Réglement du conflit du Sahara occidental : Le forcing américain

06/09/2023 mis à jour: 05:16
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Photo : D. R.

Pour la première fois depuis sa nomination en 2021, l’envoyé spécial des Nations unies, Staffan de Mistura, a pu accéder, le 4 septembre, aux territoires occupés du Sahara occidental dans le cadre de sa tournée régionale. Le président de la RASD, Brahim Ghali, devrait rencontrer, le 11 septembre à New York, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres.

L’envoyé personnel du secrétaire général des Nations unies, Staffan de Mistura, s’est rendu dans les territoires occupés du Sahara occidental pour la première fois depuis sa nomination en octobre 2021.

A son arrivée le 4 septembre dans la ville de Laâyoune occupée, les forces d’occupation marocaines ont réprimé une manifestation pacifique organisée par des associations sahraouies des droits de l’homme pour réclamer le droit à l’autodétermination et à l’indépendance. Selon l’Agence de presse sahraouie, les manifestants ont été pourchassés dans les rues et artères de la ville, tabassés et insultés. Plusieurs d’entre eux ont été blessés, ajoutent les mêmes sources.

L’envoyé spécial de l’ONU a effectué plusieurs visites dans la région au cours de ces deux dernières années, mais il n’a jamais été autorisé, par l’occupation marocaine, à se rendre dans les territoires occupés.

S’il a pu le faire cette fois-ci, c’est assurément grâce au forcing américain. D’ailleurs, le journal espagnol El Confidential affirme que «les États-Unis ont obligé le Maroc à autoriser l’envoyé de l’ONU à se rendre au Sahara occidental». Ce qui n’est pas étonnant, lorsque l’on sait que depuis des mois, l’administration américaine multiplie la communication sur la question du Sahara occidental en réaffirmant son soutien au processus politique sous l’égide de l’ONU.

Après la décision de Donald Trump, en 2020, de reconnaître la prétendue  souveraineté du Maroc  sur le Sahara occidental en échange d’une normalisation avec Israël, l’administration Biden est vite revenue à la position traditionnelle américaine soutenant le plan de règlement du conflit parrainé par les Nations unies. Cette position a été d’ailleurs réitérée par le secrétaire d’Etat, Antony Blinken, et par plusieurs autres responsables de son département.

Ainsi, lors de son tête-à-tête avec le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, le 9 août dernier à Washington, M. Blinken avait clairement exprimé le soutien des Etats-Unis au processus politique de l’ONU au Sahara occidental. Un processus devant permettre l’autodétermination du peuple sahraoui. Une position qui a été également réaffirmée par la secrétaire d’Etat adjointe, Wendy Sherman.

Un appui fort à De Mistura

Les Américains semblent vouloir faire avancer ce dossier pour arriver à une solution juste, durable et conforme aux aspirations du peuple sahraoui. C’est dans cet esprit que le sous-secrétaire d’Etat adjoint pour l’Afrique du Nord, Joshua Harris, a effectué il y a quatre jours une visite dans les camps sahraouis de Tindouf, où il a eu à discuter avec le président de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), Brahim Ghali, qui est également le secrétaire général du Front Polisario, ainsi qu’avec d’autres hauts responsables sahraouis.

Le responsable américain a également rencontré les représentants des agences de l’ONU présentes sur place ainsi que des ONG et des organisations humanitaires qui apportent aide et assistance aux réfugiés sahraouis. «C’était une opportunité pour consulter le secrétaire général (Brahim Ghali) et de hauts responsables du Front  Polisario à propos de notre soutien au processus des Nations unies pour arriver à une solution politique, notamment pour le peuple sahraoui.

C’était une occasion de voir, de visu, la situation très grave à laquelle fait face le peuple du Sahara occidental», a affirmé le 4 septembre dans un entretien à El Watan M. Harris, assurant que l’objectif de sa visite était de «refléter la sincérité de notre gouvernement dans son soutien au processus politique des Nations unies, pour arriver à une solution politique pour le Sahara occidental qui soit durable et digne».

M. Harris a ainsi fait part du «soutien total» des Etats-Unis aux efforts de l’envoyé spécial des Nations unies au Sahara occidental tout en soulignant le «besoin urgent d’agir». «Nous voulons être sûrs que ce processus des Nations unies réussisse là où malheureusement les précédents efforts consentis n’ont pas abouti», a-t-il ajouté.

Une reprise sérieuse des négociations

Il faut souligner que les Sahraouis ont repris en novembre 2020 la lutte armée pour l’indépendance après la violation par le Maroc de l’accord de cessez-le-feu de 1991 signé avec le Front Polisario. L’administration américaine estime que seule une reprise sérieuse du processus politique sous l’égide de l’ONU  pourrait faire taire les armes.

L’appui franc et fort des Etats-Unis à Staffan de Mistura vise très clairement à créer un environnement favorable à la reprise du processus politique de l’ONU afin de faire avancer de façon substantielle ce dossier dans un esprit de désescalade. Et la tournée de M. De Mistura va effectivement dans ce sens.

Elle a pour objectif de «faire progresser de manière constructive le processus politique sur le Sahara occidental», a précisé un communiqué de l’ONU qui a souligné que l’envoyé spécial mènera «des réunions impliquant toutes les parties concernées avant la publication du rapport du secrétaire général au Conseil de sécurité en octobre».

Aussi, il est prévu d’élargir ces discussions au secrétaire général de l’ONU qui devrait rencontrer le président de la RASD, Brahim Ghali, le 11 septembre prochain au siège des Nations unies à New York.  Cette mobilisation pour relancer le processus de paix, sous l’impulsion des Etats-Unis, n’arrange bien évidemment pas les affaires du makhzen qui tire profit du statu quo. A l’heure actuelle, c’est  certainement la panique à Rabat.


 

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