Le journal a puisé dans ses archives et donné la parole à des témoins et des spécialistes locaux sur cette époque. La journaliste Nathalie Garrido, qui a contribué à la réalisation du livre Lyon Algérie 1954-1962. Comment le conflit a changé la région lyonnaise, explique que «lorsque la guerre de décolonisation éclate en 1954, Lyon accueille (déjà) une importante communauté algérienne».
Le combat nationaliste a eu, hélas, ici comme ailleurs, son lot macabre des luttes entre FLN et MNA. Son caractère, juste quelques années après la libération du joug nazi, amène surtout un soutien de nombre de Lyonnais progressistes : «Alors que le système judiciaire se durcit davantage à Lyon que sur le reste du territoire national, la région s’illustre dans le soutien des habitants aux Algériens qui se battent pour l’indépendance. L’engagement des milieux chrétiens, notamment des catholiques sociaux, ainsi que la mobilisation du collectif des avocats lyonnais, pour la préservation des droits de la personne en temps de guerre, seront déterminants.»
LES EFFETS DE LA GUERRE SUR L’URBANISME
En 1962, alors que la guerre est finie, les Algériens de la région lyonnaise pansent les plaies, alors que 42 000 rapatriés pieds-noirs arrivent dans le Rhône entre 1962 et 1968 : «38 000 dans l’agglomération lyonnaise et 15 000 à Lyon. L’arrivée massive de rapatriés dans la région fera l’objet d’une politique d’accueil particulièrement bienveillante de la part de la municipalité au moment où les premiers grands ensembles sortent de terre.»
C’est le deuxième aspect de ce livre : comment les effets de la guerre et ses lendemains eurent un «impact sur l’urbanisme» : «Aux prémices des années 1950-1960, la construction d’immeubles dans les quartiers de Lyon et en périphérie permettra de loger les rapatriés et les travailleurs d’Afrique du Nord cantonnés jusqu’alors dans des bidonvilles.» 160 photographies et documents d’époque, issus du Progrès et des fonds des archives départementales du Rhône et de la métropole de Lyon, illustrent cette publication. «Un ouvrage au service de l’histoire et de la mémoire», conclut Nathalie Garrido.
«CETTE GUERRE ET NOUS»
Il faut souligner le travail important du quotidien Le Progrès pour replacer les années de la guerre dans une perspective globale. Dans la presse régionale, il est rare, et bienvenu qu’un travail complet aborde toutes les composantes en jeu durant le conflit de 1954 à 1962 et ses effets. Déjà en 2005, l’association Grand ensemble avait produit un film : Cette guerre et nous, réalisé par Beatrice Dubell, et que nous avions chroniqué dans les colonnes d’El Watan. Il est bien de rappeler ici l’intention du documentaire : «Sur le lieu d’une exposition, qui met en lumière des pages oubliées de la guerre de Libération algérienne, des visiteurs d’âges divers prennent la parole. La diversité de leurs récits compose une vue d’ensemble : appelés, descendants de l’immigration algérienne, rapatriés, harkis ou désignés comme tels, reflétant l’état des mémoires et des représentations de cette guerre, en 2012, dans une grande ville de France.» La même réalisatrice avait réalisé El bir, surnom donné à un prêtre lyonnais qui faisait partie des réseaux de soutien aux Algériens.
De notre correspondant en France Walid Mebarek
_ Lyon-Algérie 1954-1962. Comment le conflit a changé la région lyonnaise 130 pages, 22 €.
Boutique en ligne : https://bit.ly/lyon-algerie
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CONFÉRENCE A VENISSIEUX
La ville de Vénissieux a organisé une conférence autour de la guerre d’Algérie et de son impact au sein de la région lyonnaise mardi 2 mai en partenariat avec Le Progrès et l’association Devoir de Mémoire. Gilles Boyer, Professeur d’histoire honoraire à l’INSPE université Claude Bernard Lyon 1, spécialiste notamment du fait colonial ; David Rosset, archiviste aux Archives du département du Rhône et de la Métropole lyonnaise et Nathalie Garrido, journaliste, ont évoqué la spécificité de Lyon et sa région pendant cette période, à partir de l’ouvrage.
