La crise d’indisponibilité de véhicules neufs qui frappe le secteur automobile en Algérie suscite beaucoup d’interrogations, à telle enseigne d’occuper le débat public.
Cette question a été, ces dernières semaines, même au centre des discussions des députés pour le projet de loi de finances (PLF) 2025 à l’Assemblée populaire nationale (APN), où elle a connu de vives réactions en raison de la pénurie des véhicules en Algérie.
Lors des discussions portant sur le PLF-2025, les députés ont abordé une kyrielle de questions sur l’état du marché automobile, en particulier après le gel de l’importation des véhicules neufs et ceux de moins de trois ans. Ils ont plaidé pour la levée urgente de ce gel pour lequel le gouvernement algérien met en place de nouvelles règles strictes pour réguler l’importation de véhicules neufs, dans le but de mieux contrôler le marché et de favoriser le développement de l’industrie automobile nationale.
En réponse à un courrier formulé par le président du groupe parlementaire du Mouvement El Bina, Abdelkader Berriche, sur les raisons ayant conduit à la suspension de l’importation de voitures, le ministre de l’Industrie et de la Production pharmaceutique, Ali Aoun, a souligné, dans ce sillage, que la gestion du dossier automobile ne peut être réduite uniquement à la question des quotas attribués aux concessionnaires, mais concerne également plusieurs autres facteurs-clés.
Toutefois, M. Ali Aoun a précisé dans sa réponse que «ses services œuvrent à régler le problème de la rareté de véhicules qui impose d’approvisionner le marché local par l’importation de voitures, en attendant le développement de l’activité de construction automobile».
Aoun a également souligné que ses services travaillent en coordination avec le ministère du Commerce pour définir les critères de répartition de ce quota. Ces critères reposent essentiellement sur le volume des besoins du marché, la préservation des réserves de change, les demandes des opérateurs et leur engagement à acquérir et à distribuer le quota de 2023, conformément au cahier des charges d’importation et de commercialisation des voitures, notamment en ce qui concerne les quotas non exploités en 2023. De plus, la suppression du document de domiciliation bancaire sera appliquée si l’importation n’est pas réalisée.
Les projets d’investissement dans le domaine de l’assemblage de véhicules seront également pris en compte. Le tout sera équilibré avec les capacités financières de chaque opérateur et la capacité des banques à financer l’opération via des procédures de domiciliation bancaire. Toutes ces démarches nécessitent l’approbation du Conseil supérieur de régulation des importations.
L’occasion pour diversifier le marché
Les députés n’ont pas manqué d’aborder la question liée au marché de l’importation de véhicules d’occasion qui connaît un gel de délivrance de cartes grises depuis le 1er novembre dernier. Cette suspension a été justifiée par une opération de recensement des véhicules déjà importés, en application du décret exécutif n°23-74 du 20 février 2023.
Le groupe parlementaire a plaidé pour l’extension de la période d’âge des véhicules importables à cinq ans, afin de permettre aux citoyens algériens un accès élargi et plus souple.
Les députés ont également insisté sur la nécessité de simplifier les procédures administratives liées à l’importation, dans le but de faciliter les démarches des particuliers et de réduire les délais d’immatriculation. Ils ont proposé de lever certaines restrictions, notamment celle imposant une interdiction de revente des voitures importées pendant trois ans après leur acquisition, afin de promouvoir une plus grande flexibilité dans l’usage des biens privés et de dynamiser le marché.
Dans ce sens, les députés ont appelé à l’abrogation de l’alinéa, stipulant que ces véhicules «ne peuvent être cédés pendant une période de trois ans à compter de leur acquisition». Selon eux, cela entrave le droit de la propriété privée, consacré par la Constitution algérienne. Toujours selon eux, cette disposition limite la liberté commerciale du citoyen et la propriété individuelle.
Cependant, l’ensemble des amendements soumis à ce sujet ont été rejetés par la commission des finances de l’APN, comme l’a annoncé le député des Algériens de France, Abdelouahab Yagoubi, dans un post sur Facebook.
Avec le groupe de parlementaires, M. Yagoubi avait, dans ce sens, proposé un amendement autorisant les membres de la communauté algérienne établie à l’étranger à importer des véhicules de moins de trois ans, avec l’objectif d’atténuer les tensions sur le marché national.
Une extension de cette mesure aux véhicules de moins de cinq ans avait également été suggérée. Malgré ces initiatives, aucune des propositions n’a été adoptée.
En attendant le retour à l’importation de véhicules neufs, comme l’a signifié en filigrane le ministre Aoun dans la réponse à la requête du député du groupe parlementaire du Mouvement El Bina, l’heure est, semble-t-il, de trouver un équilibre entre la satisfaction de la demande du marché et la préservation des réserves de change du pays.
Cette question reste le défi de taille des pouvoirs publics afin de concilier les impératifs économiques avec les réalités sociales d’un marché automobile national en proie à une pénurie endémique.
A l’évidence, l’on constate que le dossier de l’importation de véhicules n’est pas clos définitivement, et des solutions sont bel et bien envisageables pour un retour imminent à l’activité. Reste à savoir combien de temps cela prendra encore dans la mesure où le besoin se fait réellement sentir.
Par Aziz Kharoum
[email protected]