Mohamed Charfi, à la tête de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) depuis l’automne 2019, a subi une salve de vives critiques en raison de la confusion qui a marqué les résultats provisoires de la dernière élection présidentielle.
Qui succédera à Mohamed Charfi à la tête de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) ? Cet ancien ministre de la Justice a été écarté, mercredi dernier, de la présidence de cette instance. «Un départ» très attendu, après l’élection présidentielle anticipée du 7 septembre dernier, marquée par une «polémique» et une «cacophonie» sans précédent, notamment suite à l’annonce des résultats préliminaires.
En effet, près de trois mois après cette échéance électorale, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a mis fin aux fonctions de Mohamed Charfi en tant que président de l’ANIE «suite à sa demande». C’est ce qu’a indiqué un décret présidentiel publié dans le journal officiel n° 24-378 du 27 novembre 2024 : «Il est mis fin aux fonctions du président de l’Autorité nationale indépendante des élections, exercées par Mohamed Charfi, sur sa demande pour des raisons de santé.»
Mohamed Charfi, à la tête de cette autorité depuis l’automne 2019, a subi une salve de vives critiques en raison de la confusion qui a marqué les résultats provisoires de la dernière élection. Il s’est confiné, depuis cette date, dans un silence pesant. Il ne s’est ni exprimé, ni a justifié, ni commenté la polémique au sujet des taux de participation au dernier scrutin présidentiel et le nombre de voix obtenues par chacun des trois candidats.
Pourtant, lors de son communiqué publié dans la nuit du 8 septembre, l’instance qu’il présidait avait promis «d’informer l’opinion publique» sur le déroulement de la dernière phase de l’opération électorale. Le 14 septembre, la Cour constitutionnelle a proclamé les résultats en confirmant la réélection du président Tebboune dès le premier tour pour un second mandat, tout en corrigeant totalement les chiffres de l’ANIE. Et tous les scores ont été revus à la hausse.
Invité à la cérémonie d’investiture du président de la République, l’homme semblait être affecté par cette polémique, mais il a refusé de faire une quelconque déclaration aux journalistes qui voulaient l’interroger sur ce qui s’est passé. «Laissez-moi me reposer un peu, et ensuite j’aurais le temps de répondre à toutes vos questions !» leur avait-il lancé avant de quitter la salle de conférences de Club des pins. Depuis, il n’avait fait aucune autre apparition.
«L’ANIE, un pilier de la démocratie»
De leur côté, les trois candidats à cette présidentielle, à savoir Abdelmadjid Tebboune, par le biais de son directeur de campagne, Youcef Aouchiche, au nom du Front des forces socialistes (FFS) et Abdelaali Hassani Cherif pour le mouvement de la société pour la paix (MSP) ont signé une déclaration conjointe, au lendemain de l’élection, pour dénoncer «l’opacité et la contradiction dans les chiffres» avancés par M. Charfi. Ils ont réclamé l’ouverture d’une enquête pour situer les responsabilités.
Certains ont même revendiqué la dissolution de l’ANIE. Le 5 octobre, le président Abdelmadjid Tebboune a évoqué le sujet lors de son entrevue avec des journalistes, et avait reconnu que «ce qui s’est passé est une première dans les annales des élections», précisant que des «investigations approfondies sont en cours» pour déterminer les responsabilités.
Le chef de l’Etat ne s’est pas exprimé sur le sort du président de l’ANIE et ses membres, nommés pour un mandat de six ans non renouvelable.
«L’ANIE est une institution constitutionnelle, un pilier de la démocratie et de l’intégrité des élections en Algérie. Parfois, certaines personnes n’ont pas été à la hauteur de cette institution, et même l’institution elle-même pourrait ne pas avoir été au niveau requis par la Constitution», avait-il dit, avant de préciser : «Nous ne pouvons juger personne avant l’aboutissement des investigations.»
M. Charfi, pour rappel, a été nommé en septembre 2019 à la tête de l’autorité. Son instance a supervisé l'élection présidentielle du 12 décembre 2019. Elle a ensuite organisé le référendum constitutionnel de 2020, les élections législatives et locales de 2021, puis le scrutin présidentiel de 2024.
L’institution a été inscrite dans le marbre de la Constitution de 2020. Si le départ de Mohamed Charfi, qui était prévisible, est acté, les Algériens attendent toujours une explication officielle sur ce qui s’est passé dans la journée du 7 et dans la nuit du 8 septembre dernier…