Pénurie de la pièce de rechange en Algérie : Le plan B des automobilistes

09/01/2025 mis à jour: 05:32
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En l’absence de la pièce de rechange devant garantir la bonne gestion du parc automobile, de nombreux propriétaires de véhicules recourent à d’autres marchés étrangers de la pièce de rechange offrant la disponibilité, un choix diversifié et des prix accessibles.

 

Réparer sa voiture relève du parcours du combattant aujourd’hui où le pays a atteint le cap du critique en matière de disponibilité des pièces de rechange automobiles. Les nouvelles restrictions gouvernementales sur l’importation de ces «pièces maîtresses», devant assurer le maintien du parc roulant, ont débouché à une déstructuration sans précédant de la filière de pièces de rechange. 

Aujourd’hui, il est devenu presque impossible, même sur le marché de l’occasion et les casses automobiles du pays, de tomber sur des pièces mécaniques qui offriraient la fiabilité et garantiraient une durée de vie aux véhicules. Dans les meilleurs des cas, si la chance sourit aux automobilistes en quête d’une pièce, ils devront se mettre à l’évidence qu’elle est soit trop chère ou bien de piètre qualité. 

Cet imbroglio, l’automobiliste algérien le subit au quotidien. Devant une telle situation, de nombreux propriétaires de véhicules sont contraints de se tourner vers d’autres solutions. 

Certains importent leurs pièces de rechange de Chine sur commande pour les modèles de voitures asiatiques. Pour les autres modèles, notamment de marques européennes, les propriétaires de ces véhicules ont trouvé la parade : partir en Tunisie pour flairer la bonne affaire. 

Car en effet, au regard d’un simple citoyen algérien, la Tunisie est devenue un véritable «couteau suisse» offrant non seulement les prestations touristiques et sanitaires, mais aussi un service mécanique garantissant la disponibilité de pièces de rechange en abondance et une réparation in situ. Selon un opérateur tunisien activant dans la filière de la pièce de rechange interrogé par El Watan, la Tunisie accueille beaucoup de clients algériens en quête de la «pièce manquante» en Algérie. 

Ce besoin les conduits non pas de gaieté de cœur au vu de la distance parcourue, vers une longue expédition, jusqu’à parfois la capitale Tunis pour effectuer les réparations nécessaires sur leurs voitures. 

Comment est née cette idée ? De l’avis d’un responsable d’atelier de mécanique activant dans la banlieue algéroise, la forte demande sur la pièce de rechange manquante en Algérie a incité certains opérateurs tunisiens activant dans le domaine de la mécanique à offrir les services souhaités aux clients algériens.

 Les forums de discussions sur les réseaux sociaux en témoignent sur ce nouveau modus operandi pour lequel beaucoup d’automobilistes ont jeté leur dévolu. Amine, jeune propriétaire d’un véhicule de marque française, nous confie avoir longtemps hésité avant de recourir à cette option. 

«Mon mécanicien m’a conseillé, après avoir effectué un diagnostic pas très reluisant sur l’état de la mécanique de mon véhicule, de procéder au changement complet du moteur. Il m’avait proposé l’option de l’achat et la pose en Tunisie du nouveau moteur très peu roulé après avoir contacté ses partenaires de l’autre côté de la frontière. Finalement, l’opération a été concrétisée au bout de quelques jours», confie l’interlocuteur satisfait. 


Une filière en quête de réactivation

Des cas comme celui d’Amine se comptent par milliers. Il faut dire que la Tunisie n’est pas le seul pays à offrir ce genre de prestations. Certains propriétaires de véhicules puisent dans le marché de la pièce de rechange en France qui leur permet de recourir à l’habillage complet du véhicule (remplacement de moteur, train roulant et pièces en tôle). «Mon vieux tacot s’est offert une cure de jouvence en France», ironise un autre interlocuteur. 


Le parc automobile algérien dépasse aujourd’hui les 7 millions d’unités et se distingue par une vétusté qui demande un entretien plus que récurrent. Selon des statistiques officielles, 19,3% de ce parc automobile se compose de véhicules ayant plus de 20 ans d’âge et 22,08% ayant entre 10 et 14 ans d’âge. 


Durant l’année 2023, la commission des opérateurs des pièces de rechange et mécaniques du Club économique algérien (CEA) avait proposé de revoir le mode d’importation des pièces détachées destinées à tous types de véhicules, en introduisant de nouveaux mécanismes et de reconsidérer la répartition des quotas liés aux licences accordées par l’Agence nationale de promotion du commerce extérieur (Algex) et la licence pour importer tous les types de pièces nécessaires au marché.

Le président de cet organisme, Sami Larbès, avait annoncé que le CEA devra soumettre quelques propositions au ministère du Commerce pour étudier la possibilité de revoir la formule d’importation des pièces détachées via la plateforme numérique d’Algex adoptée il y a environ deux ans.


«Les sociétés de pièces détachées appellent à l’ouverture du marché. Restreindre les importations et limiter les quantités ne permet pas de faire face à la rareté que connaît le marché en raison de la forte demande due à la suspension des importations pendant plusieurs mois, l’année dernière, avant d’être partiellement rouvertes en mars dernier», avait-il expliqué. 

Il avait également ajouté que la libéralisation du marché créera de la concurrence et entraînera une baisse des prix, des prix qui ont connu, d’ailleurs, une hausse sensible en raison de la rareté des produits, ce qui a conduit certains commerçants à «profiter de l’occasion» pour «doubler les prix», faisant, ainsi, du consommateur la victime qui «n’a d’autre choix que de se soumettre au diktat de ces mêmes commerçants». 

Presque deux ans après la soumission de cette plateforme de revendication, la filière de la pièce de rechange demeure sans activité palpable. Entre-temps, il est des plus logiques que les propriétaires de véhicules recourent à toutes les voies possibles et imaginables. 

Car, pour paraphraser l’ancien ministre de l’Industrie qui avait répliqué lors d’une sortie médiatique que «la voiture n’est pas une priorité», il n’en demeure pas moins que la voiture reste une nécessité absolue. 

Par : Aziz Kharoum   

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