Inscription du melhoun comme patrimoine immatériel de l’humanité : Une poésie produite pour être chantée

14/12/2023 mis à jour: 07:46
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Le melhoun va se retrouver en milieu urbain dans la chanson andalouse et en milieu rural dans le bédoui

Le Maroc a obtenu à sa demande l’inscription du melhoun, «élément de référence incontournable de l’identité culturelle marocaine ancienne», comme patrimoine immatériel de l’humanité auprès de l’Unesco, selon des sites d’information marocains. 

Cet art poétique est en fait un patrimoine commun aux pays du Maghreb (Libye, Tunisie, Algérie, Maroc et Mauritanie) avec des différences linguistiques en raison du syncrétisme entre les parlers locaux et ceux des nouveaux arrivants musulmans au XIe siècle, une fusion qui s’est opérée selon les respectifs points de chute des tribus Banou Souleim, Banou Hillal et Banou Maquil. 

Le syncrétisme en matière poétique s’est, lui, effectué entre la poésie de la péninsule arabique et Aroud el balad ou métrique du pays selon Ibn Khaldoun, ainsi que le jazal andalou. Ainsi, le melhoun va se retrouver en milieu urbain dans la chanson andalouse et en milieu rural dans le bédoui. Pour ce qui est de sa dénomination, elle viendrait des puristes qui lui reprochent qu’en matière de langue arabe, il n’est pas conforme à la syntaxe de la fos’ha. 

Selon d’autres sources, il est appelé ainsi parce qu’il est une poésie produite pour être chantée. Pour ce qui est de son apparition au Maroc, selon le site Belpresse, il est avancé dans le dossier marocain que le melhoun y «est apparu dans la région du Tafilalet, au sud-est du Maroc, se développant d’abord au sein des zaouïas de la région, puis s’étendant progressivement pour atteindre les grandes agglomérations urbaines, où il était largement accueilli et joué principalement au sein des corporations d’artisans dans les vieilles villes». 

Relevons, d’une part, que la tribu des Banou Maquil s’était établie de part et d’autre de l’actuelle frontière algéro-marocaine, et que c’est le même bédoui qui fleurit tant dans la vallée du Guir en nord Saoura qu’au Tafilalet. 

Par ailleurs, la citation des zaouias comme lieu d’épanouissement est curieuse dans la mesure où il ne s’y pratiquait que medh à l’exclusion du ghazal, la poésie amoureuse et les poésies sapientiale et satirique. Enfin, si le Maroc fait cavalier seul, ne serait-ce pas également parce qu’il n’aurait pas été suivi dans l’assertion suivant figurant dans son dossier et soulignant que les vers du melhoun «sont chantés en arabe dialectal et parfois en hébreu».

 Il appartiendra donc à chacun des quatre autres pays de constituer un dossier dans la mesure où les uns disposent d’une longueur d’avance sur les autres. Ainsi, la Tunisie a publié son «Moudawanat echiir echaâbi» en dix volumes, alors que «Maoussou’ate el melhoun», au Maroc, l’a été en douze volumes. L’Algérie, quant à elle, ne dispose pas de son anthologie du melhoun, bien qu’un spécialiste au sein du CRASC, collègue de l’actuelle ministre de la Culture, s’est publiquement proposé de s’y atteler en raison du corpus qu’il a réuni. 

Ce chercheur, qui a été reçu au ministère, Ahmed Amine Dellaï, en l’occurrence, est l’auteur d’un dictionnaire des poètes du melhoun du Maghreb, un ouvrage que l’Algérie officielle a offert au Président Kaïs Saïed. 
 

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