L’Alliance atlantique rejette la création d’une zone d’exclusion aérienne en Ukraine : L’OTAN ne veut pas affronter la Russie

05/03/2022 mis à jour: 03:15
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La Russie possède un arsenal nucléaire impressionnant (Photo : D.R)

Les membres de l’Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) ont rejeté hier la demande de Kiev de créer une zone d’exclusion aérienne en Ukraine, rapporte l’AFP. Décision prise pour éviter de se laisser entraîner dans le conflit, selon le secrétaire général de l’Alliance, Jens Stoltenberg. «La question a été évoquée et les alliés ont convenu que nous ne devrions pas avoir d’avions de l’OTAN opérant dans l’espace aérien ukrainien ou des troupes de l’OTAN au sol, car nous pourrions nous retrouver avec une guerre totale en Europe», a-t-il expliqué au terme d’une réunion d’urgence des ministres des Affaires étrangères de l’Alliance à Bruxelles.

Au neuvième jour de l’offensive russe sur l’Ukraine, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, s’est adressé à ses homologues durant cette réunion, a précisé J. Stoltenberg lors d’une conférence de presse. «Mon message a été : ''Agissez maintenant, avant qu’il ne soit trop tard. Ne laissez pas Poutine transformer l’Ukraine en Syrie. Nous allons continuer à nous battre. Mais nous avons besoin de partenaires pour nous aider par des actions concrètes, résolues et rapides, maintenant''», a précisé le ministre ukrainien dans un message sur Twitter.

«La seule façon de mettre en œuvre une zone d’exclusion aérienne est d’envoyer des avions de chasse de l’OTAN dans l’espace aérien de l’Ukraine, puis d’abattre des avions russes pour la faire respecte», a indiqué J. Stoltenberg. «Nous avons la responsabilité d’empêcher l’escalade de cette guerre au-delà de l’Ukraine. Parce que cela serait encore plus dangereux, plus dévastateur, et causerait encore plus de souffrances humaines», a-t-il déclaré. «L’OTAN est alliance défensive. Nous ne voulons pas être partie prenante au conflit en Ukraine», a soutenu J. Stoltenberg, estimant que «les jours à venir seront pires, avec plus de morts, plus de destructions, parce que la Russie va utiliser des armes plus lourdes». Et d’accuser : «La Russie utilise des bombes à fragmentation et nous avons des informations sur l’utilisation d’autres types d’armements en violation du droit international», ajoutant que «des informations sont collectées dans le cadre de l’enquête ouverte par la Cour pénale internationale»

L’OTAN a renforcé ses défenses à l’Est avec le déploiement, pour la première fois, de sa force de réaction rapide, l’envoi de milliers de soldats de l’Alliance dans les pays du flanc oriental, la mise en alerte de plus 130 avions de combat et plus de 200 navires en mer. «Il s’agit de la réponse immédiate de l’OTAN et elle sera renforcée si nécessaire», a assuré le secrétaire général de l'Alliance, affirmant qu’une réunion des ministres de la Défense de l’OTAN a été convoquée le 16 mars pour «prendre les décisions qui s’imposeront». Une discussion va également s’engager sur la posture de dissuasion et de défense sur le plus long terme, a également indiqué le secrétaire général de l’Alliance. Le sujet sera à l’ordre du jour du sommet de l’OTAN les 29 et 30 juin à Madrid. Pour sa part, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a approuvé ce même jour, à une écrasante majorité, une résolution en faveur d’une commission d’enquête internationale sur les violations des droits humains et du droit humanitaire en Ukraine après l’invasion russe.

Moscou réitère ses revendications

Un peu plus tard dans la journée, le président russe, Vladimir Poutine, a assuré au chancelier allemand, Olaf Scholz, que les forces russes ne bombardaient pas Kiev et les grandes villes ukrainiennes, qualifiant de «grossière fabrication» les informations sur les destructions menées par Moscou. «Les informations concernant le prétendu bombardement de Kiev et d’autres grandes villes ne sont que de grossières fabrications de propagande», a-t-il indiqué lors d’une conversion téléphonique avec le chancelier allemand, selon un communiqué du Kremlin. Il a précisé que le dialogue en faveur de la paix avec l’Ukraine n’est possible que si «toutes les exigences russes» sont acceptées. «La Russie est ouverte au dialogue avec la partie ukrainienne, ainsi qu’avec tous ceux qui veulent la paix en Ukraine. Mais à condition que toutes les exigences russes soient satisfaites», a affirmé le Kremlin dans un compte-rendu de cet appel, qui a eu lieu «à l’initiative de l’Allemagne»

Ces exigences consistent en la garantie juridique que l’Ukraine et d’autres voisins de la Russie n’intégreraient jamais l’OTAN. Plus tôt dans la journée, les députés russes ont adopté un texte prévoyant des peines pouvant aller jusqu’à 15 ans de prison pour toute personne publiant des «informations mensongères» qui entraîneraient des «conséquences sérieuses» pour les forces armées. Pour leur part, les autorités russes ont restreint l’accès à quatre médias indépendants : les sites des éditions russophones de la BBC et de la radio-télévision internationale allemande Deutsche Welle, de Meduza, site russe basé à Riga, et de Radio Svoboda, antenne russe de RFE/RL, média financé par le Congrès américain. Facebook était aussi en partie inaccessible.

Le syndrome Tchernobyl

Sur le plan militaire, l’armée russe a occupé hier la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporojie (sud), la plus grande d’Europe, où des bombardements dans la nuit ont fait craindre une catastrophe. Des tirs de chars russes contre la centrale ont mis le feu à un bâtiment de formation et à un laboratoire, mais aucune fuite radioactive n’a été constatée, ont indiqué les autorités ukrainiennes. Face à «une situation sans précédent», le chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a proposé de se rendre en Ukraine pour négocier une solution avec les Russes afin de garantir la sécurité des sites nucléaires. «C’est la première fois qu’un conflit militaire a lieu dans un pays doté d’un large programme nucléaire», a-t-il déclaré. L’Ukraine dispose de 15 réacteurs dans quatre centrales et de plusieurs autres sites. 

Celui de Tchernobyl, lieu de la pire catastrophe nucléaire de l’histoire en 1986, est tombé aux mains des troupes russes la semaine dernière. De son côté, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a accusé Moscou de recourir à «la terreur nucléaire» et appelé à «une action européenne immédiate» pour «empêcher que l’Europe ne meure d’un désastre nucléaire». «Un renforcement immédiat de sanctions contre l’Etat terroriste nucléaire est nécessaire», a-t-il déclaré dans une vidéo publiée par la Présidence ukrainienne. En conséquence, le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu) a prévu ce même jour une réunion, à la demande du Royaume-Uni, afin d’étudier les conséquences des bombardements.

Les Russes ont pris jeudi le contrôle de Kherson proche de la Crimée. Quant au port stratégique de Marioupol, au sud-est, où le maire accusait jeudi les forces russes de vouloir instaurer «un blocus», les autorités régionales ont indiqué ne disposer d’«aucune communication»

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