Une multitude de sigles pour une même cause. Le nationalisme algérien n’est pas porté par une seule voix. Au contraire, les voies étaient multiples. Divers courants y étaient représentés, en dépit de la répression du colonialisme. Un véritable multipartisme a, en effet, vu le jour en Algérie bien avant l’indépendance. Le Mouvement national avait plusieurs facettes.
De l’Etoile nord-africaine, qui a donné naissance au PPA-MTLD et au FLN, déclencheur de la guerre de Libération nationale, en passant par les Amis du manifeste et de la liberté (AML), l’UDMA, le Parti communiste algérien (PCA) et les Oulémas, la lutte politique était longue. Et elle est le fruit de plusieurs décennies de maturation. Il faut remonter jusqu’aux années 1920, soit au lendemain de la Première Guerre mondiale, pour retrouver les premiers balbutiements de l’action politique algérienne.
Avec l’apport de l’immigration et des jeunes intellectuels, les revendications à caractère politique émergent. «L’Algérie n’a connu le phénomène des partis politiques qu’avec les immigrés en France qui étaient en contact avec les Européens là-bas. Ils ont découvert de nouvelles méthodes de militantisme, comme les partis, les journaux, les manifestations, les grèves, ainsi que les idées de la nation, du socialisme et autres», explique Rabah Lounici, auteur et enseignant d’histoire à l’université d’Oran.
C’est ainsi que Ferhat Abbas lance le courant des Jeunes Algériens (issu de la Fédération des élus musulmans), qui prône l’égalité des droits politiques. Devant un système colonial qui empêche les appareils politiques locaux de fonctionner normalement, les mouvements indépendantistes sont nés en exil. En France. En 1926, des militants algériens issus de la classe ouvrière de l’immigration lancent l’Etoile nord-africaine (ENA).
Le mouvement, présidé par Messali Hadj, réclame, entre autres, l’indépendance de l’Afrique du Nord. «L’ENA était la première organisation à revendiquer ouvertement et publiquement la restauration de la souveraineté nationale, puis l’idée s’est propagée en Algérie. Après la dissolution de l’ENA, ses militants lancent le Parti du peuple algérien (PPA) en 1937, qui s’est transformé en PPA-MTLD en 1946, qui créera l’Organisation spéciale (OS) qui est structurée paramilitairement et chargée de préparer la Révolution armée, déclenchée le 1er Novembre 1954», précise-t-il.
Toujours entre les deux guerres mondiales, la sauvegarde de la culture algérienne et la religion musulmane jouent un rôle essentiel dans la construction de la nation. Un autre mouvement a vu le jour en 1931. Il s’agit de l’Association des oulémas musulmans algériens, présidée par cheikh Ben Badis. L’Association défend plutôt le droit de préserver l’héritage culturel, la religion et la langue arabe.
L’autre mouvement lancé à la veille de la Seconde Guerre mondiale est le Parti communiste algérien (PCA), créé en 1936 et dirigé par des Algériens, tels que Ben Ali Boukort, Amar Ouzegane et Ahmed Akkache. cette formation, explique Mustapha Saâdaoui, enseignant-chercheur à l’université de Bouira, conçoit la question algérienne en fonction de l’idéologie communiste qui met en avant la nécessité de régler les problèmes sociaux.
Lors du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, le leader du PPA se rallie au Manifeste du peuple algérien (MNA) de Ferhat Abbas, qui appelle à un nouveau statut pour l’Algérie, en février 1943. C’est la première fois que le Mouvement national algérien est uni dans la lutte vers l’indépendance. Mais pas sur les moyens. Ferhat Abbas lance également, dès 1944, les Amis du manifeste et de la liberté (AML), devenu, en 1946, l’Union démocratique du manifeste algérien (UDMA) qui défend toujours l’idée d’un nouveau statut pour l’Algérie.