L’administration de Donald Trump poursuit son offensive diplomatique pour trouver une solution
au conflit russo-occidental sur l’Ukraine. Une initiative prise en dehors de l’Europe.
A l’effet de trouver une fin rapide au conflit en Ukraine, les Etats-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale du pays, a rapporté hier l’AFP.
Le projet de résolution demande «une fin rapide du conflit et appelle à une paix durable entre l'Ukraine et la Russie», une formulation vague, loin des précédents textes de l'Assemblée clairement en soutien à l'Ukraine.
Le secrétaire d'Etat américain, Marco Rubio, a exhorté dans un communiqué les pays membres de l'ONU à approuver cette nouvelle résolution «simple» et «historique» et «tous les Etats membres à (la) soutenir, afin de tracer un chemin vers la paix». Cette résolution «est une bonne idée», a observé l'ambassadeur russe à l'ONU Vassili Nebenzia, déplorant toutefois l'absence de référence «aux racines» du conflit.
«Je suis déterminé sur tous les sujets pour avoir un échange» avec Donald Trump, a indiqué hier le président français à l’ouverture du Salon de l’agriculture à Paris, attendu demain à Washington. «On partagera nos accords, nos désaccords et j'espère surtout qu'on trouvera des solutions sur la question de l'Ukraine.» «Je vais essayer de le convaincre d'aller dans une bonne direction et, sinon, nous prendrons des dispositions», a-t-il ajouté, observant que les Etats-Unis sont «un allié historique», et qu'il faut qu'«on agisse tous pour contenir» la Russie.
Dollars contre minerais stratégiques
Un peu plus tard, le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a affirmé qu'il n'est pas possible d'«imposer» la paix en Ukraine, deux jours avant une visite à Kiev. «On ne peut pas imposer la paix en Ukraine et la sécurité de l'Europe», a dit le dirigeant socialiste durant une cérémonie dans la région de Castille-et-Leon (nord-est).
Une paix, «pour qu'elle soit juste et durable», doit «compter sur l'appui, le concours et la participation de l'Ukraine et des Européens», a-t-il ajouté. «La position du gouvernement espagnol est très claire. Ni la loi du plus fort, ni la loi du Far West.
La paix en Ukraine et la sécurité de l'Europe ne peuvent pas être imposées, elles doivent être convenues avec les Ukrainiens et les Européens», a-t-il souligné. Donald Trump a encore une fois fustigé vendredi son homologue ukrainien, depuis le Bureau ovale de la Maison-Blanche.
Tout en estimant que ce dernier et Vladimir Poutine allaient «devoir se parler», pour «mettre fin au massacre de millions de personnes», il a jugé que la présence de l'Ukrainien n'est «pas importante» à des négociations avec la Russie. «J'ai eu de très bonnes discussions avec Poutine, et j'ai eu des discussions pas aussi bonnes avec l'Ukraine. Ils n'ont aucune carte en main, mais ils la jouent dur», a observé Donald Trump.
«Nous n'allons pas laisser cela continuer.» «Cela fait trois ans que (M. Zelensky) est en réunion et rien n'a été fait», a également lancé le président américain, dans un entretien avec Fox Radio. «Je ne pense donc pas qu'il soit très important pour participer à des réunions.»Il a aussi refusé de condamner Moscou pour son intervention en Ukraine en février 2022. Les dirigeants occidentaux «n'auraient pas dû (la) laisser attaquer», a-t-il dit.
Il a ciblé par ailleurs le président français, Emmanuel Macron, et le Premier ministre britannique, Keir Starmer, qui n'ont «rien fait» pour mettre un terme à la guerre. Ils seront reçus séparément demain à la Maison- Blanche. Entre-temps, Kiev et Washington négocient un accord que V. Zelensky veut «équitable» sur l'accès des Etats-Unis aux minerais stratégiques de l'Ukraine, en contrepartie de leur soutien.
Dans un message vidéo, vendredi soir, diffusé sur les réseaux sociaux, V. Zelensky a un peu plus tôt expliqué que l'Ukraine et les Etats-Unis travaillent «sur un projet d'accord» portant sur les minerais. Début février, D. Trump a annoncé vouloir obtenir un accès à 50% des minerais stratégiques de l'Ukraine en échange de l'aide américaine déjà livrée.
Il a affirmé que les Etats-Unis ont dépensé «350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée», un chiffre faux, car selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine (financière, humanitaire et militaire) a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.
Volodymyr Zelensky a lui assuré le 1er février que l'Ukraine n'a reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain. La première version d'un accord a été rejetée par V. Zelensky, qui a souligné que son pays n'est «pas à vendre», et a répété sa proposition de négocier des «investissements» américains en échange de «garanties de sécurité» face à la Russie.
L'Assemblée générale de l'ONU se réunit demain pour marquer le troisième anniversaire de l'offensive russe contre l’Ukraine. En la circonstance, Kiev et les Européens ont de leur côté préparé un projet de résolution qui souligne la nécessité de «redoubler» d'efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre «cette année», et prend note des initiatives de plusieurs Etats membres ayant présenté «leur vision pour un accord de paix complet et durable».
Conditions inacceptables
Le texte réitère également les précédentes demandes de l'Assemblée générale d'un retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes d'Ukraine et la cessation des attaques de Moscou contre Kiev. Les nouvelles critiques de D. Trump contre V. Zelensky, après celles exprimées cette semaine qui ont suscité une vive réaction de Kiev et la stupéfaction de ses alliés européens, interviennent alors que la visite de l'émissaire du président américain en Ukraine, Keith Kellogg, semblait avoir apaisé la situation.
Volodymyr Zelensky a indiqué avoir eu avec le diplomate américain des échanges «productifs», et celui-ci l'a qualifié de «dirigeant courageux et assiégé d'une nation en guerre». Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réaffirmé vendredi que le président Vladimir Poutine est «ouvert» à des pourparlers de paix.
La Russie exige notamment que Kiev lui cède quatre régions ukrainiennes en plus de la Crimée annexée en 2014, et que l'Ukraine n'adhère jamais à l'Otan. Des conditions inacceptables pour les autorités ukrainiennes qui demandent à leurs alliés des garanties de sécurités solides. Donald Trump et ses collaborateurs ont jugé «irréaliste» une adhésion de l'Ukraine à l'Otan et son ambition de reprendre ses territoires perdus à la Russie.
Aussi, Moscou souhaite voir si possible la levée des sanctions américaines qui touchent lourdement son économie. Mais un éventuel retour ensuite sur le marché russe d'entreprises américaines, et occidentales, se fera, dans un tel scénario, «au cas par cas», a d'ores et déjà prévenu hier le ministre russe du Développement économique, Maxime Rechetnikov. «Le marché russe a été et reste ouvert.
Toutes les décisions seront prises au cas par cas», a-t-il dit, assurant vouloir maintenir un «équilibre» entre «la prise en compte des intérêts des consommateurs et le maintien de la pluralité sur le marché afin de garantir la concurrence et de maîtriser les prix».
Depuis 2022 et l'avalanche de sanctions occidentales ayant touché la Russie, «l'économie russe a changé. Par conséquent, les exigences des entreprises étrangères en matière de localisation, d'investissements et de technologies seront très différentes», a prévenu le ministre russe.
Sur le terrain, le chef d'état-major russe, Valéri Guérassimov, a rendu visite à des unités qui combattent dans l'est de l'Ukraine, a annoncé hier l'armée russe. «Le général Valéri Guérassimov (...) a rendu visite au poste de commandement» des troupes opérant dans la région orientale de Donetsk, a indiqué le ministère russe de la Défense dans un communiqué.
C'est dans cette zone du front que l'armée russe grignote depuis plusieurs mois du terrain face à une armée ukrainienne en difficulté. Les forces russes tentent de s'emparer de Tchassiv Iar et Pokrovsk, deux bastions importants pour l'armée ukrainienne sur la ligne de front. L'armée ukrainienne ne contrôle de son côté plus qu'une toute petite poignée de localités dans cette région, dont Moscou revendique l'annexion totale depuis 2022.