Selon El Economisto, l’Espagne va reprendre ses missions commerciales avec l’Algérie par la Chambre de commerce d’Alicante.
L’Algérie a officiellement levé, mercredi dernier, les restrictions commerciales qu’elle avait imposées à l’Espagne en juin 2022, après le soutien du gouvernement de Pedro Sánchez au plan marocain sur le Sahara occidental. Dans la presse espagnole, cette mesure est favorablement accueillie après le coup de froid qui a plombé les relations entre l’Espagne et l’Algérie durant deux années. «L’Algérie lève unilatéralement le blocus bancaire sur l’Espagne (…) Le pays maghrébin déclare la fin des restrictions sur les transactions financières avec l’Espagne (…)», a rapporté, jeudi, le quotidien El Mundo.
«Une nouvelle phase s’ouvre dans les relations entre l’Algérie et l’Espagne, a-t-il souligné. Le pays du Maghreb a démontré une fois de plus qu’il avait la mainmise sur les flux commerciaux entre les deux pays et a décidé unilatéralement de lever le blocus qu’il maintenait depuis plus de deux ans sur les transactions bancaires et la quasi-totalité des exportations en provenance d’Espagne.» Pour El Independiente, l’Algérie ne peut «se passer brutalement de ses liens économiques avec l’Espagne (…)».
Il y a quelques semaines, fait savoir El Mundo, le Bureau économique et commercial de l’ambassade d’Espagne à Alger avertissait les entreprises ibériques qu’un «cadre clair n’était pas encore en vue pour garantir une relation commerciale a minima entre les deux pays». Or, mercredi dernier, la Banque d’Algérie a changé la donne et a émis de nouvelles orientations indiquant que «les opérations de domiciliation du commerce extérieur en provenance et à destination de l’Espagne doivent être traitées conformément à la réglementation des mutations en vigueur», écrit El Mundo, citant des médias algériens.
Et de rappeler que depuis que l’Algérie a rompu le traité d’amitié avec l’Espagne – un document en vigueur depuis 20 ans et suspendu jusqu’à aujourd’hui –, les relations entre les deux pays ont été marquées par un déblocage occasionnel du commerce de certains produits, «toujours décrété unilatéralement par le pays maghrébin (Algérie, ndlr)».
Entre janvier et mars de cette année, par exemple, l’Algérie a, selon El Mundo, levé l’embargo sur certains produits espagnols à base de volaille et de viande, en réponse à une situation de pénurie de ces produits en Algérie. «La récente annonce de l’autorité financière algérienne répond à la même dynamique. Dans tous les cas, il s’agit d’une bonne nouvelle pour l’Espagne et, surtout, pour les entreprises qui avaient vu leurs relations commerciales étroites et, dans de nombreux cas, historiques avec des clients locaux, annulées», estime le média espagnol.
Le quotidien Lavanguardia a, pour sa part, noté que la levée d’interdiction, actée par la Banque d’Algérie, s’étend à tous les biens et produits. «Les autorités algériennes ont débloqué l’importation de produits avicoles en provenance d’Espagne en janvier, et cette mesure s’étend à tous les biens et produits entre Madrid et Alger, à l’exception du gaz, qui n’a jamais été affecté par le blocus commercial», a-t-il expliqué dans son édition d’hier.
Effondrement des exportations
En mars 2022, l’Espagne a reconnu la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. Trois mois plus tard, l’Algérie suspend unilatéralement le traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération avec l’Espagne. Le même jour, l’Association professionnelle des banques et établissements financiers (ABEF) ordonne le gel des domiciliations liées aux opérations de commerce extérieur de produits et de services en provenance et à destination de l’Espagne.
Cela a, d’après la presse ibérique, provoqué l’effondrement des exportations espagnoles vers l’Algérie. Ainsi, les exportations vers l’Algérie sont passées de 3,6 milliards d’euros en 2014 à 332 millions en 2023, selon les données du secrétaire d’Etat au Commerce espagnol consultées par Europa Press. Mais avant la crise diplomatique due au revirement concernant le Sahara occidental, qui a également conduit Alger à retirer son ambassadeur – revenu en décembre 2023 –, les exportations avaient amorcé un certain déclin.
En 2019, elles s’élevaient à 2,9 milliards, tandis qu’en 2020, première année de la pandémie, elles sont tombées à 1,9 milliard et en 2021, les exportations ont atteint 1,8 milliard d’euros.
Pour la presse espagnole, la décision de dégel a été précédée par deux autres gestes diplomatiques ayant eu lieu la semaine dernière et qui ne doivent pas être négligés. Le premier d’entre eux est le message que le président Tebboune a adressé le 31 octobre au roi Felipe VI pour lui transmettre «au nom de l’Algérie, de son peuple et de son gouvernement» ses condoléances pour la tragédie provoquée par les récentes inondations.
Le président de la République y qualifie l’Espagne de pays ami et transmet sa «haute considération et son amitié» au monarque espagnol. Felipe VI enverra, à son tour, un message au président Tebboune, et ce, à l’occasion du 70e anniversaire du déclenchement de la Guerre de Libération. Ces gestes, purement protocolaires, certes, devaient cependant appuyer le réchauffement des relations entre les deux pays.
Dans sa livraison de jeudi, El Economisto considère que l’Algérie a «puni» l’Espagne en 2022 pour son soutien au projet de souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. «Depuis janvier de cette année, les importations et les exportations ont été normalisées et sont désormais complètement libéralisées», souligne-t-il.
Et d’ajouter : «(…) les restrictions ont été levées et les relations commerciales entre l’Espagne et l’Algérie, qui n’ont jamais concerné le gaz, ont été complètement normalisées. En fait, l’Espagne importe plus de gaz d’Algérie que de tout autre marché, et cet accord a été maintenu sans fissure pendant les deux années de blocus.» Citant le ministère du Commerce espagnol, El Economisto note que la reprise des échanges avec l’Algérie s’est concentrée cette année principalement sur les exportations de véhicules de transport de marchandises, suivies des composants automobiles et de la viande bovine.
D’autres produits, tels que les vêtements et les cosmétiques, ont commencé à montrer des signes de reprise, «même s’ils étaient encore faibles avant l’été», révèle le média espagnol. Il ajoute, en outre, que l’Espagne a pris de son côté de nouvelles mesures. Selon El Economisto, la nouvelle approche adoptée cette semaine à l’égard de l’Algérie s’est déjà traduite par des questions telles que la reprise des missions commerciales avec l’Algérie par la Chambre de commerce d’Alicante.