Institut de développement des ressources humaines d’Oran : Yasmina Khadra présente son dernier roman «Les Vertueux»

13/04/2023 mis à jour: 05:30
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Yasmina Khadra avec un artiste qui a réalisé son portrait en direct lors de la rencontre - Photo : D. R.

Une rencontre avec Yasmina Khadra a été organisée dans la soirée de lundi dernier à l’IDRH (Institut de développement des ressources humaines) à Oran, une initiative conjointe avec le centre des études maghrébines (CEMA).

Une occasion pour le célèbre écrivain algérien de présenter localement son tout dernier roman Les Vertueux, de rencontrer ses lecteurs pour répondre à leurs questionnements, de parler encore une fois de son expérience et, au final, d’animer une séance de dédicaces.

L’idée de traiter par le biais de la littérature le cas des tirailleurs algériens, notamment ceux du début du XXe siècle, explique-t-il, remonte à plusieurs années et c’était suite à sa rencontre avec Kamel Mouellef, qui a collaboré à la réalisation d’une bande dessinée consacrée à ce pan occulté de l’histoire et qui lui a demandé de rédiger une préface.

Chose faite, on lui a ensuite suggéré d’écrire quelque chose, mais il n’était «pas intéressé à l’époque». A défaut d’imprégnation, il fallait un élément déclencheur. «Je ne pouvais pas écrire sur une simple demande et c’est pour cela que je ne me suis pas lancé, mais l’idée était restée dans mon subconscient comme un agent dormant», fait-il remarquer pour ensuite indiquer comment le projet a brusquement fait irruption dans sa tête au détour d’une conversation qu’il a eu avec sa mère ici même à Oran.

Celle-ci a été amenée à évoquer la Première Guerre mondiale et le cas de proches partis pour ne jamais revenir, etc. «Elle pouvait détester, mais elle en parle sans haine, sans une once d’idée de vengeance ou de violence et c’est pour lui rendre hommage que j’ai voulu à tout prix réussir ce roman qui a nécessité trois années de travail», ajoute-t-il.

Quant à savoir si, comme il insiste à le répéter, c’est  le meilleur de ce qu’il a écrit, c’est sans doute aux lecteurs d’en juger. Ses lecteurs, anciens et nouveaux, étaient au rendez-vous ce soir-là également pour l’écouter parler de son expérience, de son avis sur la littérature en Algérie ou même sur la société algérienne en général.

«Mon rêve était d’aller à l’université pour préparer une licence de sociologie mais pour cela, dans l’école des cadets de la Révolution où j’étais, il fallait être excellent et avoir dix-huit sur vingt de moyenne au bac, ce que je n’ai pas obtenu (seulement 13/20), d’où mon orientation vers l’Académie militaire», déclare-t-il, en exprimant un seul regret, celui d’être depuis l’âge de neuf ans «ravi à cette société» qu’il a voulu «reconquérir par l’écriture».

Les auteurs qui l’impressionnent le plus sont les sociologues car, précise-il, ceux-ci aident les romanciers à mieux construire leurs personnages. Néanmoins, pour l’écrivain algérien le plus lu dans le monde, l’inspiration reste la base de tout et l’acte d’écrire est tout aussi bien un moyen de comprendre ces choses que la société impose à l’individu est qui souvent le dépassent.

A l’origine de l’inspiration un village, Kenadsa, mais qui a huit siècles d’existence avec des gens qui sont restés les mêmes dans leur immense sagesse. Tout autour, le désert avec ses oasis mais aussi ses mirages. «Il faut apprendre à s’émerveiller, à proposer des choses intéressantes, des histoires à faire voyager le lecteur, etc.»

Le conseil est destiné aux jeunes qui veulent se lancer dans l’aventure, comme cette lycéenne d’à peine 14 ans. Même si les intrigues de certains de ses romans se passent dans des ailleurs lointains, il affirme néanmoins que l’Algérie l’a toujours interpellé.

Il a été en effet le premier à avoir donné au monde une «visibilité littéraire» et en temps opportun à la tragédie vécue en Algérie durant la décennie noire. Dans la littérature, l’impact du roman qu’il soit noir ou pas est, selon lui, toujours plus fort. Un bon roman l’est quelle que soit la catégorie dans laquelle on le classe.

Dans ses interventions et à maintes occasions, l’écrivain glorifie les Algériens, mais cela ne l’empêche pas de dénoncer leurs travers au même titre que ceux de certains dirigeants. «J’ai toujours milité pour que les écrivains de tout bord et qui s’expriment en français, en arabe ou en langue amazighe aient leur place dans notre société», réitère-t-il.

Lui-même souffre du fait qu’il ne soit pas assez considéré dans son propre pays malgré un succès fulgurant à l’international. Un succès qui lui a valu d’être traduit un peu partout sur la planète, y compris au japon, ce qui a ouvert la voie, rappelle un intervenant, à la création d’une spécialité sur la littérature algérienne à l’université de Tokyo.

Ecrivain prolifique, Yasmina Khadra annonce que son prochain livre sortira en 2024. Il est déjà chez l’éditeur, mais il a préféré «prendre une année sabbatique» avant son lancement. 

 

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