pour faire bouger le secteur de la santé», ont affirmé des membres de l’association Waha, présidée par Ahmed Zemouli.

Ce dernier a assuré que Waha continue d’activer «grâce aux mille et un petits et grands gestes, des bénévoles, des généreux donateurs, des citoyens anonymes qui, chaque jour, nous donnent la preuve que la solidarité n’est pas un vain mot dès lors qu’elle rencontre une volonté sincère à servir une bonne cause».

Il ne manquera pas surtout de souligner le rôle important du bénévolat dans l’action de cette association. «Pour accueillir, écouter, entendre, informer, orienter, accompagner et aider les 1762 citoyens, dont 839 patients, qui ont franchi la porte de Waha et les portes des résidences d’hébergement durant cette année 2024, cela a nécessité, un minimum de 14 500 heures de travail bénévole».

A Waha, on a toujours pensé à aider les familles face à l’énorme fardeau financier que représente le cancer, nécessitant un important budget pour les examens et les soins médicaux. «Durant l’année 2024, plus de 100 conventions de solidarité citoyenne avec des centres d’imagerie, des laboratoires d’analyses médicales et des cabinets spécialisés ont permis à des malades du cancer de bénéficier de 3638 actes d’imagerie, d’analyses et de consultations médicales», a souligné le président de Waha.

Un document de l’association Waha, dont El Watan a reçu une copie, a révélé un état des lieux inquiétant sur le cancer dans la wilaya de Constantine. Il est à noter que cinq cancers tous sexes confondus sont les plus fréquents (le sein, le colorectal, le poumon, la thyroïde et le lymphome). On saura ainsi par les chiffres que sur la période de 2013 à 2019, l’on a recensé 9396 nouveaux cas tous sexes confondus, âgés de 15 à 90 ans, soit une moyenne de trois à quatre cas diagnostiqués par jour.

Le document évoque des prévisions d’augmentation des cas de moins de 1000 nouveaux cas en 2013 à presque 3500 nouveaux cas en 2034. Cela veut dire qu’on passera de 3 à 4 nouveaux cas diagnostiqués par jour en 2013 à presque 10 nouveaux cas en 2034. Ce qui est vraiment alarmant, notamment pour le cancer du sein qui demeure le plus répandu actuellement à l’échelle nationale.

Le nombre de femmes nouvellement atteintes de cette pathologie devra passer de 7 à 8 cas diagnostiqués par semaine en 2019 à 22 cas par semaine en 2034. Pour le cas du cancer colorectal, qui connait lui aussi une sérieuse évolution dans la wilaya de Constantine, le rapport indique que le nombre de personnes atteintes devra passer de 4 par semaine en 2019 à au moins douze par semaine en 2034.

Parmi les causes de cette progression inquiétante, le document cite en plus de l’âge et des facteurs génétiques, les changements du mode de vie des Algériens, marqué surtout par la malbouffe et les mauvaises habitudes alimentaires, conjuguées à la sédentarité, le tabagisme et les risques environnementaux, alors que l’abandon de l’allaitement maternel est avancé pour justifier la hausse des cas du cancer de sein.

Pourtant, dans ses nombreuses campagnes de prévention lancées depuis plusieurs années, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a donné des indices optimistes en indiquant que 40% des cancers sont potentiellement évitables à condition d’éviter les facteurs de risque, tout en insistant sur l’importance capitale du diagnostic et du traitement précoces permettant la guérison ou un taux élevé de survie, notamment pour le cancer du sein, le colorectal et ceux du col utérin et de la prostate.

Projet d’un hôpital pour enfants en instance

Le travail d’information en direction des malades, leur famille et les citoyens représente l’une des principales missions à l’association Waha, surtout que beaucoup de choses demeurent inconnues sur le cancer. L’accent est mis sur l’importance pour le malade de connaître sa maladie et les effets des différents types de traitements, mais surtout de casser les tabous et les complexes qui lui sont liés. Une formation sur les notions basiques est assurée aux bénévoles, ce qui leur permet de savoir communiquer avec les malades.

«Quand nous accueillons pour la première fois des femmes atteintes du cancer du sein, qui représente la principale pathologie enregistrée à Waha, elles ne veulent pas parler de leur maladie, considérée comme un tabou ; mais avec le temps et le soutien psychologique qu’on leur assure, elles commencent à sortir de leur isolement et parviennent à partager leurs soucis avec les autres femmes hébergées avec elles, en se réunissant ensemble et en mangeant les repas sur la même table ; elles finissent par accepter leur maladie et suivre leur traitement avec courage ; ce qui leur donne cette assurance pour supporter les effets du traitement, mais une fois leur séjour terminé, ils nous demandent si elles pourront rester encore, car elles ont vraiment ressenti l’ambiance familiale à Waha, ce qui montre que le travail accompli a porté ses fruits et nous encourage à continuer», témoigne Ahmed Zemouli.

Interrogé sur le sens de la dénomination Waha, notre interlocuteur l’a expliqué en quelques mots : «Quand une personne se retrouve seule dans le désert et qu’il ne lui reste que quelques gouttes d’eau dans la bouteille, son seul espoir est de trouver une source d’eau pour se maintenir en vie ; Waha est cette source d’eau pour les malades du cancer». Aujourd’hui, le principal objectif des membres et des fondateurs de Waha est la concrétisation du projet d’un hôpital spécialisé dans la prise en charge des enfants atteints du cancer.

«Tout est prêt pour la réalisation de ce projet, surtout que l’assiette est disponible juste à proximité de Dar Waha, et toutes les commodités nécessaires, dont l’électricité, le gaz et l’eau existent. L’étude technique est également prête, mais le projet est toujours en instance pour des raisons qu’on ignore, bien que nous ayons obtenu l’accord de principe de la part des services de la wilaya en 2019.

Depuis nous attendons toujours. Pourtant, ce projet sera un véritable acquis pour la wilaya de Constantine, comme ce fut le cas pour l’association El Badr d’aide aux malades du cancer à Blida qui a réussi à concrétiser ce projet qu’elle avait proposé à la même époque que l’association Waha, et qui est actuellement en service, alors pourquoi ne pas faire de même dans la wilaya de Constantine ?», s’interroge Ahmed Zemouli.

Copyright 2025 . All Rights Reserved.