De la vie, Christiane aura beaucoup connu le spectacle affreux des inégalités et des injustices, l’oppression criante, l’engagement et le combat pour une cause juste, celle de l’Algérie en guerre.
C’est qu’il faut bien la connaître Christiane, pour apprécier son intransigeance sur les principes, qui guident sa vie, imprégnée par la singularité de son tempérament de femme de gauche, et qui le revendique, plus proche de la veuve et de l’orphelin, des opprimés, que des palais et des tralalas bourgeois. Elle a toujours été une femme d’action, attentive à son temps, le sien et le nôtre. Elle n’a rien oublié, et d’abord, ce qui l’a meurtrie. Les injustices, surtout, qu’elle abhorre et qu’elle s’est jurée de combattre jusqu’à son dernier souffle.
A 18 ans, seulement elle était engagée en 1958 , au sein de la Fédération de France du FLN, aux côtés d’un jeune Algérien immigré responsable, d’un secteur de cette structure dans le XVIII arrondissement de Paris, qui deviendra son mari. J’ai nommé le moudjahid Bouamrane Mohamed (dit Dziri), qui nous a quittés le 5 janvier 2023, (Allah yerhmou) et qui a été le premier maire d’El Marsa au lendemain de l’indépendance. Christiane s’est illustrée, par son courage, sa détermination et sa foi en la Révolution, en effectuant des missions délicates et très risquées dans les transferts d’armes, de fonds, dans l’acheminement du courrier, en s’érigeant en véritable «porteuse de valises» dans des missions périlleuses, notamment en France et en Allemagne.
Son travail était salué par ses camarades militantes et militants de la fédération qui ont mis en exergue ses sacrifices, à l’instar de Ghafir Mohamed, dit Moh Clichy, cadre de cette structure, qui a assisté à son enterrement au cimetière de Bordj El Bahri, en soulignant «ses capacités impressionnantes d’organisation, son dévouement, son respect des consignes, de la ponctualité et de la discipline».
Christiane n’a pas longtemps survécu au départ de son mari auquel elle était très attachée et qu’elle a juré de le suivre partout au début de leur union. Ce qu’elle a fait peu avant l’indépendance, quand elle est rentrée avec Mohamed, en Algérie, en prenant contact avec la Wilaya 3 Zone 4,basée à Zemmouri, sous la direction de Si Moh Nahli, où ils ont activé jusqu’à l’indépendance.
Pour diriger ensuite la mairie d’El Marsa où tout était à construire. Son mari Si Mohamed Bouamrane, (qui n’est autre que le frère aîné de notre ami Hamid Bouamrane, ancien haut cadre du MJS) n’était nullement en terrain inconnu, puisqu’il y est né, en 1933, et passé une partie de sa jeunesse avant d’émigrer.
Son choix à la tête de la commune a été un plébiscite, tant Mohamed était apprécié pour ses qualités humaines, son passé nationaliste et inspirait confiance, d’ailleurs jamais démentie. La mort de son mari, Mohamed en janvier dernier, à l’âge de 90 ans, a encore fragilisé la santé précaire de Christiane, qui a eu beaucoup de difficultés à se déplacer personnellement, comme exigé, à la commission médicale spécialisée de l’organisation des moudjahidine à Alger, du fait de son invalidité pour régulariser sa pension de moudjahida, ramenée finalement à 100%.
Christiane, qui nous quitte à l’âge de 82 ans, a été enterrée le 11 juillet 2023 dans le carré familial des Bouamrane du cimetière Sidi Ali de Bordj El Bahri. Mme et M. Bouamrane, que Dieu ait leurs âmes ont laissé 3 garçons et une fille.