L a France, après l’indépendance de notre pays, a reconnu officiellement, mais tardivement, la «guerre d’Algérie» au lieu d’«événements d’Algérie». Pour beaucoup, c’est enfin la reconnaissance du colonisateur de la «guerre de Libération» et par conséquent de l’occupation de notre pays.
Or, la guerre comme l’affirme Clausewitz, «c’est la continuation de la politique par d’autres moyens». La France, allant dans le sens inverse, continue la guerre au moyen d’une stratégie machiavélique pour se venger de l’Algérie, le seul pays qui a mené une guerre, véritablement de libération nationale.
La stratégie machiavélique, c’est lorsqu’on substitue les retombées «d’une guerre classique, inter-étatique et symétrique, avec des armées similaires», et limitée dans le temps, à une guerre de libération d’un pays ayant subi le génocide pendant les 132 ans d’une colonisation de peuplement ponctuée par des pratiques de tortures et de dépossession des populations autochtones.
C’est dans cette optique que la France, après l’indépendance de l’Algérie, veut imposer sa vision d’une guerre «de sept ans, de 1954 à 1962» pour imposer les retombées d’une «guerre classique».
Parce que ce genre de guerre est finalisé par une réconciliation et la reconnaissance des dommages matériels, moraux et collatéraux, ainsi que les massacres de civils commis par les deux belligérants.
C’est pour cela que depuis l’indépendance de l’Algérie, la France, à travers son histoire officielle, n’aborde dans ses débats, rencontres, écrits, dans les médias et institutions officielles que la période 54-62, faisant abstraction de toute la période d’occupation.
Dans les écoles, où l’on enseigne «la guerre d’indépendance algérienne», souligne Paul Max Morin, dans El Watan du 31 octobre 2024, «les jeunes n’ont connaissance que des grandes dates, 1954, 1958, 1961 et 1962», pas celles ayant trait au génocide méthodique de 1830 à 1962 !
A part l’université et quelques centres académiques, comme l’affirme Paul Max Morin, «la colonisation, c’est-à-dire l’origine, est un désert cognitif et politique».
Et lorsque la France officielle évoque la colonisation, c’est pour faire la vente concomitante militante avec «la guerre d’Algérie», le communiqué pervers sur Ben M’hidi en est la preuve : «Depuis 2017, le président de la République française a entendu regarder l’histoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie en sa vérité, dans le but d’aboutir à la constitution d’une mémoire apaisée et partagée.» C’est-à-dire que les crimes de la guerre d’Algérie doivent être partagés entre «le FLN» et la France !!!
Dans un discours à l’Elysée, Emmanuel Macron a exprimé «la reconnaissance» de la France envers les rapatriés d’Algérie et reconnu deux «massacres» qui se sont produits après la signature des accords d’Evian du 19 mars 1962. D’abord, la fusillade de la rue d’Isly à Alger en mars 1962, dans laquelle des dizaines de partisans de l’Algérie française furent tués par l’armée française, ensuite le «massacre du 5 juillet 1962» à Oran, qui toucha «des centaines d’Européens, essentiellement des Français» par le FLN.
«Ce massacre doit être regardé en face et reconnu», a-t-il tranché. «La vérité doit être de mise et l’histoire transmise», a insisté le chef de l’Etat. (Source AFP publiée le 26 janvier 2022)
La France veut donc qu’à son tour, l’Algérie reconnaisse «ses dépassements envers les pieds-noirs et les harkis», et qu’elle adopte des récits différents de ceux de l’Algérie officielle.
La finalité de cette stratégie, qui a commencé par la création par l’OAS d’un parti d’extrême droite, auquel s’est ralliée une partie de la droite à la solde des revanchards et par la constitution d’un rassemblement néo-OAS, c’est de se venger de l’Algérie.
De la faire payer, en exigeant qu’elle «reconnaisse les massacres des civils et qu’elle dédommage les descendants des victimes qui ont été spolies de leurs «biens» !!
Face à cette surenchère, l’Algérie officielle ne doit plus s’appesantir sur la guerre de Libération 54-62 avec les autorités françaises, qui affinent ces dernières années, avec le néo-OAS, sa guerre politique, elle doit, par contre, se focaliser sur la période 1830-1954, sur le génocide, la dépossession, la spoliation de tous les biens algériens et les raisons qui ont poussé le politique à déclencher la guerre de Libération le 1er novembre 1954.
C’est l’occasion pour l’Algérie de «tourner la page». Certes, sans «la déchirer», mais en y inscrivant en lettres rouges les grandes dates du génocide et ses séquelles.
Par A. Boubekeur ,
Fonctionnaire en retraite
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