- Les prix du mouton flambent. Pouvez-vous nous donner des explications ?
Nous remarquons à l’approche de chaque Aïd El Adha, la multiplication des attaques ciblées contre les éleveurs. Nous sommes, chaque année, accusés à tort de la flambée des prix. Nous comprenons tout à fait ce type d’attitude, étant donné que les gens ignorent les aléas de la filière d’élevage.
Un mouton prêt pour le sacrifice est passé par plusieurs étapes tout au long de l’année. C’est un animal qui a besoin de nourriture, de bonnes conditions de vie et de traitement en cas de besoin ou de maladie. Avec tous mes respects pour nos confrères agriculteurs, on ne traite pas un mouton comme on traite la pomme de terre.
Toutefois, les éleveurs sont délaissés tout au long de l’année. Jusqu’à aujourd’hui, nous n’avons pas été contactés par les autorités pour organiser ce rendez-vous religieux. Tout ce qui nous parvient, ce sont des accusations d’avoir relevé les prix, alors que les prix de vente dépendent de plusieurs facteurs, tels que les charges dont essentiellement l’alimentation.
- Donc, vous signifiez que vous n’êtes pas responsable de cette flambée ?
Absolument. La hausse vertigineuse des prix n’est pas de notre faute. Il faut savoir qu’aujourd’hui les prix ont, certes, doublé, mais cela n’est pas du ressort de l’éleveur. Il y a, comme je viens de le dire, plusieurs facteurs qui interviennent dans le prix.
Il faut savoir que la sécheresse a limité l’accès au vert, qui est un aliment essentiel pour le cheptel. Il y a également l’indisponibilité de l’aliment au niveau des Coopératives des céréales et des légumes secs (CCLS).
Chose qui ouvre grand la porte à la contrebande. L’orge qui coûtait 2000 DA en coopérative dépasse les 6500 DA en marché parallèle. De même pour le son de blé qui flambe. Il passe de 1500 DA en coopérative à 4500, voire 5000 DA en contrebande. Durant tout le parcours de vie du mouton de l’aïd, les éleveurs sont abandonnés et la filière est déréglée.
- Avez-vous proposé des solutions à la tutelle pour la restructuration de la filière ?
Il y a plus de 5 années que nous proposons plusieurs solutions, sans pour autant qu’elles soient concrétisées. Nous avions proposé la mise en place de points de vente afin que les éleveurs puissent vendre directement au consommateur sans aucun intermédiaire. L’idée a fonctionné deux années de suite, puis les choses se sont dégradées avec l’emprise de la contrebande et la multiplication des intermédiaires. Ce sont ces revendeurs qui augmentent les marges bénéficiaires au détriment de l’éleveur et du consommateur.
Nous avions également refusé l’importation de viande rouge et rassuré quant à la disponibilité de la production. Malgré l’indisponibilité de chiffres officiels concordants, je peux affirmer que nous avons au minimum 27 millions de têtes en ovin, avec près de 25 millions de têtes de brebis productrices.
Si nous enlevons 10 millions de têtes qui pourraient ne pas produire, les 15 millions de têtes restantes suffisent largement à la production annuelle et aussi à celle de l’Aïd El Adha dont le besoin en consommation ne dépasse pas les 4,5 à 5 millions de têtes. Malgré tout cela, rien à l’horizon en matière de prise en charge de la filière et des vrais éleveurs.