La loi sur la lutte contre la spéculation entre en vigueur : La perpétuité pour les spéculateurs

08/01/2022 mis à jour: 01:30
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Photo : D. R.

La spéculation illicite est définie comme «tout stockage ou rétention de biens ou de marchandises visant à provoquer une pénurie sur le marché ou une perturbation des approvisionnements au niveau du marché, et toute hausse ou diminution artificielle des prix des biens ou marchandises ou des billets de banque».

La loi relative à la lutte contre la spéculation illicite a été publiée le 29 décembre 2021 au Journal officiel. Ce texte juridique entre officiellement en vigueur dans un contexte de tension persistante sur des produits de large consommation.

Les prix de certains produits alimentaires subventionnés et même non subventionnés ont connu ces derniers jours une envolée pour atteindre des niveaux insensés alors que d’autres ont connu une pénurie inexpliquée par les citoyens qui ne savent plus à quelle autorité se vouer. A l’entame du Nouvel An, les boulangers ont procédé à l’augmentation de 50% du prix de la baguette de pain ordinaire et qui en plus devient rare.

La pénurie a également touché l’huile de table et la farine. Le coupable de cette hausse vertigineuse des prix et la raréfaction des produits alimentaires est tout désigné par les défenseurs des commerçants. Il s’agit du «commerce informel» et «des lobbies» qui constituent, selon eux, «une issue sûre» pour les spéculateurs et autres détenteurs de monopoles afin de vendre leurs marchandises et d’imposer «leur diktat».

Pour l’heure, les différentes stratégies mises en œuvre par les ministres qui se sont succédé au département du Commerce n’ont pu atténuer un tant soit peu l’instabilité des prix sur le marché national. Il ne se passe pas une année sans que de sérieuses perturbations bouleversent les divers créneaux d’activité à travers tout le territoire national.

Récemment, des enquêtes ont été menées par les services de sécurité sur l’indisponibilité de certains produits de large consommation, mais le problème reste de mise. Face à ces pénuries récurrentes, la nouvelle loi suffira-t-elle pour juguler la spéculation ? Selon les autorités, ce projet de loi relatif à la lutte contre la spéculation illicite s’impose car il constitue «un cadre juridique qui sanctionne tout individu qui ose recourir au trafic ou à la spéculation» des marchandises au détriment des citoyens.

Produits de première nécessité

Que prévoit justement ce nouveau texte de loi ? Dans son chapitre relatif aux dispositions pénales, la loi prévoit des peines privatives de liberté et des amendes selon une échelle graduelle logique ascendante des peines.

Si le crime concerne des produits de base, comme les céréales et leurs dérivés, le lait, l’huile, le sucre, le café et les légumineuses secs, les fruits, les carburants et les produits pharmaceutiques, la peine peut aller jusqu’à 20 ans de prison et une amende de 10 millions de dinars.

Cette peine pourrait être portée jusqu’à 30 ans de prison et une amende de 20 millions de dinars dans le cas où ce crime serait commis dans des circonstances exceptionnelles ou lors d’une crise sanitaire, de la propagation d’une épidémie ou d’une catastrophe. La peine pourrait être alourdie en réclusion à perpétuité si le crime est commis par un groupe criminel organisé.

Le projet prévoit également la confiscation du local lieu du crime, les moyens utilisés et l’argent réalisé, outre la radiation du registre du commerce, l’interdiction d’exercice d’activités commerciales, la fermeture du local lieu du crime ainsi que l’interdiction de son exploitation durant une année au maximum.

Le projet consacre également le principe d’incrimination de la tentative de délits stipulés dans ce projet, tout en prévoyant la même peine infligée à l’auteur principal pour l’incitateur et son associé avec la suppression des articles 172, 173 et 174 du code pénal pour éviter la double incrimination.

La spéculation illicite, précise le texte, est «tout stockage ou rétention de biens ou de marchandises visant à provoquer une pénurie sur le marché ou une perturbation des approvisionnements au niveau du marché, et toute hausse ou diminution artificielle des prix des biens ou marchandises ou des billets de banque de manière directe ou par le biais d’intermédiaire ou le recours à des moyens électroniques ou toutes voies ou moyens frauduleux quelconques».

Le projet de loi définit en outre la spéculation comme étant «la diffusion délibérément de fausses informations tendancieuses en vue de créer des perturbations sur le marché et augmenter les prix subitement sans aucun justificatif».

Ou également «de l’obtention, individuellement, collectivement ou sur la base de conventions, d’un profit résultant de l’application naturelle de l’offre et la demande».

Le texte de loi précise dans son article 3 que l’Etat, qui prend en charge l’élaboration d’une stratégie nationale pour assurer un équilibre au niveau du marché, par le bais de la stabilisation des prix et la restriction de la spéculation illicite à l’effet de préserver le pouvoir d’achat, prend aussi «toute mesure pour éliminer la spéculation illicite». 

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