Le Salon international du livre d’Alger a ouvert ses portes le 6 novembre pour se poursuivre jusqu’au 16 novembre au Palais des expositions des Pins Maritimes à Alger. Dans cet entretien, le commissaire du SILA, Mohamed Iguerb, nous décortique le programme.
Propos recueillis par Nacima Chabani
La 27e édition du Salon international du livre d’Alger a subi un changement dans son calendrier habituel. Quelles en sont les raisons ?
Concernant le report de l’ouverture du salon au 6 novembre, cela est dû à la prise en compte des grandes célébrations organisées par l’Algérie à l’occasion du 70e anniversaire de la glorieuse Révolution de novembre. Après mûre réflexion, nous avons jugé opportun de fixer le Salon international du livre à cette date. De plus, nous espérions que ce report serait bénéfique pour nos confrères éditeurs du Liban, dont beaucoup ont été empêchés de venir en raison de l’agression, et qui ont entraîné des retards pour d’autres.
En chiffres, comment se présente cette 27e édition du SILA ?
Cette édition se distingue par une participation impressionnante, avec 10 07 participants, dont 290 exposants nationaux, et des représentants de 40 pays, répartis sur une superficie de plus de 23 000 m2. Le salon accueillera cette année 350 invités provenant de 24 pays, dont 12 pays arabes et 7 pays africains dans le cadre d’un programme culturel riche en conférences et rencontres culturelles et littéraires, offrant une diversité géographique unique reflétant la diversité culturelle.
L’invité d’honneur du 27e SILA est le Qatar. Sur quels critères avez-vous opté pour le choix de ce pays ?
La tradition du Salon international du livre d’Alger, reconnue dans les milieux culturels du monde entier, prend en compte les relations politiques de l’Algérie avec les pays invités, ainsi que leurs capacités dans les domaines de l’édition, de la production de livres, et de la promotion de la littérature et de la culture en général. Nous accordons également une grande importance à la préparation des pays concernés pour leur participation au salon, en établissant des contacts préliminaires pour s’assurer de leur disponibilité à répondre favorablement à l’invitation. L’Italie a été l’invitée d’honneur en 2022, suivie par le continent africain lors de l’édition de 2023. Conformément aux traditions du salon, le pays invité d’honneur pour l’édition 2024 devrait être issu de l’Europe. Toutefois, il est essentiel de prendre en compte le contexte géostratégique mondial pour sélectionner le pays invité d’honneur.
Choisir l’Etat frère du Qatar comme invité d’honneur pour cette édition découle de notre profonde conviction du rôle significatif que joue le Qatar dans le paysage intellectuel et culturel. Le Qatar est reconnu pour ses positions sages et ses grandes réalisations en matière de diplomatie culturelle active. Ce choix reflète les nombreuses contributions du Qatar à la culture arabe à travers ses programmes, projets et institutions qui soutiennent la créativité, l’art, les sciences et encouragent les talents, propulsant ainsi la culture arabe sur le devant de la scène.
Cette occasion, où la culture qatarienne est présente avec toute sa richesse humaine et intellectuelle, se reflète dans la nature des conférences proposées et les personnalités culturelles de renom. Il ne fait aucun doute que cela ouvrira de nombreux domaines d’échanges fructueux basés sur la coopération. Nous aspirons à ce que les relations culturelles soient à la hauteur des relations fraternelles globales, qu’elles soient politiques ou économiques, et qu’elles visent à créer des relations constructives dans le cadre des liens historiques fraternels communs. Le programme culturel proposé est riche et varié, témoignant de ces réalisations. En reconnaissance de l’importance de ce programme, nous avons intégré certaines de ses activités dans le programme culturel général du salon. Cela vise à établir un espace commun pour la connaissance mutuelle, le dialogue et l’échange d’idées et de perspectives. Un espace de 200 m² (au niveau du pavillon central) a été réservé gratuitement pour l’invité d’honneur afin de mettre en valeur diverses activités culturelles du patrimoine et de la culture qatarienne. De plus, des activités spécifiques pour les enfants seront organisées dans l’espace qui leur est consacré, dans l’espoir de permettre aux enfants des deux pays de s’engager et de créer une ambiance éducative empreinte de fraternité.
Qui sont les auteurs algériens et étrangers, invités cette année ?
Cette année, le salon est fier d’accueillir une pléiade d’auteurs algériens et internationaux renommés. Parmi les auteurs algériens invités, nous avons la chance de compter sur la présence de Maïssa Bey, Z’hour Ounissi, Waciny Laredj, Amin Zaoui, Saïd Boutadjine, Habib Sayeh, Ibrahim Tazghart, Mohamed Sari, Rabia Djelti, Fayçal El Ahmar, Mohamed Teharichi, Ahmed Delbani, Ahmed Cheniki, Bouzid Boumediène, Saleh Belaïd, Mohamed Abbas, Djamel Yahiaoui et Hadjer Kouidri. Les auteurs étrangers invités sont Amna Mahmoud Abu Al Hatab (Palestine), Mohamed Lamine Camara (Sénégal), Kane Bugul (Sénégal), KhedherAbdelbaki Mohamed (Nigeria), Louiza Aït Hamou (Algérie-France), Sensi Kaba Diakité (Guinée), Naif Bin Nahar (Qatar), Aïcha Ibrahim (Libye),Nancy Ibrahim (Égypte), Jayli Amadou Amal (Cameroun), Fakhri Saleh (Jordanie), Mohamed Naim Farhat (Palestine-Jordanie), Ahmed Abdelmalek (Qatar), Ibrahim Bages Abdul Majeed Al Maqdisi (Jordanie-Palestine) et Hanan Al Fayyad (Qatar).
Le SILA coïncidera, cette année, avec la célébration du 70e anniversaire du déclenchement de la Révolution algérienne, à travers une programmation riche…
C’est vrai, l’édition de cette année est marquée par le 70e anniversaire du déclenchement de la glorieuse Révolution de libération du 1er Novembre, et notre devoir est non seulement de perpétuer la mémoire mais de transmettre aux jeunes générations l’histoire et d’approfondir la compréhension de la lutte de libération du 1er Novembre 1954. Parmi les sujets clés abordés, l’un des principaux axes sera l’esprit de la Révolution du 1er Novembre et son héritage intergénérationnel. Cette conférence soulignera comment les valeurs fondamentales de la Révolution se sont transmises au fil des générations et comment elles continuent d’inspirer la résistance et l’engagement social et politique. A l’espace Palestine, une conférence sera dédiée à l’engagement permanent de l’Algérie en faveur de la Palestine, un symbole de solidarité dans la lutte pour la libération et l’autodétermination. Cette thématique renvoie à l’héritage de la Révolution algérienne, qui a toujours été un acteur-clé dans les causes de décolonisation et de soutien aux peuples opprimés. Le rayonnement de la Révolution algérienne en Afrique sera également exploré, avec un focus sur l’influence des valeurs de Novembre 1954 sur les luttes de libération du continent africain. Cette conférence rappellera l’importance de la solidarité entre les pays africains et les liens indéfectibles établis depuis l’époque coloniale. Une série de conférences sera consacrée à l’histoire et la mémoire des crimes coloniaux, un aspect crucial pour comprendre les souffrances infligées au peuple algérien pendant l’occupation et la manière dont ces événements sont documentés par les historiens. L’édition de cette année met également en valeur la manière dont les écrivains algériens ont raconté Novembre 1954, à travers des récits personnels et des analyses littéraires qui nourrissent la mémoire collective. Cela sera l’occasion de réfléchir à la place de la littérature dans la construction de l’identité nationale et la réappropriation de l’histoire. La conférence sur les textes fondateurs de la Révolution proposera une analyse des documents essentiels, tels que la Déclaration du 1er Novembre, et leur rôle dans la mobilisation et la consolidation de l’unité du peuple algérien face à la colonisation. Enfin, les écrits sur la Révolution dans les littératures arabes et mondiales offriront un éclairage sur la perception internationale de la lutte algérienne et son impact dans les luttes anticoloniales ailleurs dans le monde.
La cause palestinienne sera, également, à l’honneur au niveau de l’«Espace Palestine». Quelles sont les grands axes qui seront abordés ?
La 27e édition du SILA mettra également en lumière la cause palestinienne, qui est devenue une question humanitaire qui touche profondément les consciences à l’échelle mondiale. Cette année, le salon s’engage à souligner l’importance de la lutte du peuple palestinien à travers une programmation qui explore ses dimensions littéraires et historiques. Les discussions qui se dérouleront dans l’Espace Palestine s’articuleront autour de plusieurs grands axes : La littérature de résistance en Palestine, avec un focus sur les écrivains et poètes qui, par leurs mots, ont défié l’occupation et résisté à l’oppression. Les écrits de prison : la conférence mettra en lumière les œuvres littéraires produites par des prisonniers palestiniens, offrant ainsi une perspective unique sur la réalité de l’occupation et de la lutte intérieure pour la liberté. La place de la Palestine dans la poésie algérienne : cet aspect mettra en lumière la solidarité manifeste de la poésie algérienne envers la cause palestinienne et la manière dont celle-ci est présente dans les œuvres des poètes algériens. Le rôle du cinéma dans la lutte contre le sionisme et l’hégémonie : une plateforme qui abordera l’utilisation du cinéma comme outil de résistance et de sensibilisation face à l’injustice et à la domination israélienne. La position paradoxale de l’Occident face à Ghaza et à la Palestine : cette conférence examinera les doubles standards dans les positions politiques internationales concernant le conflit israélo-palestinien. En plus de ces conférences, des soirées poétiques seront organisées, célébrant la mémoire des poètes palestiniens et algériens. La première rendra hommage à Abu al-Qasim Khammar, poète algérien disparu, et la deuxième sera dédiée aux poètes martyrs de Ghaza.Ainsi, cette édition du Salon s’efforcera de créer un dialogue ouvert et enrichissant autour de la Palestine, en mettant en lumière ses écrivains, poètes et artistes tout en approfondissant les liens historiques et solidaires avec l’Algérie.
Parmi les points forts de cette édition 2024, le lancement du prix du premier ouvrage, d’adressant au moins des 35 ans …
Le ministère de la Culture et des Arts parraine un prix spécial destiné aux jeunes écrivains intitulé Mon premier livre, organisé par le Salon international du livre d’Alger à l’occasion de la 27e édition. Le prix concerne des jeunes écrivains de moins de 35 ans, qui ont publié leur premier livre au cours de l’année 2024 dans divers genres littéraires. Et cette année nous avons décidé de mettre en avant le roman écrit par nos jeunes plumes dans les langues nationales, l’arabe et l’amazighe, et les langues étrangères.
Ce projet vise à promouvoir la culture du livre et à inciter à la lecture dans différentes langues. Aussi à travers ce prix nous visons à mettre en valeur les jeunes énergies créatives en récompensant des œuvres littéraires caractérisées par la créativité. Mon premier livre valorise la valeur de l’identité imprégnée du patrimoine culturel national dans ses différentes dimensions, outre l’ouverture aux dimensions humaines et esthétiques de l’écriture internationale. On a lancé un appel aux jeunes auteurs les invitant à participer surtout que les candidatures sont ouvertes à tous les écrivains de nationalité algérienne. Aussi on a invité tous les éditeurs algériens présents dans le pays à présenter leurs jeunes auteurs.