Mohamed Latrèche, Réalisateur et producteur : «Un film culte est soit un film trop connu ou le contraire, c’est un film peu vu mais dont on parle beaucoup»

03/12/2023 mis à jour: 00:38
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Originaire de Sidi Bel Abbès, Mohamed Latrèche poursuit ses études en France (sciences politiques) tout en se consacrant au cinéma. Il réalise des documentaires, A la recherche de l’Emir Abd El-Kader en 2004, l’UGEMA en 2014, Boudjema et la maison cinéma en 2019 autour de l’icône de la cinémathéque Boudjema Kareche, et deux courts métrages de fiction, Rumeurs, etc et L’aide au retour.

 Il devient producteur, distributeur et réalise Zinet, Alger, le bonheur en 2023, consacré au film culte Tahia ya Didou de Mohamed Zinet (1970), œuvre décrite par Mohamed Latreche comme un «film-monde», avec une trame simple où Alger est le vrai sujet, à la libeté de ton qui ne cadrait pas avec la pensée unique de l’époque.

 

Propos recueillis par Chawki Amari

 

 

-Vous êtes revenus sur Mohamed Zinet, acteur de comédies et qui n’a fait qu’un seul film en tant que réalisateur, un film très sérieux. Pourquoi le choix de ce film ?
 

Quand j’ai commencé à faire de films il y a 20 ans, j’ai cherché à me situer dans l’histoire du cinéma algérien. Tahya ya Didou est devenu mon repère auquel je me suis identifié car il a incarné, et continue à l’être, à la fois un cinéma viscéralement libre, audacieux et novateur.
 

-Avec le recul, quelle appréciation avez-vous de Tahia ya Didou ? A-t-il bien ou mal vieilli ? 

En fait, il y a dans le film de Zinet une poésie et une candeur intemporelles, et le temps joue en sa faveur. Les scènes du vieux kabyle en turban, Dda Belkacem, l’oncle de Zinet, auront toujours une grande charge émotionnelle, hier, aujourd’hui, comme dans 100 ans. 

Les scènes où ce vieux est avec Georges Arnaud toucheront toujours les spectateurs car Zinet pose sur ses personnages un regard profondément humaniste. Je peux dire la même chose des scènes avec les enfants, et surtout avec le P’tit Redouane, le neveu de Zinet. La scène finale avec cet enfant assis sur la jetée est tellement belle et originale qu’elle ne passera jamais de mode. Ce sont des scènes qui feront toujours le bonheur des spectateurs.
 

Quand on essaie de faire un historique sur les films cultes algériens, il y a souvent des comédies. Le spectateur n’a pas souvent en tête La Bataille d’Alger, Tahia ya Didou ou Chroniques des années de braise ou encore des films récents. Pourquoi ?  

Partout dans le monde, ce sont les comédies qui rassemblent le plus de spectateurs. Les héros de ces comédies deviennent forcément des icônes. Louis de Funès en France, Jerry Lewis en Amérique, Toto en Italie et pour l’Algérie, l’immense Rouiched et l’inspecteur Tahar. Le rire est une arme de destruction massive, je ne sais plus qui a dit ça. Le rire emporte tout sur son passage. 

Le rire touche les hommes de manière directe et profonde. Aucun autre genre ne peut le concurrencer … sauf peut-être la peur. Mais je connais mal les films d’horreur. Ça me fait trop peur.
 

-Quels sont pour vous les films culte algériens ? 

C’est quoi en fait un film culte ? C’est selon moi soit un film trop connu ou le contraire, un film peu vu mais dont on parle beaucoup. Pour la première catégorie La Bataille d’Alger est indéniablement culte. 

Des jeunes à La Casbah connaissent par cœur certaines répliques, je l’ai constaté lors dans mon travail dans ce quartier ces dernières années. Et les Algériens, ceux d’hier et d’aujourd’hui, adulent la figure de Ali la Pointe parce qu’ils ont vu La bataille d’Alger. Pour la deuxième catégorie il y a bien sûr Tahya ya Didou. Il reste peu vu à mon avis même s’il est ardemment défendu par un petit nombre d’inconditionnels.
 

-Le prochain projet ? 

Un long métrage de fiction tourné chez moi à Sidi Bel Abbès.

 

 

 

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