La Russie a réclamé à Washington la garantie que les sanctions la visant à cause de l’Ukraine ne concerneront pas sa coopération avec l’Iran, avant de relancer l’accord sur le nucléaire iranien, a indiqué hier le chef de la diplomatie russe.
L’Iran et l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) ont dit hier vouloir résoudre les questions en suspens en adoptant une approche «pragmatique» dans l’espoir de relancer un accord conclu en 2015 entre Téhéran et les grandes puissances.
En visite à Téhéran, le chef de l’AIEA, Rafael Grossi, a rencontré hier le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, peu après s’être entretenu avec le président de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA), Mohammad Eslami. «Nous avons décidé d’examiner les questions avec une approche pragmatique (...), de manière approfondie, mais aussi avec une intention claire d’arriver à (...) un résultat», a déclaré M. Grossi lors d’une conférence de presse avec M. Eslami.
«Nous sommes arrivés à la conclusion que l’Iran et l’AEIA échangent des documents au plus tard à Khordad (mois iranien qui débute le 22 mai, ndlr), afin de résoudre ces questions (...) comme prévu dans les pourparlers à Vienne», a indiqué de son côté M. Eslami.
La visite cruciale de M. Grossi s’inscrit dans le cadre des efforts menés à Vienne pour sauver l’accord de 2015. Conclu par l’Iran d’un côté, et par les Etats-Unis, la Chine, la France, le Royaume-Uni, la Russie et l’Allemagne de l’autre, cet accord est censé empêcher l’Iran de se doter de la bombe atomique, une intention qu’a toujours nié ce pays.
Ce pacte avait permis la levée de sanctions économiques internationales contre l’Iran, en échange de strictes limites à son programme nucléaire. Mais les Etats-Unis s’en sont retirés en 2018 sous la présidence de Donald Trump et ont rétabli leurs sanctions qui asphyxient l’économie iranienne. En riposte, Téhéran s’est largement affranchi des restrictions à ses activités nucléaires. Vendredi, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a dit «espérer des résultats dans le courant du week-end» pour «ressusciter l’accord» de 2015.
Mercredi, M. Grossi avait dit que l’AIEA «n’abandonnerait jamais» ses efforts pour que l’Iran fournisse des éclaircissements sur la présence de matière nucléaire dans des sites non déclarés sur son territoire. L’Iran demande lui la clôture de l’enquête de l’AIEA pour parvenir à un compromis à Vienne qui permettrait de sauver l’accord de 2015.
«Maintenant que les pourparlers de Vienne sont en phase finale, l’une des lignes rouges de l’Iran est de clore définitivement le dossier de ces allégations pour ne pas causer plus de problèmes à notre pays», a indiqué M. Eslami. Pour M. Grossi, les deux sujets sont «étroitement liés».
«Bien que ces processus soient en quelque sorte parallèles (...) l’un ne peut ignorer l’autre», a-t-il précisé hier. M. Grossi doit tenir une conférence de presse à son retour à Vienne samedi soir, selon l’AIEA. L’enjeu est de faire revenir dans l’accord de 2015 Washington et de ramener Téhéran au respect de ses engagements.
Jours décisifs
Le chef de la diplomatie iranienne, Hossein Amir-Abdollahian, s’est dit lui prêt à se rendre à Vienne en cas d’un «accord final», qui dépend selon lui du «respect total des lignes rouges annoncées par l’Iran, y compris des garanties sur le plan économique».
Il n’a pas précisé ces garanties ou ces «lignes rouges». Les prochains jours sont perçus comme décisifs par les Occidentaux car ceux-ci estiment qu’au rythme auquel l’Iran engrange les avancées nucléaires et que l’accord sera bientôt caduc. La France a estimé «urgent» de «conclure cette semaine».
Des observateurs pensent que les Occidentaux pourraient quitter la table des négociations si un compromis n’est pas conclu ce weekend. Parallèlement aux négociations à Vienne, l’Iran a continué à accumuler des stocks d’uranium enrichi.
Selon un rapport de l’AIEA consulté jeudi par l’AFP, ils dépassent désormais de plus de 15 fois la limite autorisée par l’accord de 2015. L’Iran a dépassé le taux d’enrichissement de 3,67% fixé par l’accord, montant à 20% début 2021.
Puis il a franchi le seuil inédit de 60%, se rapprochant des 90% nécessaires à la confection d’une bombe. Le rapport sera examiné lors du Conseil des gouverneurs de l’AIEA la semaine prochaine, les négociateurs espérant aboutir à un compromis avant cette échéance.