Rencontre Artistique à Artissimo Hub à Alger : Un regard croisé entre Aghilès Issiakhem et Will Berry

12/06/2024 mis à jour: 01:57
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Aghilès Issiakhem (à gauche) en campagnie de Michel Blancsubé et de Will Berry

L’artiste  peintre Aghilès Issiakhem et l’artiste américain  Will Berry se sont retrouvés, lundi en fin de journée, au niveau de l’espace Artissimo Hub à Alger,  pour parler de leurs propres parcours artistiques et se prêter au jeu du commentaire de l’œuvre de l’autre sous la modération de Michel  Blancsubé, commissaire de l’exposition de Will Berry. 

Comme à son  accoutumée, l’espace  Artissimo à Alger a accueilli une assistance nombreuse composée de Son Excellence l’Ambassadeur du Mexique en Algérie,  José Ignacio Madrazo, de l’attaché culturel de l’ambassade du Mexique en Algérie, Adolfo Ayuso-Audry, d’artistes algériens et d’anonymes. Cette rencontre, née d’un partenariat avec l’ambassade du Mexique en Algérie,  intervient, faut-il le rappeler, en marge de l’exposition qui se tient jusqu’au 7 juillet prochain au  musée des Beaux-Arts d’Alger. Artissimo Hub a imaginé une rencontre naît du désir de l’artiste  américain  Will Berry, installé  au Mexique, de rencontrer des artistes algériens. 

Ainsi, ces  deux artistes peintres, issus de deux  univers différents, ont cette même passion pour les arts plastiques. Will Berry est un artiste mexicain, d’origine américaine, installé au Mexique depuis 2002. Il est très attaché à la matiére. Il se plaît, d’ailleurs, à se familiariser à toutes sortes de matières en les détournant de leur  fonction première. Will Berry indique qu’il a utilisé récemment de l’oxyde de fer dont l’Etat mexicain se sert dans la construction pour colorer le ciment en rouge. Notre artiste  académicien mexicain  utilise, justement, cet oxyde pour faire des peintures sur des feutrines sur plusieurs  centimètres  d’épaisseur.  S’il  utilise des matières à l’état brut,  pour sa part, l’artiste peintre algérien  Aghilès Issiakhem est un autodidacte par excellence. 

Il est plus dans le figuratif en peignant des portraits et des autoportraits saisissants et expressifs à la fois. Son inspiration découle, parfois, des gens qu’ils croisent dans la rue ou encore dans les cafés. Il a ce don de pénétrer sous la sinuosité des traits des visages. Will Berry fréquente, lui aussi, les cafés le matin. Il utilise les serviettes en papier et  commence à exercer sa main en  gribouillant des dessins. 

Comme le dit si bien le modérateur Michel  Blancsubé,  c’est un dialogue entre  le cerveau et la main de l’artiste. «C’est un peu son petit atelier ambulant. Ses dessins vont naître après des œuvres plus monumentales.» Will Berry a été influencé par l’habilité de sa  mère au  dessin. Ce qu’il l’a réveillé, aussi à  l’art, c’est son attachement à la nature, aux arbres et aux chants des oiseaux qui l’entouraient. Il indique que le fait  d’avoir déménagé au Mexique lui a permis d’accéder à un espace et  à une nouvelle  lumière qu’il ne connaissait pas auparavant, lui ouvrant des horizons insoupçonnés. Notre orateur  indique qu’il travaille sur le thème  du serpent depuis sept ans. 

Ce dernier  est très présent dans la culture et mythologie  mexicaines.   Depuis  trois ans, il travaille  avec des céramistes mexicains en reproduisant  des têtes et des queues  de serpents. Il a même réalisé un prototype en pierres volcaniques qui s’est rompu en deux et duquel il a sorti un gabarit qu’il a reproduit en céramique. Il s’est amusé à orienter les ondulations du corps en plusieurs directions pour pouvoir s’offrir la possibilité de construire de grandes fresques sans direction univoque. C’est du moins ce qu’il explique avec passion. «J’aime, dit-il, les serpents  verts qui se trouvent dans le Tennessee. C’est une force de vie qui traverse  l’histoire de l’humanité depuis le néolithique. 

J’identifie le serpent comme une sorte de vie, de soleil qui se projette du soleil à la terre. Ce  qui m’intéresse dans  le serpent, c’est  la présence de la symbolique. Il  y a un ordre du monde. Cette force de vie du serpent est encore active  en Asie et en Afrique. Elle a subi des transformations au fil du temps», ajoute-il.  Depuis sept ans, ans, Will Berry se plaît à travailler avec du noir et du blanc et aussi avec de l’oxyde. Petit à petit, la couleur reprend de la présence dans son création.

Le travail d’Aghilès Issaikhem repose, quant à lui, sur du ressenti et de l’introspectif avec un contraste en profondeur. Portraitiste dans l’âme et perfectionniste, Aghilès Issiakhem adore travailler à partir de noirs et blancs différents qu’il creuse pour jouer sur les diverses nuances.  Il use d’une technique mixte avec comme médium le fusain, le charbon et la pierre noire. 

Il se sert aussi d’autres  supports tels que l’échographie de sa petite fille ou encore une des portières de la  Citroën 2 CV de son défunt oncle Tayeb. L’ensemble de ses œuvres se caractérise par une superposition de lignes aux contours croisés sur de larges bandes réalisées au charbon de bois pour construire des éléments clés, tels que les cheveux, le nez, les yeux ou encore le menton. 

Ses  traits sont dynamiques et en continuel mouvement, voire en transe. En  somme, Aghilès Issiakhem ne choisit pas sa technique, elle découle d’elle-même. Notre jeune ingénieux  interlocuteur stipule que  toutes formes de matières peuvent le  libérer. Cependant,  il préfère vivre la couleur au lieu de la dessiner.  Quand il a un moment de bien-être, il préfère le vivre pleinement.
 

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