Folie sélective de Trump !

04/03/2025 mis à jour: 07:33
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On a souvent invoqué la «stratégie du fou» pour tenter d’expliquer le comportement du président américain, notamment lors de l’entrevue qu’il a eue avec le président ukrainien dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche.

La plupart des commentateurs occidentaux, devant les images virales de l’empoignade verbale entre les deux chefs d’Etat, se sont empressés dans un souci pédagogique de rappeler la stratégie, inaugurée par l’ancien président Richard Nixon en pleine escalade de la guerre du Vietnam, pour comprendre la réaction inattendue de Donald Trump.

En 1972, alors que les Etats-Unis s’embourbaient en Asie du Sud-Est, le conseiller diplomatique du président américain de l’époque, Henry Kissinger, suggère au président américain de faire croire aux dirigeants de l’Union soviétique et des pays de l’Est qu’ils avaient en face d’eux le chef d’une superpuissance, au comportement imprévisible, prêt jusqu’à appuyer sur le fameux bouton nucléaire si les intérêts des Etats-Unis étaient menacés. Et qu’il valait mieux ne pas provoquer les Etats-Unis dans leurs zones d’influence. Un message adressé en pleine guerre froide aussi bien à Moscou qu’à Pékin.

Il n’est pas inutile de rappeler que Donald Trump, lors de son premier mandat, a eu recours au même procédé quand il s’agissait de reprendre langue avec la Corée du Nord et son dirigeant Kim Jung-un, qu’il qualifia d’homme «formidable», alors que tous les autres dirigeants occidentaux voyaient plutôt un «dictateur dangereux pour la paix et la sécurité dans le monde». Cette approche diplomatique singulière de Donald Trump dans les relations géostratégiques sema la confusion, voire même un certain désarroi dans le camp des pays occidentaux.

Tout comme ils le sont aujourd’hui, après les saillies verbales adressées par Trump, soutenues par celles de son vice-président J. D. Vance, au président ukrainien, renvoyé de la Maison-Blanche comme un gamin qui aurait raté son examen et auquel on a demandé de ne revenir que s’il se sent prêt à passer de nouveau les épreuves… Sauf que malheureusement, force est de constater que la «folie» de Trump est aujourd’hui sélective et qu’elle épargne Israël et ses dirigeants suprémacistes et racistes, ordonnateurs d’un génocide contre les Palestiniens qui a fait plus de 50 000 victimes, des centaines de milliers de blessés et des sans-abri, sans compter les disparus tout aussi difficiles à dénombrer à Ghaza.

Tandis qu’en Cisjordanie, les néo-nazis de Tel-Aviv ne songent qu’à coloniser de nouvelles terres par la force et aux crimes de guerre à l’encontre des camps palestiniens. Ils ont déjà chassé 40 000 réfugiés de Jénine et de Tulkarem, et rêvent d’annexer purement ce qu’ils appellent la «Judée et Samarie», reprenant l’appellation biblique de la Cisjordanie. C’est le rêve fou des 11 ministres représentant et issus de la colonisation sur les 29 que compte le gouvernement des suprémacistes de Benyamin Netanyahu.

Autant Trump a dit devant le président ukrainien qu’il était pressé de voir le retour de la paix en Ukraine, que c’était une question d’opportunité qu’il fallait saisir  avant qu’il ne soit trop tard, autant il ne semble pas pressé de faire en sorte que les Israéliens aillent rapidement vers un accord de paix durable avec les Palestiniens.

Bien au contraire, la Maison-Blanche vient de proposer une prolongation de la première phase de l’accord de cessez-le-feu, censée avoir pris fin samedi dernier, jusqu’après les fêtes de l’Aïd à la fin du Ramadhan et de la Pâque juive, autrement dit une cinquantaine de jours.

Une procrastination qui fait le jeu de Tel-Aviv, qui use de l’arme de la faim à l’encontre des Ghazaouis, en empêchant tout arrivage humanitaire dans l’enclave palestinienne, livrant ainsi près de deux millions de personnes au froid et à la famine.

Enfin, comment ne pas réagir lorsque l’on entend Donald Trump marteler devant son interlocuteur ukrainien complètement abasourdi, qu’il était un homme de paix et qu’il n’aimait pas la guerre, et juste après, on apprend que son administration, par le biais du secrétaire d’Etat Marco Rubio, vient de signer une aide militaire d’urgence de 4 milliards de dollars à Tel-Aviv. Sans doute de quoi poursuivre le génocide durant les prochains cinquante jours à Ghaza et en Cisjordanie.

 

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